AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,5

sur 12 notes
5
1 avis
4
3 avis
3
2 avis
2
0 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Cette pièce m'a énervé ; pas son traitement qui est plutôt très bon, mais le mythe à la base.

Une pièce sur Hélène. Je m'attendais à voir le personnage crier son dépit sur les remparts de Troie, ou son enlèvement par Pâris. Que nenni !
Euripide exploite ici une version du mythe déjà mentionné par Hérodote et que j'avais complètement oublié (en même temps il y a tellement de choses dans Hérodote qu'on peut estimer avoir une excellente mémoire si l'on se souvient du dixième de l'Enquête).
Imaginez-vous que Hélène n'a pas été enlevée par Pâris. Non. La facétieuse Héra a substitué à la vraie fille de Tyndare une illusion de fumée faite chair. C'est ce truc qui arrive à Troie, qui provoque la guerre de dix ans, les morts innombrables, la chute des héros, les sacrifices de filles, la chute de la ville, l'esclavage de tous ses habitants, le retour des héros Grecs qui prend des années (Ulysse) ou finit en assassinat (Agamemnon).
La vraie Hélène a été transportée à l'abri en Égypte par Hermès. Elle n'a rien fait de « mal », pas d'adultère. Elle est restée fidèle à Ménélas tout ce temps. Sa réputation est devenue immonde auprès des Grecs… pour un pur fake news.

Non mais vous imaginez ces dieux, confortablement installés sur leur Olympe, en train de se plier de rire devant le drame insensé qu'ils ont provoqué chez les hommes par une simple duperie ? Ça ne vous donne pas envie de raser leurs temples à tous ces salopards ? Ils peuvent punir les hommes dans ce cas ? Franchement qu'est-ce qu'ils peuvent faire de pire que ÇA alors qu'ils sont adorés ! Je savais les dieux Grecs exigeants, mais là ils se foutent du monde ! Je comprends que cette version soit minoritaire.

Pour revenir à la pièce, l'action a lieu en Égypte sept ans après la chute de Troie, alors que le navire de Ménélas – qui erre à la recherche vaine d'un retour à Sparte (sept ans, encore un coup sympa d'un dieu) – y fait naufrage. Ménélas, déguisé en mendiant, y découvre une femme qui ressemble trait pour trait à son Hélène qu'il a ramené de Troie dans son navire. Hélène voit arriver avec surprise cet homme qui ressemble à son mari qu'on lui a dit être mort. Peu après, Ménélas apprend par un de ses soldats que « son » Hélène vient de s'évaporer en fumée dans les airs ! Pouf ! du coup il comprend que tout le monde, Grecs et Troyens, a été dupé et que sa femme lui est resté fidèle. Joie ! (mais la duperie des dieux ne l'énerve pas du tout, moi j'aurais eu envie de tout cramer). Ils décident de retourner à Sparte, mais ce n'est pas simple à faire car le nouveau roi d'Égypte, Théoclymène, est tombé fou amoureux de la belle et tue tout Grec qui s'approche, au cas où ce serait Ménélas.
Hélène va donc concevoir un plan – subtilement pour faire croire à Ménélas que c'est lui qui a eu l'essentiel de l'idée – pour leurrer Théoclymène. Elle lui monte un bateau incroyable, l'allume, le fait tourner autour de son petit doigt et parvient à se sauver avec Ménélas de la plus belle manière. Si on a droit à des tirades tragiques du genre « que mon sort est ignoble », certaines scènes sont proches du vaudeville et ont dû surprendre le public.

