Au pas lent des caravanes

Bon, c'est comme ça, je ne suis pas sur babelio pour critiquer les bourdes de notre président...Alors, j'ai choisi un vieux bouquin dont à priori je suis le 1er lecteur et franchement, je ne le regrette pas malgré ses pages jaunies car j'ai beaucoup appris sur les nomades du sud saharien.
L'auteur était magistrat , très proche des "indigènes" en 1921 ,défenseur au besoin de leurs intérêts Il y avait alors en Algérie cohabitation de deux types de populations qui s'ignoraient, alors que les hostilités viendront plus tard. Ferdinand Duchêne parlait couramment l'arabe et le berbère, et avait une bonne connaissance du coran.
Le livre raconte la lente remontée d'une tribu nomade du Sud vers Bône "la coquette" en bord de mer , l'objet de la caravane étant le commerce et le troc avec les colons du nord algérien .
La belle Meriem , 17 ans a été mariée à un vieux chef Sidi Ali qu'elle n'a pas choisi bien sûr et dont elle est la deuxième épouse, obligée de le satisfaire une nuit sur deux . Au sein de la caravane, le jour elle vit dans un bassour , sorte de litière fermée posée sur le dos d'un chameau qu'elle partage avec un lévrier sournois agressif , tueur d'antilopes.
Malgré son isolement et le voile qu'elle ne peut quitter , Meriem tombe amoureuse d'un fauconnier, Kaddour qui s'était approché du bassour et qu'elle admire par une fente de la toile "au pas lent de la caravane" . Cette histoire d'amour d'abord simple devient complexe par la traîtrise de la co-épouse, amoureuse elle aussi de Kaddour malgré la protection indéflectible du serviteur noir de Meriem, qui aide sa maîtresse à retrouver son amant.
On balance au rythme lent de la caravane dont l'ambiance est parfaitement décrite, on perçoit les odeurs, on entend les cris des bêtes moutons et chameaux, ,on voit les étoiles quand la dernière prière est dite.
Arrivés au bout de leur parcours les nomades du Sud rencontreront avec étonnement les colons , assistant même à une représentation de Phèdre
dans un théâtre antique.
Mais cette histoire finira de façon tragique au sein de la tribu en quelques pages de véritable cauchemar.
On sent le respect de l'auteur pour les peuplades du sud algérien,et en particulier pour les femmes réduites à vivre dans la "gynécée",à assurer la descendance et pourtant cherchant l'amour véritable par divers intermédiaires et des messagers.
On perçoit également la parfaite connaissance de l'islam et des coutumes ancestrales de l'auteur.
Roman agréable à lire, d'intérêt documentaire,qui a valu à son auteur en 1921 le premier grand prix littéraire de l'Algérie, deux autres romans faisant partie de son cycle des "barbaresques" ayant également été honorés .
Curieusement ce vieux bouquin m'a apporté quelques éclairages sur notre actualité nationale bien qu'il ne soit pas un livre des plus populaires de la semaine....