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3,47

sur 559 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Une histoire étonnante, dérangeante, inclassable .

Pas vraiment un roman- trop court; pas vraiment une nouvelle -trop long; pas vraiment un essai -il y a quand même une intrigue. Mais un peu tout cela à la fois.

Comme en poésie, on se trouve devant un matériau brut - les durs pépins de la réalité- assailli(e) de sensations fortes, violentes- parfois déplaisantes, parfois enivrantes - mais sans qu'aucune main secourable ne nous guide, sans qu'une analyse rationnelle ne mette tout ce magma à distance en le domestiquant un peu.

Une sorte de petite bombe à fragmentation, de mine anti-personnelle...qui envoie les bons sentiments, les bonnes manières, la morale et le conformisme se faire lanlaire vite fait, bien fait.

Jamais vu, ni lu une chose pareille - si peut-être, en très policé et édulcoré dans Doris Lessing ou Virginia Woolf...

Leda a presque cinquante ans, divorcée, deux filles adultes qui vivent à l'étranger, universitaire,seule, en vacances sur la côté ionienne. Elle va, tous les jours, lire et travailler sur une plage aménagée près d'une pinède et bientôt son attention va être monopolisée par une mère très jeune, sa fille et la poupée qui sert de trait d'union à leurs jeux. La famille, napolitaine, bruyante, envahissante est toujours dans les parages et, le weekend, le mari vient ajouter son ombre massive, mi-menaçante, mi-protectrice, au tableau de groupe.

Fascinée, captivée, jalouse et désireuse de précipiter les conflits ou les tentations qu'elle sent poindre, Leda, prise d'une impulsion irrépressible et qu'elle ne s'explique pas, vole la poupée de l'enfant, provoquant un drame.

Rien de pervers pourtant dans ce geste: juste un grand désarroi.

Celui d'une femme qui vit toujours la culpabilité d'avoir pendant trois ans abandonné ses filles pour tenter de se réaliser elle-même, qui, à l'aube de la cinquantaine, sent s'effriter sa séduction devant celle de ses filles, devant celle de cette toute jeune femme, aimée et convoitée, elle dont les aventures ne se vivront bientôt plus que par procuration...

Dans ce monde de forces obscures les objets se chargent d'une puissance maléfique: les chapeaux de paille voyagent d'une tête à l'autre, s'envolent, décoiffent, servent de signal, de balise; les poupées sont un truchement dérangeant à l'amour maternel, la maternité, la sexualité; et les épingles à chapeau n'ont pas toujours pour fonction de maintenir les chapeaux sur les têtes mais deviennent menaçantes, perfides, presque mortelles...

On ne sort pas indemne de ce voyage dans le corps et l'âme féminins, dans ce grand chamboule-tout des relations mère-fille.

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Leda, quadragénaire en vacances, assiste à une scène idyllique sur la plage : une jeune et jolie maman et sa petite fille de trois ans jouent à la poupée ensemble. Elles sont charmantes.
Leda les observe de loin, à la fois fascinée et agacée par la mère et l'enfant parfaites. Ce spectacle et l'agitation vulgaire de la famille qui accompagne (belle-soeur, beaux-frères, grands-parents, et toute une marmaille mal élevée), la replongent dans sa jeunesse, la confrontent à ses faiblesses de mère, elle dont les filles adultes ont pris leur envol.
Universitaire issue d'un milieu populaire, Leda souffre toujours de ses origines. Elle est devenue épouse et mère trop jeune, alors qu'elle était encore étudiante et espérait échapper à la 'médiocrité' familiale. Elle a étouffé, voulu respirer ; son couple et ses filles en ont pâti...