La pièce est donc enlevée et agréable à lire. Mais cette version du mythe est insupportable. Des dieux comme ça, je vous les laisse.
Commenter  J’apprécie          4411
Tout étonne dans cette tragédie baroque d'Euripide. D'abord, il prend appui sur une version audacieuse du mythe troyen qui dit que Pâris n'a emporté qu'un fantôme d'Hélène, la véritable épouse de Ménélas étant transportée par Hermès sur les bords du Nil, auprès du sage roi Protée. Ce drame est aussi loin des canons tragiques. Il n'y a pas vraiment de conflit puisque le couple Hélène-Ménélas est amoureusement uni, le seul danger venant du successeur de Protée, Théoclymène, qui veut se marier avec Hélène. Mais il est tellement crédule et insignifiant que se sortir de ses griffes relève plus du jeu que du sacrifice. Il y a d'ailleurs de beaux passages savoureux où Hélène brille par sa ruse et son ironie, faisant la part belle aux femmes, sages, raisonnables et intelligentes, face à des hommes rustres et patauds.
Commenter  J’apprécie          62
On vous a toujours menti : Pâris n'a jamais enlevé Hélène de Sparte à Ménélas pour l'emmener comme compagne à Troie, déclenchant ainsi une des plus tragiques guerres que jamais légende ait rapportée. En réalité, Héra, furieuse de la réussite du stratagème d'Aphrodite et s'improvisant donneuse de leçons (elle avait essayé elle-même de corrompre Pâris...), enleva la vraie Hélène et la "déposa" en Égypte, au royaume du roi Protée. C'est une sorte d'ombre, de fantôme, de simulacre que Pâris emmena et pour laquelle l'armée grecque tout entière partit au combat, et, pour beaucoup, à la mort. Or Protée meurt, laissant son royaume à son fils Théoclymène, bien moins bienfaisant, puisqu'on comprend qu'il presse Hélène de l'épouser d'une manière si peu digne d'un hôte et d'un gentleman (j'adore employer des mots en parfait anachronisme, passez-moi ce petit plaisir), que celle-ci a élu domicile sur le tombeau de Protée, ce qui la préserve et de l'outrage, et du mariage. Là, elle se lamente de la perte de sa bonne réputation, du fait d'être un objet de malédiction de la part de tous les Grecs.

Or Ménélas arrive en Égypte. Les deux époux se retrouvent face à face et, détrompé, Ménélas ravi d'apprendre que ce n'est pas une femme souillée d'adultère qu'il récupère, mais la même, aussi amoureuse et fidèle qu'autrefois, va imaginer un stratagème pour l'emmener vers leur foyer à Sparte, finir leur vie ensemble...

Voilà encore une tragédie d'Euripide avec laquelle j'ai rendez-vous depuis bien longtemps, mais dont j'ignorais l'argument. Euripide ne manque, dans aucune pièce liée à la guerre de Troie, de maudire Hélène. La voilà curieusement épargnée, mais accablée, en même temps : qui voudra jamais croire à la pureté d'Hélène, qu'une histoire si rocambolesque atteste ? N'est-ce pas une façon de d'ironiser sur la seule excuse pour se réjouir du rabibochage de ce couple royal, à savoir si Hélène n'avait rien à se reprocher ? Nos sensibilités modernes pourront trouver très politiquement incorrecte cette façon de jeter l'opprobre sur cette femme, qui, dans un cas et dans d'autres pièces ou épopées, s'est fait enlever contre son gré par Pâris, et dans cette pièce en particulier, risque viol et mariage par Théoclymène qui ne l'intéresse pas ; la femme violentée est toujours peu ou prou soupçonnée d'être consentante. Une remarque de Ménélas lui ferait mériter ce qu'il craint : "La contrainte est pour toi un prétexte [pour céder]!"

Pour haut que ces considérations anachroniques et vaudevillesques, la thèse que les hommes se battent pour des simulacres, des chimères, et, des yeux de la postérité, sont morts pour des fantômes, est défendue sous la forme d'une très belle allégorie.

J'ai beaucoup aimé dans cette pièce le dialogue amoureux entre le mari et la femme, notamment lors du troisième stasimon.
Lien : http://aufildesimages.canalb..
Commenter  J’apprécie          20


Lecteurs (43) Voir plus



Quiz Voir plus

Titres d'oeuvres célèbres à compléter

Ce conte philosophique de Voltaire, paru à Genève en 1759, s'intitule : "Candide ou --------"

L'Ardeur
L'Optimisme

10 questions
1297 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature française , roman , culture générale , théâtre , littérature , livresCréer un quiz sur ce livre

{* *}