« Bonjour les Babélionautes ! Aujourd'hui, on va parler féminisme avec Libres ! Manifeste pour s'affranchir des diktats sexuels, signé par Ovidie et illustré par Diglee.
-Ovidie, l'héroïne de Ptiluc, le bédéaste qui dessine les rats ?
-Non, l'ancienne actrice porno et actuelle autrice de reportages et de textes féministes. Et j'aimerais maintenant m'adresser aux féministes de tout genre et de tout poil et aux camarades de lutte LGBT. Célébrons nos victoires !
Nous avons obtenu le droit de vote…
-Ouaaaaaaais !
-La pilule et des tas d'autres moyens de contraception !
-Ouaaaaaais !
-Nous pouvons travailler et ouvrir des comptes en banque sans avoir besoin de permission !
-Ouaaaaaais !
-La loi qui nous interdisait de porter le pantalon sans tenir de vélo ou les rênes d'un cheval est abrogée* !
-Ouaaaaaais !
-L'homosexualité n'est plus une maladie** !
-Ouaaaaaais !
-On peut facilement porter plainte pour viol, obtenir justice à la hauteur des faits et bénéficier du soutien de la part des institutions psycho-médicales et de ses proches aussi !
-Ouuuu… quoi ?
-Non, je déconne, ‘faut pas exagérer non plus.
Or donc, ce livre se constitue de chapitres illustrés, et chacun de ces chapitres explore un aspect de la vie des femmes encore soumis au contrôle d'un peu tout le monde, sauf de la principale concernée. Pratiques sexuelles, épilation, mode, pression de l'apparence, de la performance, du libertinage, mais pas trop sinon tu es une salope…
Bref, Ovidie liste les raisons pour lesquelles le comportement ou la biologie des femmes sont jugés tout en analysant lesdites raisons et en les démontant, sinon, nous ne lirions pas un texte féministe.
-Bon, elle exagère un peu, non ? Ca vaaaa, la situation n'est pas si grave, on n'est pas opprimées !
-Mh-mh. C'était quand, la dernière fois que tu es sortie court vêtue avec tes poils aux jambes ?
-Chais pas… treize ans, peut-être ? J'crois que c'est cette année-là que P'pa a fait des remarques…
-Prendrais-tu le risque aujourd'hui de le faire, quand tu vois à quel point des photos de femmes poilues déchaînent la haine sur les réseaux ? Tu t'épiles, soit, mais tu le fais par goût, par culture ou pour te protéger du regard d'autrui ? Parce que tu as commencé pour que ton père te fiche la paix, je te rappelle. Toi, tu t'en fichais bien… jusqu'à ce que tu apprennes le contraire.
-Mais attends, Déidamie, ton Ovidie là, elle est bien gentille, mais on va quand même pas cesser d'épiler nos jambes pour être de bonnes féministes !
-Non, certes pas, mais ce n'est pas son propos. En fait, elle questionne la pratique et encourage son lectorat à le faire. Evidemment que non, elle ne dira pas « arrête de t'épiler, sinon t'es pas libérée ». L'important pour elle, c'est d'avoir le choix, quel qu'il soit et de cesser de considérer son corps comme sale parce qu'il saigne une fois par mois ou parce qu'il fait pousser des poils.
Choisir pour soi, sans céder à une pression, sans haïr ni mépriser son corps, voilà ce que prône ce livre et ce que j'y ai apprécié.
-Ouais, mais bon… ça va être écrit dans un style revanchard et aigri, non ?
-Pas du tout. Point d'aigreur, de l'humour sarcastique et ironique, en revanche. La blague principale du premier chapitre m'a fait rire aux éclats ! Je regrette un peu que le reste des textes n'aille pas aussi loin dans l'humour. J'adore l'humour drôle, je suis convaincue qu'il représente une arme puissante pour faire réfléchir et j'ai trouvé dommage qu'il n'y en ait pas davantage.
-Le passage sur les règles, là, ça m'a énervée.
-Ah bon ? Je l'ai trouvé bien, moi…
-Non ! ‘Fin, si ! Oui, le tabou est absurde, tout ça, je suis d'accord. Oui, ça se passe sans désagréments majeurs pour beaucoup de gens. Mais lire « ce n'est pas une maladie » quand toi-même as fait l'expérience de douleurs qui durent des heures et des heures, voire des jours, quand la fièvre et des douleurs atroces te réveillent la nuit, bref, quand tu éprouves mille souffrances que tu prends soin de dissimuler pour ne pas entendre « t'as tes règles ou quoi ? », je trouve pas ça bien féministe. Et nous n'avons pas tous ni toutes la même facilité avec les protections intimes. Donc oui, le « ça va flinguer mes vacances » reste légitime si tu voulais te baigner pendant les congés, mais que tu ne maîtrises ni coupe menstruelle ni tampon pour des raisons personnelles.
Dans un monde idéal, les règles seraient vécues dans la sérénité et la tranquillité, sans drame ni contrariété, je suis d'accord. Hélas, nous ne vivons pas dans un monde idéal, et le cycle s'accompagne parfois de souffrances terribles qu'il faut écouter et soigner.
