J'adore découvrir de nouveaux auteurs. Et quand je dis « nouveaux », il faut aussi entendre des écrivains qui ont déjà pas mal roulé leur bosse mais qui ne font pas forcément trop de vagues commerciales, en périphérie de ceux qui pratiquent de main de maitre le marketing à haute dose. (Tiens, il parait que la maison d'édition de l'écrivain français le plus vendeur envoie d'office à certaines librairies les romans du dit auteur, même s'ils ne les ont pas commandés. Donc, sauf si les libraires font l'effort de renvoyer les romans pour être remboursés ; ces livres se retrouvent dans les vitrines, sur les tables de ces librairies, bon gré mal gré. Ça c'est un marketing fichtrement bien pensé. Faudrait pas que t'oublies de l'acheter : il en va du top1 des ventes à respecter !).
J'aime découvrir des écrivains peut-être plus discrets que d'autres mais qui font leur petit bonhomme de chemin, découvrir des petits trésors enfouis et qui ne demandaient qu'à être découverts et appréciés pour leurs qualités. Des écrivains qui savent manier la plume, qui écrivent des livres un peu comme à leur image, intimistes, presque humanistes, qui savent raconter des histoires comme l'oncle Paul, des histoires dans lesquelles on se plonge, on se laisse bercer, immerger, submerger doucement.
Depuis quelques temps, je lis de belles critiques sur l'écrivain
René Frégni et notamment sur son roman «
Je me souviens de tous vos rêves ». Intriguée, j'ai consulté la liste de ses romans. Et là, j'en voudrais presqu'à ma soeur de ne pas m'en avoir parlé avant, elle qui vit à quelques kilomètres à peine de Manosque, où vit cet écrivain. D'ailleurs, sur une ligne droite qui mène jusqu'à Pertuis où vit
Thomas Vinau (découvert il y a quelques années avec «
Ici ça va », deuxième faute de ma frangine… Elle les cumule, ma soeur).
Mais ces écrivains-là, il faut les bichonner, il faut les protéger. Ils me font penser à de petites criques, d'une beauté époustouflante et sauvage, connues par les autochtones seuls. Des endroits dont il faut garder le mystère, dont il faut cacher l'existence aux hordes de touristes, sortis frénétiquement d'un bus climatisé énorme, garé pas loin, et qui viendraient forcément dénaturer et abimer le lieu. Il paraît qu'avant Bardot Saint-Tropez était un village de pêcheurs, il paraît… Encore une qui aurait dû tenir sa langue et se faire plus discrète à l'époque.
Alors me voilà devant le paradoxe de vouloir vanter les mérites de
Frégni, touchée par ses mots, la beauté de son texte, tout en souhaitant garder intact cet homme qui vit près de la nature, qui aime la solitude et le calme, loin du vacarme du monde. Mais, n'ayant pas la notoriété de BB ni ses atours (déjà je ne suis pas blonde), je me suis finalement dit que mon petit billet n'aura pas le même impact-et loin de là- qu'un frétillement de cils de BB. Et
Frégni a trop vécu pour savoir ce qu'il aime et apprécie aujourd'hui et il sait se sauvegarder. Il restera telle une pierre précieuse à l'état brut, pas encore taillée.
J'ai découvert la plume de
Frégni par «
Les vivants au prix des morts » et je me suis plongée dans le récit, incroyable récit, devrais-je dire. Je ne sais pas si j'ai déjà lu un roman avec un tel style d'écriture. Un mélange savamment dosé de poésie et de polar.
On entre dans la lumière éclatante pour plonger dans le noir. de l'amour pour une femme à la folie des hommes.
Frégni sait par petites touches, tel un peintre pointilliste, parler de la nature, du silence, du chant des oiseaux, du pouvoir de l'écriture. Il sait parler de la beauté des femmes (surtout celle de son institutrice). Il évoque par son regard l'amour qu'il éprouve pour ce qui l'entoure. Il sait apprécier ces petits matins tranquilles avec un bol de café, regarder par la fenêtre des petits riens qui sont beaucoup, le bruissement des arbres, la voisine qui promène son chien. Il nous enveloppe d'une douceur languissante. La douceur d'une pierre polie par les vagues qu'on caresse entre ses doigts, même si c'est au prix parfois de la rugosité d'un rocher contre la plante des pieds contre laquelle on s'écorche et on se met à saigner. le silence et la quiétude de la nature mais aussi le silence étouffant d'une cellule de prison des baumettes, parmi les cris des détenus. On a beau parfois vouloir s'isoler, l'amitié, l'amour des autres nous rattrape, avec ses joies et ses malheurs et on pourrait s'en mordre les doigts.
Dans quelques jours, je partirai pour la Provence, me balader près de la montagne Sainte Victoire, parmi les champs de lavande et de coquelicots, attendant le temps du chant des grillons, profitant des marchés nocturnes, de l'accent du Sud et d'un rythme plus lent et régénérant. Je ne sais pas si je croiserai au hasard d'un petit chemin un homme qui ressemblera à
René Frégni. Mais il est certain que je penserai à lui lors de mes balades, respirant, m'inondant de cette nature, de cette beauté simple qui le bouleverse comme moi.
Ce billet est aussi pour vous dont les critiques sur les romans de
René Frégni ont éveillé ma curiosité et m'ont permis d'avoir la chance de découvrir un écrivain qui m'a offert ces émotions comme je les aime. Un écrivain que j'ai envie de découvrir plus encore. Et de faire partager aussi (j'en parlerai sûrement à ma soeur… Elle a de la chance, ma soeur, je ne suis pas trop rancunière). C'est un billet pour vous remercier chaque jour d'élargir mon horizon, d'enrichir mes émotions, de faire entrer un peu de magie, de beauté et de lumière dans mon quotidien. Et ça, ça n'a pas de prix.