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David El Kenz (Directeur de publication)
EAN : 9782070306626
560 pages
Gallimard (21/04/2005)
3.62/5   4 notes
Résumé :

Le massacre est une pratique humaine des plus anciennes et des plus récurrentes. En cela, elle constitue un défi pour l'historien : soit l'étudier comme un événement à chaque fois singulier et s'interdire alors de le constituer en un objet d'histoire en soi, ou bien vouloir en cerner la nature commune, au risque alors d'une approche transhistorique qui s'échine à trouver une structure là où il n'y aurait q... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Il n'y a pas très longtemps, à Nice, "un camion fou" faisait des dizaines de morts. Un camion, vraiment ? Ou bien l'homme qui le conduisait ? Ce fait de langue journalistique montre bien combien il est difficile de parler honnêtement du massacre, quand on excuse le tueur et que l'on méprise les victimes. On ne compte plus aujourd'hui ceux qui distinguent, parmi les morts, les bonnes victimes des mauvaises, et qui, dans le même temps, sacralisent la Victime en soi. Ainsi l'ouvrage collectif "Le massacre, objet d'histoire", aborde moins les meurtres de masse eux-mêmes dans l'histoire humaine, que la manière dont le discours historique les représente. La mort de masse est un fait, par nature plus ou moins connaissable par les historiens, mais les difficultés se multiplient s'il faut bâtir un discours cohérent. La première, à laquelle les auteurs se heurtent aussi, est l'esprit partisan : par le passé, c'était toujours l'ennemi qui massacrait, alors que notre camp, qui est le bon, ne faisait rien de tel. Les auteurs, universitaires français inévitablement progressistes, ont changé cela et "pointent", comme ils disent, les "bons" massacres, ceux qu'il est permis d'évoquer, perpétrés par des Européens de préférence, mais ce parti pris ne les empêche pas de produire des textes intéressants et variés, par exemple sur les Amérindiens (c'est curieusement le nom des seuls Indiens des USA dans le chapitre qui leur est consacré) ou les Coréens (après le tremblement de terre de Tokyo en 1923). Quand la pression de la propagande se relâche, dans le cadre de l'histoire antique ou arménienne, on a des chapitres intéressants sur la Mésopotamie, la Grèce classique et Alexandrie sous l'empereur Caracalla. Le livre n'est donc pas idéologiquement monochrome, mais échoue à montrer la voie qui sortirait de l'idéologie.

Alors, comment résumer cet ouvrage inégal et rédigé dans le patois de l'EHESS ? On voit que le massacre, finalement, est une affaire de propagande, d'idéologie et de discussions juridiques (pour ceux qui en réchappent). Significativement, ce champ historique, de l'aveu même des auteurs, est investi par les activistes et les groupes de pression, dont la probité scientifique et la culture intellectuelle laissent à désirer : féministes, décoloniaux, antiracistes, islamistes, tous "Victimes". Le massacre est bien moins un objet d'histoire qu'un enjoliveur de mémoire, et un prétexte à stratégies victimaires variées, qui font bon ménage des faits. La France n'est-elle pas, depuis peu, rendue coupable d'un "génocide des Algériens" ?
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Chapitre II : les massacres en Grèce antique, une typologie (Bernard Eck).
Considérons à présent quelques enseignements qu'on peut tirer de cette étude pour la compréhension de l'histoire grecque. Les massacres ne revêtent jamais un caractère racial et ne signifient pas la supériorité d'un groupe ethnique sur un autre. De même, les motivations d'ordre religieux ou, a fortiori, le fanatisme n'entrent en ligne de compte pour aucun massacre... Quant à savoir s'il existe, du V° au IV°s, une évolution, nécessairement négative, il faut certainement réviser l'idée, assez répandue, selon laquelle la guerre serait plus impitoyable au IV°s et tendrait à la destruction de l'adversaire, la guerre du Péloponnèse formant un tournant décisif. L'examen des massacres infirme plutôt ce genre de conclusion, pour trois raisons majeures. D'abord, au IV°s, les rapports entre Grecs et Perses - la situation diffère en Occident [entre Grecs et Carthaginois] - sont devenus plus pacifiques ; les Perses s'allient parfois aux Grecs et vont même jusqu'à arbitrer diplomatiquement leurs conflits, ce qui est impensable au V°s. Ensuite, la volonté de massacrer se manifeste moins de la part des pouvoirs politiques, comme l'illustre bien le comportement du roi de Macédoine Philippe II, qui devient peu à peu maître de la Grèce entre 360 et 336 : Philippe est dur avec ses ennemis mais ne les massacre pas, parce que, étant un homme /pragmatikos/, il sait que son intérêt n'est pas là. Enfin, d'un point de vue économique, le massacre est absurde : or, au IV°s, toutes les armées sont composées, en partie ou en totalité, de mercenaires que les cités paient très difficilement et il est évident que l'ennemi fait prisonnier est plutôt vendu que tué ; le mercenaire, phénomène endémique au IV°s, a contribué paradoxalement à humaniser la guerre. Et en ce qui concerne l'évolution, réelle, des armes ou des techniques de combat au IV°s, elle ne semble pas avoir une incidence sur les massacres.

pp. 118-119
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