Pour séduire une femme, il existe une méthode infaillible : la prendre au sérieux. L’expérience prouve que cette méthode s’applique aussi bien aux hommes. Plus ils tombent dans mon piège et plus ils sont fous de moi. Mais, encore une fois, ce type doit m’avoir hypnotisée. Quand il me raconta que j’avais une âme tendre et sensible dont le mystère échappait à tous les hommes, que je m’abritais derrière un masque, crânant avec assurance pour que personne ne remarque mon extrême droiture morale, j’en aurais pleuré. Quelques mots de plus, et je fondais en larmes devant tout le monde. Qu’on se le dise : les hommes n’ont aucune idée de ce qui se passe dans la tête d’une femme !
Une fille qui ne possède rien peut toujours arriver à mettre la main sur un homme si elle est frigide, car il s’imagine que lui devrait réussir à la faire jouir. C’est sa vanité qui est en jeu. Dès qu’une femme ne pousse pas des oh et des ah, il se sent vexé.
Évidemment je n’ai pas honte d’être secrétaire. Absolument pas. Si on ne se contente pas de s’en octroyer le titre, comme des milliers de sténodactylos et d’employées de bureau, mais si on en remplit vraiment les fonctions, on a lieu d’en être fière. Mais dans un cercle aussi sélect et vis-à-vis d’un écrivain, Anny aurait dû éviter de le mentionner. Ces gens-là ne s’intéressent qu’aux artistes, aux célébrités, aux hommes politiques et toute cette clique. C’est du moins ce que je pensais.
Les femmes mariées ont le droit d’être fatiguées ou de se donner à contrecœur – du moins la plupart se le permettent, et ce n’est pas moi qui le leur reprocherai, car les malheureuses célibataires que nous sommes n’auraient sinon aucune chance –, mais il en va tout autrement de la petite amie : elle se doit d’être toujours bien disposée, ou tout au moins de faire semblant.
Inutile d’être grand psychologue pour s’apercevoir que son bonheur conjugal – ou plus exactement extraconjugal – était singulièrement contrarié. Il ne restait plus de son exaltation que les cravates de couleur trop voyantes, et elles ne contribuaient plus maintenant qu’à assombrir son visage et à lui donner une expression plus morose encore.