Citations sur Comment j'ai vidé la maison de mes parents, tome 1 (47)
Les choses ne sont pas seulement des choses, elles portent des traces humaines, elles nous prolongent.
Mon père mourut sans savoir qu’il se mourait. Nous ne nous étions pas dit au revoir. Était-ce mieux ou moins bien pour lui ? Comment le savoir ? Chaque être humain emporte avec soi sa part de mystère.
"En donnant je n'étais pas celle qui donnait, mais la personne qui recevait le don : un premier appareil photo à une très jeune fille, un manteau de fourrure à ma belle sœur, un grand calendrier de reproductions de Magritte à un ami qui allait emménager dans un nouvel appartement."
Écrire captait le flot bouillonnant des affects. l'écriture naissait du deuil et lui offrait un refuge. Un lieu où se mettre à l'abri avant d'affronter de nouvelles vagues malaisées à contenir.
Vider, quel mot sinistre, il résonne mal, évoque immédiatement l'idée de piller une tombe, de dérober des secrets au royaume des morts - la malédiction des pyramides -, donne la sensation de ressembler à des rapaces, des détrousseurs de cadavres.
Les choses ne sont pas seulement des choses, elles portent des traces humaines, elles nous prolongent. Nos objets de longue compagnie ne sont pas moins fidèles, à leur façon modeste et loyale, que les animaux et les plantes qui nous entourent. Chacun a une histoire et une signification mêlées à celle des personnes qui les ont utilisés et aimés. (p. 50)
Retrouver un morceau de papier couvert de leurs calligraphies réveillait la nostalgie. L'écriture, comme la voix, est une émanation du corps. Mais la voix s'éteint, la graphie reste.
Je suis pour les donations et contre les héritages. Il faudrait toujours faire un testament, désigner nommément ce qu'on souhaite léguer et à qui on le destine. La passation d'une génération à une autre ne devrait pas aller de soi, elle devrait être un choix, une offrande, une transmission explicite, concertée, réfléchie, et non pas seulement une convention, un laisser-faire passif, une résignation. J'héritais, j'aurais aimé recevoir.
Sommes-nous tous voués à écrire l'histoire de nos parents ? Même après leur mort, ne cessons-nous jamais de vivre pour eux, à travers eux, en fonction d'eux ou contre eux ? Est-ce une dette qui nous poursuit toujours ?
Ils me chargeaient de trop parce qu'ils avaient eu trop peu. Ils cherchaient à combler leur vide.