Le roi disait que j'étais diable

Avis mitigé sur ce roman. L'écriture est agréable, précise, ciselée bien qu'un peu redondante. Mais je n'ai pas été emporté par les personnages. Les caractères m'ont semblé trop tranchés, sans nuances. J'ai regretté aussi un début de récit qui attaque directement sur le mariage d'Aliénor sans mise en place du contexte historique.

Je ne vous raconte plus l'histoire très connue d'Aliénor D'Aquitaine et de Louis VII dont le mariage arrangé a fait d'eux un couple princier mené par la frustration et la colère. le roman est structuré essentiellement sur leurs monologues intérieurs qui font une drôle de balançoire jamais en équilibre, un coup en haut un coup en bas, comme Aliénor et Louis, jamais ensemble, jamais complices, jamais aimants.
Quand la colère, celle d'Aliénor et celle, étouffée, de Louis, devient fil rouge conducteur, personnage principal, elle mène le jeu et les héros.
Je trouve très intéressant le choix du monologue intérieur pour refléter, à mon sens, le vide entre Aliénor et Louis, l'impossible communication entre eux, l'impossible amour.
La scène historique, canevas sur lequel les personnages vivent seuls, fait défiler en éclair les événements, les sentiments, les idées, les faits de guerre, rapidement croqués, martelés à vitesse grand V.
Le rythme rapide, sec, quasi obsessionnel, les phrases courtes enchaînées dans un pavé avec peu de retours à la ligne, donnent peu de respiration et beaucoup de halètement, la chasse à courre est ouverte et le marteau piqueur fait un peu mal, on s'en lasse presque.
Par probité intellectuelle, Clara Dupont-Monod laisse aux historiens la vérité sur les personnages et les événements, elle crée et comble les blancs de l'histoire, comme elle le dit elle-même. Ses dentelles passionnées, trépidantes me font sentir la journaliste dont le challenge est le nombre d'événements par unité de temps. Clara Dupont-Monod maîtrise tout ce qu'elle s'engage à réaliser.

Moi qui pourtant suis une fan inconditionnelle du Moyen Âge, et donc, par extension, de tout livre qui s'y rapporte, je n'ai pas été vraiment conquise par cette Aliénor là. L'auteur lui prête, bien souvent, des pensées d'une femme du XXIe siècle et bien peu du XIIe siècle... Aliénor n'était peut être pas aussi pieuse que son époux, mais la médiéviste qui est en moi ne peut que tiquer face aux réflexions prêtées à la belle reine...
J'ai été plus touchée, au final, par son époux le roi Louis VII, que par Aliénor qui m'agaçait au plus haut point.
Quelques instants de grâce, néanmoins, dans ce roman, malheureusement gâchés par une vision bien peu médiévale des choses...

J'ai tourné longtemps autour de ce livre. J'avais un peu de mal avec le titre, qui montrait déjà une modalisation et un implicite, Aliénor prenant la parole et rapportant des paroles attribués au roi, c'est à dire à Louis VII (cela aurait pu être Henri II, après tout). Puis, ce titre mettait déjà l'accent sur toute la légende noire d'Aliénor, forcément réductrice. Il a fallu que le livre soit présenté en ebook par le réseau de bibliothèque de Rouen pour que je l'emprunte et le lise.
La lecture en e-book influence-t-elle le jugement sur un livre ? En version papier, ce livre mesure 240 pages, en version numérique, 103 ! le livre « papier » serait-il écrit très gros ? Si vous comptez de plus que les chapitres ne sont pas très nombreux (quatre, de mémoire) et que je tenais à les terminer à chaque session de lecture, vous vous rendez bien compte que cette lecture fut un peu lourde.
Je retiens tout de même un point positif : le style est agréable à lire, très contemporain, tout en restituant « la vie quotidienne au moyen-âge », le contraste entre Paris, et l'Aquitaine, ses parfums, ses puanteurs, ses guerres incessantes. Trois voix s'élèvent dans ce roman, Aliénor et Louis en alternance, puis Raymond d'Antioche, oncle d'Aliénor, pour conclure le roman. Je ne crois pas être la seule lectrice à préférer Louis à Aliénor, Louis le sage, le pieu, qui sera poussé à toutes les extrémités, toutes les violences pour plaire à sa reine, lui qui était destiné à entrer dans les ordres. Aliénor n'est qu'orgueil, violence, colère, mépris aussi pour cet homme, pour cette cour, pour tous ceux qui l'entourent. Elle paraît, de plus, maîtresse de son corps, elle qui choisit quand elle donnera un enfant au roi – elle avait quinze ans à son mariage, dix-huit à la naissance de Marie, sa fille aînée, future protectrice de Chrétien de Troyes et de Gace Brûlé.
Ce qui m'a dérangé est cette volonté de faire de Louis et d'Aliénor un couple moderne, avec des sentiments, des émotions, une psychologie en bref, qui font d'eux nos quasi-contemporains. Bien sûr, c'est une volonté de l'auteur d'avoir écrit son roman en se basant sur les faits historiques et en romançant tout ce que l'on ne savait pas. C'est aussi une volonté de se cantonner aux années pendant lesquelles Aliénor était reine de France – elle n'est pas encore la maman de Richard Coeur de Lion (clin d'oeil personnel). Bien sûr, on ne sait pas exactement ce que pouvaient éprouver roi et reine de France en ces années-là – mais je ne suis pas certaine qu'il fut question de tels tourments amoureux.
Une lecture que je suis heureuse d'avoir terminé, tout comme je suis heureuse d'avoir fini d'écrire cet avis.
Lien : https://deslivresetsharon.wo..

