Tombée raide dingue de la saga d'
Elena Ferrante (dont il me reste encore le dernier tome à portée de main à lire), j'avais comme une envie d'en lire davantage. Après avoir visionné le très bon documentaire d'ARTE sur l'auteure, je me suis empressée de lire
Poupée volée, un de ces autres romans. Et mes attentes ne furent pas déçues ! Intimiste et lucide, ce court roman d'une puissance verbale nous entraîne dans le combat d'une femme avec elle-même. de la réflexion sur les aspirations de femmes, Ferrante y décortique le rôle de la mère cohabitant avec celui de la femme. de ses vacances au bord de la mer à y côtoyer Nina et son enfant, Lena plonge dans ses souvenirs et revient sur son enfance mais surtout sur ses rapports avec ses propres filles. Pourquoi voler la poupée de l'enfant de Nina ? D'un début solaire, le lecteur touche du doigt le côté sombre d'une femme tourmentée par ces propres choix.
Seule, depuis que ses filles ont quitté l'Italie pour rejoindre leur père au Canada, Lena enseignante à l'université de Florence, s'octroie quelques semaines de vacances en bord de mer. A observer les vacanciers, son regard s'attarde sur une famille en particulier et notamment sur une jeune femme Nina et sa petite fille Elena. Très complices et discrètes, cette mère et son enfant soulèvent de profondes réflexions à Lena surtout en sa qualité de mère, elle qui a abandonné durant trois ans ses deux filles alors qu'elles n'étaient encore que des enfants. de cette parenthèse, tantôt compatissante, tantôt féroce, Lena vole instinctivement la poupée chérie de la petite Elena et passe ainsi de spectatrice à actrice, peu importe les répercussions.
De par son style unique, la plume d'
Elena Ferrante bouleverse. Avec un sujet universel comme la maternité, la romancière dépoussière le rôle indue à une mère tel qu'on le conçoit. Dans la violence des réflexions, elle couche avec délicatesse le sentiment ambigu d'une femme face à la maternité, face à ses erreurs.
En réveillant des souvenirs douloureux sur sa propre enfance, mais aussi sur ses qualités maternelles, la poupée devient pour Lena l'incarnation de ses erreurs passées. du geste fou d'une femme en proie aux doutes où le bilan de sa vie de mère semble s'imposer, celle-ci décline lentement. A observer Nina, son corps, sa beauté, sa jeunesse et sa potentielle relation extra-conjugale, Lena revit des instants révolus. du temps qui s'étire comme sa beauté qui s'étiole, elle regarde avec lucidité les échecs et les regrets tout comme l'amour qui a jalonné son existence.
De ce personnage fort ; qui a grandement inspiré celui d'Elena en mère de famille dans le troisième opus de la saga de L'amie prodigieuse ; se dégage l'ambivalence entre la femme et la mère. L'envie et le devoir : l'envie épanouissante d'une vie de femme et le devoir de bien faire en tant que mère. Mais il n'y a pas de modèle type à la maternité. Ainsi, cette
poupée volée place Lena face à ses contradictions, à son passé. de plus en plus menaçant et trouble le comportement de l'héroïne peut parfois mettre mal à l'aise, le tout dans un seul but : provoquer une réflexion.
D'une banalité de façade, cette histoire a su me toucher par sa profondeur saisissante, mais aussi par le regard moderne d'une romancière perspicace. Parfois agaçante, le personnage de Lena est écrit avec tellement de justesse et de subtilité qu'il est impossible de la juger tant elle le fait elle-même. Beau et intense.
Du cake patate douce et du thé vert Betjeman & Barton ingéré, à la lecture il ne reste rien, seulement le goût prononcé du trouble.
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