Cette femme rappelle beaucoup la Lena de 'L'amie prodigieuse' (même auteur) : trajectoire sociale, dureté et éternelle insatisfaction identiques.
Mais, tandis que Lena m'agace crescendo au fil des épisodes de la série (3/4), cette Leda me touche. Elle paraît complètement dingue, perverse, malveillante et dangereuse, mais on peut se retrouver dans certains de ses sentiments ambivalents et mesquins, de ses comportements les plus vils de 'mauvaise mère' :
« Je voulais être une bonne mère, une mère irréprochable, mais mon corps s'y refusait. Je pensais parfois aux femmes du passé, écrasées par leurs enfants trop nombreux, aux rites qui les aidaient à guérir ou à supprimer les petits les plus démoniaques : les abandonner une nuit seuls dans les bois, par exemple, ou les immerger dans une source d'eau glacée. »
Beaucoup d'idées terribles comme celles-là donnent l'impression d'entendre un cri. Un long cri sur deux cents pages troublantes, envoûtantes, et dérangeantes, parce que les aveux de Leda nous tendent un miroir à peine déformant, un condensé de nos erreurs, de nos faux-pas.

La voix de femme de Leda m'a souvent fait penser à Annie Ernaux ; sa voix de femme, d'universitaire, de mère et de fille à Catherine Cusset.
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Elena Ferrante me surprend toujours.
Elle sais explorer la psyché humaine et tout comme le personnage de la mythologie, elle soumet son héroïne Leda à toutes sortes d'épreuves et beaucoup de tourments.
Elle nous dévoile très crûment les sentiments d'une maman envers ses enfants avec en parallèle, ceux de la mère d'Elena, la jeune enfant à la poupée.
C'est une curieuse histoire, très joliment racontée, à l'apparence banale mais qui au fond, se révèle cruelle et d'une tristesse incommensurable, qui oscille entre raison et folie.
Les thèmes chers à Elena Ferrante sont tous présents, des vacances à la mer, des relations mères-filles ambivalentes, des souvenirs d'enfance teintés de rancunes et de plaies vives et l'envie de s'élever dans la société pour ne pas reproduire la généalogie familiale.
Leda fait des gestes insensés et l'auteure nous en fait vivre la genèse, avec justesse et sans jugement.
Aussitôt le livre terminé, j'ai écouté la version adaptée pour l'écran par Maggie Gyllenhaal avec Olivia Colman qui incarne Leda. Malgré une petite disparité dans les noms et les lieux, le film est un petit bijou. Je crois cependant que de lire le livre est un atout pour la compréhension du film, surtout pour la finesse de la description des sentiments.



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Les relations mère-fille, la maternité sont les sujets explorés par ce roman atypique. Étrangement, ces sujets sont amenés par la rencontre estivale de deux femmes sans aucun lien de parenté. Leda, universitaire florentine mère de deux filles adultes, et Nina, jeune mère et jeune mariée enchaînée par son origine, n'ont rien en commun sauf la maternité qu'elles vivent de manière diamétralement opposée.
L'auteur déploie tout son talent pour nous raconter quelques faits – il ne se passe pas grand-chose hormis le vol et la scène finale – et énormément de sentiments. L'introspection de Leda dévoile une personnalité complexe, son présent et son passé, son cheminement, ses actes et leurs conséquences. L'auteur a créé une histoire fascinante malgré son apparente banalité – les vacances d'une universitaire – et m'a permis de suivre avec intérêt Leda sur la plage, dans son quotidien présent ou passé…
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Tombée raide dingue de la saga d'Elena Ferrante (dont il me reste encore le dernier tome à portée de main à lire), j'avais comme une envie d'en lire davantage. Après avoir visionné le très bon documentaire d'ARTE sur l'auteure, je me suis empressée de lire Poupée volée, un de ces autres romans. Et mes attentes ne furent pas déçues ! Intimiste et lucide, ce court roman d'une puissance verbale nous entraîne dans le combat d'une femme avec elle-même. de la réflexion sur les aspirations de femmes, Ferrante y décortique le rôle de la mère cohabitant avec celui de la femme. de ses vacances au bord de la mer à y côtoyer Nina et son enfant, Lena plonge dans ses souvenirs et revient sur son enfance mais surtout sur ses rapports avec ses propres filles. Pourquoi voler la poupée de l'enfant de Nina ? D'un début solaire, le lecteur touche du doigt le côté sombre d'une femme tourmentée par ces propres choix.

