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Citations sur Maudit manège (17)

J'ai allumé la télé pour continuer à me nettoyer le cerveau et par miracle, on est tombé sur une séquence de pub, c'était pratiquement le bonheur total, toute la connerie humaine rassemblée dans un dé à coudre, il y avait rien de plus reposant, rien de plus rassurant que de pouvoir vérifier qu'il y a toujours plus con que soi. Je les haïssais cordialement tous ces gars là et je n'avais pas envie d'y réfléchir, c'était physique, ces choses là ne se discutaient pas. Je les haïssais mais j'étais bien content qu'ils soient là, ils donnaient une bonne idée du monde dans lequel on vivait. S'envoyer une page de pub, c'était perdre tout espoir et s'enfoncer dans la contemplation du vide. Il nous faut bien ça de temps en temps.
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Il me semblait que j'allais traîner cette malédiction toute ma vie. Le monde était infiniment cruel avec moi et les malheureux dans mon genre. Le société ne vous jugeait qu'en fonction de votre capacité à décrocher un boulot et à vous y accrocher comme un chien enragé. Faute de quoi vous n'étiez qu'un pâle crétin, un pauvre dégénéré, une sorte de fou. Mais quelle plus grande folie pouvait-on imaginer que de passer sa vie derrière un bureau? Quel plus grand mensonge pouvait-on se faire à soi même que de bâtir son existence sur du vide, uniquement parce qu'une majorité de connards vous y contraignait. Alors quelle la seule chose vers laquelle doit tendre un individu normal, c'est la liberté, pas la prison à vie, et les neuf dixièmes des boulots aujourd'hui sont pires que des cachots humides, puant la pisse et la désolation. La vie n'était pas si effrayante que ça pour qu'on veuille s'enfermer à double tour. [...] Assurément, le pauvre malheureux ne connaissait pas toute la richesse de ma vie, pas plus que l'incroyable difficulté qu'il y a justement à NE RIEN FAIRE, ce qui est évidemment une attitude qui engage et investit l'individu tout entier. [...] Enfin quoiqu'il en soit, je n'avais jamais envisagé pouvoir consacrer trente ou quarante ans de ma vie à un boulot sans âme, sans intérêt, pour ne pas dire mortellement chiant, uniquement pour avoir le droit de prétendre je suis ceci ou je suis cela, voici la maison que j'habite, voici ma voiture, voici l'adresse de ma banque, voilà ma femme, voilà mon patron, voila la place que j'occupe dans cette vie. J'aimerais ajouter voici mon revolver.
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Si Betty avait été un torrent de montagne, Marlène était une rivière coulant dans les sous bois. Éclairs rugissants d'un côté, miroitements silencieux de l'autre.
Quand j'aurai soixante ans, il me faudra un fleuve majestueux, une fille de trois kilomètres de large roulant tranquillement des flots mordorés.Je suis un type qui descend le long d'une berge, à ce qu'on dirait.
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[ Incipit ]

Un soir, environ cinq ans après la mort de Betty, j'ai bien cru que ma dernière heure venait d'arriver. Et Dieu sait que je m'attendais pas du tout à ça.

Je me trouvais dans la cuisine avec Henri et j'épluchais tranquillement quelques trucs en lui prêtant une oreille distraite. La supériorité de la poésie sur le reste, ça faisait deux cents fois qu'il me la démontrait. Le plus terrible, c'est qu'il avait raison, mais j'avais toujours refusé de l'admettre. Je pouvais écrire des romans et des paquets de nouvelles, mais j'étais incapable d'aligner un seul poème valable, c'était un terrain que je sentais pas très bien. J'éprouvais une admiration sans bornes pour ces types qui trouvaient le moyen de vous descendre en quelques phrases, qui vous coupaient la respiration, l'ennui c'est qu'ils étaient tous à moitié cinglés. Une des questions que je me posais était de savoir si la poésie rendait fou ou si c'était l'inverse qui se produisait.
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-Oh, merci mille fois, jeune homme, a-t-elle gazouillé.
Bien évidemment tout était relatif. J'avais toutes mes dents et je portais un Lewis, mais le poids du temps m'était tout de même tombé dessus. Je commençais à perdre mon souffle, je pouvais annoncer la pluie grâce à un rhumatisme dans le genou, mes yeux se fatiguaient plus vite en lisant, deux taches de rousseur étaient apparues sur mes mains. Je récupérais plus lentement, je voulais qu'on me foute la paix, je traversais plus souvent dans les clous, certains matins j'avais les yeux pochés, je ne me levais pas d'un bond, je pensais à ma vie, on entendait un craquement dans mon épaule quand je faisais un moulinet avec mon bras, je supportais de plus en plus mal le bruit. J'avais pratiquement perdu tout espoir, mon dégoût du monde l'emportait sur mon amour du monde, parfois je restais la journée entière sans prononcer un seul mot, ma mémoire ne remontait plus très loin dans mon enfance, et je m'amusais d'un rien, j'avais déjà jeté un oeil sur la profonde, la délirante, l'effroyable solitude qui vous étreignait lorsque vous alliez au fond des choses, les types qui parlaient trop me faisaient chier. Ca n'avait l'air de rien, mais c'était ce genre de détails qui vous mettaient dans la peau d'un type de quarante ans [...]
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J'ai un penchant nettement marqué pour les tenues débraillées car il me semble qu'on doit toujours être prêt à grimper à un arbre ou à se rouler par terre.
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Un mauvais livre, c'est encore plus pénible qu'un lendemain de cuite.
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Ce n'était pas le moindre paradoxe de ce monde dégoûtant que de pouvoir s'illuminer par moments et c'est fait pour ça un écrivain, c'est fait pour ramasser tout ce qui brille.
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Le soleil vous frappait déjà en pleine figure un jeune soleil nerveux et encore maladroit qui vous brûlait tout de suite une espèce de chien fou étranglé par sa laisse dans le genre printemps hystérique.
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Ils ont de la chance, ceux qui se consument de l'intérieur, ils brillent d'une belle lumière, on les reconnaît plus facilement.
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