Une belle découverte!
Roman retraçant une partie de l'histoire d'Aliénor D'Aquitaine qui intrigue beaucoup par son côté autoritaire, femme qui en veut, qui détourne les règles...
Un roman fictif où il y a deux voix, celle d'Aliénor et celle de son mari, Louis.

Un roman où l'on apprend pas mal de choses!
Bon moment de lecture!

J'ai beaucoup apprécié retrouver la plume de Clara Dupont-Monod mais l'histoire m'a moins plu que La révolte.
Cela tient je pense aux traits assez tranchés des personnages, Aliénor semble froide et insensible tandis que Louis parait fragile et incertain (ce qu'il était peut-être vu qu'il se destinait à être moine, pas roi). C'est cet antagonisme tout au long du livre qui m'a gênée, accentué par le fait qu'Aliénor et Louis sont tous les 2 narrateurs dans ce roman, ils confrontent en permanence leur point de vue.

Très bavard comme ouvrage une sorte de flux RSS!
Aliénor et Louis le énième (VII en fait) un couple qui se pense beaucoup et qui ne s'apprécie guère.
Pour la forme, récit historique mais assez romancé qui mêle le récit proprement dit pour nous plonger dans le royaume de France du XII siècle et les soliloques des deux époux. Ceux-ci ayant pour but de relater et commenter les sentiments contradictoires des deux intéressés et leurs interprétations toutes aussi divergentes des évènements survenus. Une façon subtile de "s'auto-historiographer"
Très utiles ces apartés car le moins qu'on puisse dire c'est que ces deux époux ne sont pas deux tourtereaux tendrement énamourés.
Lui, Louis VII le jeune, né de Louis le gros est dit Louis le pieux (le croyant, pas le lit car du fait de son éducation il n'était pas porté sur la chose) est veule, mou, amateur de discutailleries et incapable de décider. Elle, son épouse Aliénor est une femme de caractère, amazone, guerrière, amoureuse des arts paillards(?) et de la « vraie vie » (A. Dieudonné nous poursuit)
Le cérébral en bondieuserie improductif et amoureux et la sensuelle vigoureuse et méprisante : la glace ordonnée et le feu pétillant.
Ils correspondent à deux mondes différents. L'un au nord policé, ordonné, servile et soumis à la religion, engoncé dans le froid, médiocre et terne jusque dans l'habillement et l'autre au sud chaotique, chaud, coloré et vif ,bouillonnant d'une vie qui ne demande qu'à s'exprimer dans l'action et donc la violence.
Deux visions humaines : l'une comptable civilisée en matière de territoires acquis par alliance c'est à dire par négociation et diplomatie avec en fond la bénédiction papale l'autre qui repose sur la force brute, hérétique par nature qui rejette le dogme religieux admis et sa sujétion, la conquête impitoyable par le fer.
Un livre dont l' objet est de montrer une inversion des rôles Un homme faible et une femme forte. Ce patriarcat est dominé par une femme parce que le roi est un homme amoureux, animé par l'amour il cède sur tout. La reine domine et gouverne sans même passer par l'alcôve. On ose à peine imaginer ce qu'aurait été le monde s'il avait été composé de royaumes matriarches gouverné par des "aliénors" guerrières confrontées à des vassales matriarches toutes aussi intrépides qu'elles.
Pourtant même si la violence guerrière injustifiée, toujours condamnable, est du coté d'Aliénor il est vraiment difficile de lui lancer la pierre tant ce monarque est petit, insignifiant, émasculé par ses sentiments amoureux. On n'a d'yeux que pour elle : elle en impose

Cependant lorsqu'on y regarde de plus près, le personnage de femme libre et insoumise d'Aliénor paraît être non pas glorieux et magnifique mais tyrannique et sans pitié Sa puissance politique, reine d'aquitaine et d'un territoire immense en comparaison de celui du roi, lui permet bien des privautés : goûts pour le luxe et la fête et caprices revendicatifs lourds de conséquences dont elle use et abuse. Bien que jeune elle est déjà une grande dame.
Le personnage d'homme pieux lui, paraît plus humain par ses interrogations et ses indulgences et modérations mais il est si faible qu'il commet des violences malgré lui en dépit du bon sens, de ses voeux pieux et de ses sentiments humanistes. Animé toutefois par une violence puérile gratuite et inconsistant il perd de tous les cotés. Lui aussi est jeune mais sa maturité est bien lointaine.

Un roman poétique et métaphorique... Une belle plume que cette Clara Dupont-Monod, que je recouvre avec cette oeuvre. Ce livre retrace les années de mariage d'Aliénor et Louis VII, roi de France. On se place tantôt de son point de vue à elle, tantôt du sien à lui. Les positions sont peut-être poussées à l'extrême mais quelles discordances de points de vue, cela n'aurait pas pu fonctionner...

Cette fresque du Moyen-Age est avant tout un roman qui nous permet de comprendre les relations d'un couple royal que tout sépare : éducation-foi-caractère. L'indomptable Aliénor d'Aquitaine, fille du sud, vivante, fière, et Louis VII, roi malgré lui qui aurait préféré rester dans une abbaye, calme et réfléchi. Pour son malheur il va aimer sa femme qui le trouve faible et ennuyeux. Incompréhension totale entre les deux.
Une belle construction narrative à deux voix. Chacun exprimant ses sentiments tour à tour. L'Histoire n'est pas en reste : religion, troubadours, croisades. Passionnant.

C'est joliment écrit, vague et vaporeux. Cela rappelle un peu le style de Carole Martinez teinté de Christian Bobin ( la lumière, l'or, le sang, la poussière, la colère...).