Seule, depuis que ses filles ont quitté l'Italie pour rejoindre leur père au Canada, Lena enseignante à l'université de Florence, s'octroie quelques semaines de vacances en bord de mer. A observer les vacanciers, son regard s'attarde sur une famille en particulier et notamment sur une jeune femme Nina et sa petite fille Elena. Très complices et discrètes, cette mère et son enfant soulèvent de profondes réflexions à Lena surtout en sa qualité de mère, elle qui a abandonné durant trois ans ses deux filles alors qu'elles n'étaient encore que des enfants. de cette parenthèse, tantôt compatissante, tantôt féroce, Lena vole instinctivement la poupée chérie de la petite Elena et passe ainsi de spectatrice à actrice, peu importe les répercussions.

De par son style unique, la plume d'Elena Ferrante bouleverse. Avec un sujet universel comme la maternité, la romancière dépoussière le rôle indue à une mère tel qu'on le conçoit. Dans la violence des réflexions, elle couche avec délicatesse le sentiment ambigu d'une femme face à la maternité, face à ses erreurs. 

En réveillant des souvenirs douloureux sur sa propre enfance, mais aussi sur ses qualités maternelles, la poupée devient pour Lena l'incarnation de ses erreurs passées. du geste fou d'une femme en proie aux doutes où le bilan de sa vie de mère semble s'imposer, celle-ci décline lentement. A observer Nina, son corps, sa beauté, sa jeunesse et sa potentielle relation extra-conjugale, Lena revit des instants révolus. du temps qui s'étire comme sa beauté qui s'étiole, elle regarde avec lucidité les échecs et les regrets tout comme l'amour qui a jalonné son existence.

De ce personnage fort ; qui a grandement inspiré celui d'Elena en mère de famille dans le troisième opus de la saga de L'amie prodigieuse ; se dégage l'ambivalence entre la femme et la mère. L'envie et le devoir : l'envie épanouissante d'une vie de femme et le devoir de bien faire en tant que mère. Mais il n'y a pas de modèle type à la maternité. Ainsi, cette poupée volée place Lena face à ses contradictions, à son passé. de plus en plus menaçant et trouble le comportement de l'héroïne peut parfois mettre mal à l'aise, le tout dans un seul but : provoquer une réflexion. 

D'une banalité de façade, cette histoire a su me toucher par sa profondeur saisissante, mais aussi par le regard moderne d'une romancière perspicace. Parfois agaçante, le personnage de Lena est écrit avec tellement de justesse et de subtilité qu'il est impossible de la juger tant elle le fait elle-même. Beau et intense.

