🍁Chronique🍁
« Ils marchèrent jusqu'aux ténèbres. »
Et si je vous proposais un marché? Un
super marché? Si en lisant ce livre, vous n'avez pas compris le choix de Pedro et Marques, je mange de la soupe jusqu'à la fin de ma vie…
Être riche, super-riche, en deux temps trois mouvements, avouez que c'est tentant, mais vous est-ce que vous y seriez allé dans ce plan douteux? Comment est-ce qu'on se choisit, une vie de bandit? C'est tout l'enjeu subversif et drôle de ce livre: faire entendre que cette voie est (parfois) préférable à, l'autre…Ça m'est apparu d'une limpidité presque évidente, même si elle est répréhensible, dangereuse, « semée d'emmerdes »…
Jusqu'à maintenant, ce choix m'était incompréhensible, intangible, complètement inenvisageable…Il ne l'est guère plus, aujourd'hui, mais avec cette aventure dans les rayons de ce supermarché, j'ai compris. J'ai compris que c'est un faux-choix pour combattre la misère. Un choix terrible pour contrer la malchance, la survie, la souffrance, l'indifférence…J'ai compris que ce n'est pas un choix réfléchi, mais une erreur consciente statistiquement fatale…
Sous couvert de philosophie revisitée de mecs trop paumés pour comprendre que l'herbe n'est pas plus vert(ueus)e qu'un caillou ou de la poudre, ailleurs ou au coin de la rue, ils se lancent tous les deux, dans un trafic qui parait fructueux…Ils palpent de près, la drogue, la violence, la délinquance, l'argent sale. Ils sont juste à la frontière de la ligne jaune, mais…Pas du bon côté…Et voilà, comme ils se retrouvent à errer dans ce supermarché avec leurs valeurs bafouées, leurs petits soucis techniques et leurs grandes ambitions de voyous misérables…
« Il n'y a aucun chant d'oiseau ni autre chose qui soit capable de mettre de la magie dans la précarité totale. »
Derrière l'humour et l'aventure trépidante de ces deux jeunes « entrepreneurs » de la weed, le constat social et politique, est extrêmement triste. La pénibilité de leurs existences est un crève-coeur, à lire. Ces familles, coincées dans les favelas de Porto Alegre, n'ont que peu de perspectives d'avenir, d'ascension ou de choix dignes. Ils vivent dans un environnement étouffant, violent, parfois toxique, parce que les chances de sortir de la Précarité, la grande la vraie, sont quasi inexistantes. Alors certes, ces deux-là mènent, pour un temps, la vie de « riches », mais la morale les rattrape bien vite, tout autant que les malfrats qui les surveillent…Et même en se servant allègrement des aliments à disposition, ça ne suffit pas à faire une bonne soupe…Alors de là, à la manger…
« C'est le moment de commencer à courir après la vie meilleure qui me fait tellement envie. »
J'ai beaucoup aimé l'humour et l'intelligence de ce jeune auteur,
José Falero, pour traiter avec autant de perspicacité, la dure réalité des personnes invisibilisées. On ressent très intensément la chape qui les retient vers les bas-fond de la ville, ne leur laissant qu'un sale goût d'amertume et de pauvreté aigre, qui reste, trop en bouche…C'est très immersif, cette lecture. le ton, les couleurs, le sel, l'énergie. On s'y croirait presque, à côté de ces deux-là, en train de (se) débattre dans leurs agissements avec leurs consciences…Ils rêvent d'une vie meilleure, sans saisir, que ce n'est pas en empruntant un chemin détourné qu'on peut décemment, y arriver…Mais au fond, qu'est-ce qui est, une vie meilleure? Est-ce qu'il leur est seulement, permis de la rêver, de la goûter ou de l'assaisonner, à leurs convenances? Est-ce qu'ils auront un jour droit à la liberté? Je vous laisse vous balader, entre ces pages, pour découvrir ce qu'il en est.
Vous m'en dealerez des nouvelles?
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