Pour faire une prairie il faut un trèfle et une seule abeille,
Un seul trèfle, et une seule abeille,
Et la rêverie.
La rêverie seule fera l’affaire
Si on manque d’abeilles.
Tombé si bas — dans mon Estime —
Que ça s’est brisé sur le Sol —
Et que j’ai entendu les morceaux —
Sur les Pierres, au fond de ma Tête —
Le Ciel est bas — les Nuages maigres.
Un Flocon de Neige en voyage
Se demande s’il doit traverser
La Grange ou l’Ornière —
Un Vent Étroit ne cesse de se plaindre
Qu’on lui a fait quelque chose
La Nature comme Nous est parfois saisie
Sans son diadème.
J’ai senti un Accroc dans mon Esprit —
Comme si mon Cerveau s’était déchiré —
J’ai tenté de faire — Reprise sur Reprise —
Mais les pièces ne s’ajustaient pas.
J’ai lutté pour enchaîner une pensée
À la pensée suivante —
Mais j’ai perdu le Fil qui s’est emmêlé
Comme des Pelotes — sur le Sol.
L’Amour — est antérieur à la Vie —
Postérieur — à la Mort —
Le Paraphe de la Création, et
L’Exposant de la Terre —
Voici ma lettre au Monde
Qui ne M’a jamais écrit —
Les simples Nouvelles que la Nature disait —
Avec une tendre Majesté
Son Message est confié
À des mains que je ne vois pas —
Pour l’amour d’Elle — Doux — compatriotes —
Jugez-Moi avec — tendresse
Elle nous a glissé des doigts comme un flocon emporté par le vent, et fait à présent partie de cette rafale appelée « l’infini ».
Nous ne savions pas que nous allions vivre —
Ni quand — nous allions mourir —
Notre ignorance — notre Cuirasse est —
Notre portons la Mortalité
Aussi légèrement qu’une Robe Choisie
Jusqu’à ce qu’on nous somme de l’ôter —
La vie est un sortilège si exquis que tout conspire à le briser.
Le printemps est une joie si belle, si unique, si inattendue, que je ne sais que faire de mon coeur. Je n’ose pas le prendre, je n’ose pas le laisser.