-Moui… je peux difficilement réfuter… Heureusement, ce n'est qu'un passage fort bref. Il reste un livre intéressant et encourageant les femmes à ne céder à aucune contrainte, à faire leurs propres choix, bref, à vivre comme elles l'entendent et non pour faire plaisir à autrui.
Je salue également le travail de Diglee, la dessinatrice. Elle a pris soin de représenter des morphologies différentes. La diversité des corps qu'elle dessine a quelque chose de réjouissant. Elle célèbre différentes formes de beauté et cela m'a réjouie de voir autre chose que les corps parfaits des affiches dans la rue ou du cinéma. »
*Authentique. Si, si. Je me suis d'ailleurs demandé s'il fallait un cheval au bout des rênes ou si les rênes suffisaient pour avoir le droit de porter un pantalon.
**Bon, il y a encore du boulot, hein… si on pouvait maintenant arrêter de taper les gays et les lesbiennes dans la rue, ce serait bien aussi.
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Une série de constats des plus navrants démontrant aux femmes combien elles sont soumises à la publicité, aux désirs des hommes, aux coutumes, vous trouvez ça libérateur? Pour moi c'est une couche d'humiliation en plus.
On leur impose un gros derrière musclé, un accoutrement accrocheur, une épilation intégrale, du botox à partir de quarante ans, on les force à pratiquer la bisexualité, le polyamour, la fellation, la sodomie (qui devrait être indolore si librement consentie!), on se moque gentiment de leurs fantasmes de mommy porn, et aucune suggestion, aucune piste pour faire changer les choses?
Alors qu'Ovid-e s'inspire de la mythologie pour illustrer son 'Art d'aimer', Ovid-ie s'inspire des publicités et des vidéos pornos inondant le net (domaine qu'elle connaît puisque pratiqué comme actrice et réalisatrice) En ressort une lecture fastidieuse et malsaine.
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Cet ouvrage possède une dimension pédagogique certaine qui en fait un essai graphique pertinent.
Lire la critique sur le site : BDGest
Manuel illustré d'éducation sexuelle plutôt destiné aux jeunes adultes, un ouvrage militant qui pourrait bien changer la donne dans les alcôves.
Lire la critique sur le site : ActuaBD
Bouffée d’oxygène, Libres ! permet de se donner de l’air pour parler mieux et davantage de sexe, dans le respect des genres et dans la compréhension et l’envie de l’autre, davantage que le fantasme exacerbé et les banalités proches du harcèlement.
Lire la critique sur le site : Bedeo
C'est évidemment caricatural au possible, mais on est bel et bien dans une revendication assez légitime, selon moi, donc pas besoin d'aller nuancer davantage, il faut simplement étayer les diverses démonstrations !
Lire la critique sur le site : Sceneario
J'éviterai égalent de commenter le twerk que je peinais à cerner jusqu'à ce qu'une de ses adeptes ne m'explique qu'il s'agissait à l'origine d'une danse abortive censée aider les femmes à décrocher les embryons non désirés. J'adore l'anecdote, mais je reste dubitative face à la mise en scène des nanas à quatre pattes twerkant dans des jacuzzis à côté de mâles très fiers d'étaler leur pognon de parvenus et boire du champagne en prenant des poses prétendues viriles. Je doute que les rappeurs y fassent l'apologie de l'avortement.
Même encore aujourd'hui, devenue adulte, je me sens obligée dans un réflexe pavlovien d'adapter ma tenue en fonction des dangers potentiels : je ne prends le métro qu'en chaussures plates ( pour pouvoir courir en cas de besoin), je tire sur ma jupe lorsque j'aperçois des groupes d'hommes dans la rue, si je sors le soir je prévois une tenue adaptée en cas de retour seule, je m'habille de manière asexuée (pantalon-chemise) dès que j'ai un rendez-vous officiel de manière à ne pas être perçue uniquement à travers le prisme de mon corps... Bref, comme beaucoup de femmes, je me camoufle pour avoir la paix.
La liberté sexuelle, c'est la liberté de disposer de son corps. C'est effectivement la liberté d'avoir un rapport avec une personne du même genre sans subir d'homophobie ni de biphobie. Mais c'est aussi la liberté de ne pas en avoir envie, sans passer pour une ringarde. Rien n'a à être « tendance » en matière de sexualité. Le sujet est trop intime pour se laisser envahir par les diktats des magazines féminins.
La chatte est avant tout un lieu de paix, de recueillement, de plaisir et pourquoi pas une source de vie. Et si on commençait par transmettre cette vision positive, peut-être qu'on parviendrait à développer des rapports plus apaisés avec notre corps.
La liberté sexuelle, c'est la liberté de disposer de son corps. (...) Mais c'est aussi la liberté de ne pas en avoir envie, sans passer pour une ringarde.
13 juin 2022
« C’est une sorte de dystopie ou les rapports de genre sont inversés, dans un monde dirigé par des femmes et où les hommes font office de chair fraiche. »
On a adoré écouter Ovidie nous parler de sa série, Des Gens Bien Ordinaires, disponible sur CANAL+