Du cake patate douce et du thé vert Betjeman & Barton ingéré, à la lecture il ne reste rien, seulement le goût prononcé du trouble.
Lien : http://bookncook.over-blog.c..
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D'emblée, j'ai été happée par l'écriture et l'intrigue naissante, à savoir deviner quelle est cette blessure mystérieuse qui fait s'évanouir la narratrice sur l'autoroute ?
L'histoire de cette belle quadra se joue à la fois au présent et au passé, et on assiste avec attention à la projection qu'elle fait de sa propre histoire sur ses voisins de parasols...D'anecdotique, cette observation des autres va devenir obsédante, jusqu'à pousser la narratrice à ce geste en apparence dénué de sens.
J'ai profondément aimé cette manière qu'à le présent de réactiver le passé dans le corps même de cette femme, cette observation intelligente des objets et des corps et de ce qu'ils nous racontent.
J'ai été en apnée comme dans les plus grands thrillers, dévorant avec délice les traces subtiles d'une folie naissante que l'écriture de l'auteure sait retranscrire avec brio. Une de mes plus belle découvertes !
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Sur une plage de la côte ionienne, Nina prend le soleil. C'est une jeune mère, particulièrement jolie, qui aime tendrement sa petite fille Elena, âgée de trois ou quatre ans. Entre elles, une poupée de chiffon, dont elles s'occupent ensemble et qui sert un peu de truchement à leur affection mutuelle. Leda, qui assiste à ces scènes de tendresse, se rapproche d'elles et va petit à petit entrer dans leur intimité. Jusqu'au jour où elle va voir dans cette poupée le moyen de leur faire payer toute cette beauté et tout cet amour, qui lui font envie et la ramènent à sa propre médiocrité : sa beauté déjà vacillante, ses filles, qu'elle n'a jamais su aimer, parties vivre au loin avec leur père. Une chronique de la désespérance, des désirs refoulés, sous le soleil bienveillant de Satan…
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Les amateurs de L'Amie prodigieuse retrouveront dans ce court roman des thèmes et sujets communs : une professeure florentine d'origine napolitaine part quelques semaines au bord de la mer. Elle observe sur la plage une famille napolitaine, en particulier une jeune mère et sa petite fille, à qui sans raison elle va voler sa poupée ... C'est l'occasion pour la narratrice de se rappeler, en se le reprochant, la façon dont elle a élevé elle-même ses deux filles ou les raisons qui l'ont poussée à quitter le foyer et à les abandonner pendant 3 ans.
Un roman qui émeut par sa puissance d'identification. Comme pour Les jours de mon abandon, on retrouve ce sentiment d'étrangeté et de dépossession (de « broyage ») qui déstabilise.
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Ecrit avant sa série "L'amie prodigieuse", ce court roman m'a beaucoup plu. J'ai retrouvé son univers avec plaisir : les relations mère-filles, les relations amicales (et inamicales), les sentiments de la narratrice très développés, l'univers italien et l'importance de la plage. Sur une histoire qui semble simple, une femme de 48 ans, universitaire, part passer l'été à la plage pour travailler. Elle s'installe à côté d'une nombreuse famille napolitaine bruyante. Elle se retrouve comme hypnotisée par le comportement de ses voisins de plage et plus particulièrement par une jeune mère et sa fille de 3 ans, à qui elle volera sa poupée chérie. Ce roman développe toute l'ambiguïté des mères, jeunes et moins jeunes, et par des sentiments forts mais contradictoires envers leur progéniture.
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Leda, enseignante universitaire de 47 ans, quitte Florence pour un mois et demi de vacances au bord de la mer. Ses filles sont parties vivre au Canada avec leur père et elle compte bien profiter de cette nouvelle tranquillité.

Sur la plage bondée où elle s'installe quotidiennement avec ses livres et ses notes, elle observe discrètement une très jeune mère et sa fille de trois ans. Elle est fascinée par leurs jeux, leur relation et la poupée de la petite, véritable vecteur de leur symbiose.
Autour de ce duo gravite la famille napolitaine de la jeune mère, nombreuse, bruyante, envahissante.

En les observant, Leda replonge dans son passé: sa vie de mère, sa propre famille napolitaine et les choix douloureux qu'elle a dû faire en tant que femme pour exister.

D'un roman sur la réflexion d'être mère, où il y est question de vol, d'abandon et de fuite, Elena Ferrante parvient à construire un récit captivant, dévoilant les évènements les uns après les autres, nous happant jusqu'à la dernière page pour en connaitre l'issue.

Je vous le conseille, surtout si vous avez aimé la saga de "L'amie prodigieuse" ou si vous n'avez pas encore osé vous lancer. La plume d'Elena Ferrante est fameuse.

Lien : https://carpentersracontent...
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Elena Ferrante est le pseudonyme de Erri De Luca, le véritable auteur des romans.

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