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EAN : 9782021478969
192 pages
Seuil (07/10/2022)
3.5/5   2 notes
Résumé :


De l’espace notre Terre est blanc et bleu. Des continents et des mers. En bas… un paradis. La douceur de l’air, l’odeur de l’iode et la fraîcheur de l’eau. Là, entre zéro et quinze kilomètres au-dessus du niveau de la mer, tout autour du globe, il y a ces 1 400 milliards de tonnes de dioxyde de carbone. Le CO2 que nous avons émis depuis le début de l’industrialisation. Des milliards de tonnes prisonnières de la basse atmosphère.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Cette fable [qui attribue une simple ignorance à ceux qui nous ont fait basculé dans l’anthropocène], alors qu'elle prétend en annoncer la fin, reproduit finalement la vision du monde des modernes qu'elle incrimine. Elle procède du même régime d'historicité qui domina le XIXe siècle et une partie du xxe siècle dans lequel le passé n'est évalué qu'en creux, à l'aune d'une leçon donnée par le futur, et dans une représentation du temps comme accélération unidirectionnelle. Elle met en scène un « front de modernisation » quittant un passé aveugle, vers un avenir où nos savoirs seraient devenus globaux et solides, nous contraignant enfin à les prendre en compte en politique (mais différemment d'avant : sans « grand partage », sans Nature autoritaire, ni aveugles certitudes). La téléologie du devenir écologique de nos sociétés remplace celle du progrès. On est en présence d'une fable modernisatrice annonçant la fin de la modernisation...

Deuxièmement, ce récit, en « oubliant » la réflexivité environnementale des sociétés modernes, tend à dépolitiser les enjeux écologiques du passé, ce qui pénalise la compréhension des enjeux présents. Pris au sérieux, l'Anthropocène enterre le songe postmoderne d'une société devenue enfin réflexive. Qui peut encore croire que si les individus, les sociétés, les Etats et les entreprises ne se comportent pas de façon écologiquement soutenable, c'est parce qu'il nous manque encore des connaissances scientifiques pour nous convaincre ? Les travaux de sciences humaines et sociales montrent comment certains processus socio-économiques et culturels sont bien plus déterminants que la quantité d'information scientifique : lobbying, storytelling, effet rebond, coup de force technique, greenwashing, récupération de la critique, complexification, banalisation, ou simulacre de prise en compte.

C'est tout cet arsenal de « désinhibition » (au sens de passer outre aux alertes et aux résistances) qu'il convient de repérer dans le passé afin d'en proposer une lecture dynamique, qui soit politiquement moins naïve que le grand récit d'une prise de conscience.
Plutôt que de gommer la réflexivité environnementale du passé, nous devons comprendre comment nous sommes entrés dans l'Anthropocène malgré des alertes, des savoirs et des oppositions très consistantes, et forger un nouveau récit plus crédible de ce qui nous est arrivé.
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L'irruption de la nature en politique implique-t-elle de s'abandonner aux scientifiques ou appelle-t-elle au contraire une critique de la technoscience et l'abandon d'une posture de maîtrise de la Terre ? La première option semble la seule possible dans le grand récit des anthropocénologues. Les « approches innovantes» du passé ont déréglé la planète?
Vive les « approches innovantes» que nous apporte la tech-noscience contemporaine. Les peuples indigènes, les communautés limitant volontairement leur développement technique, les collectifs expérimentant la sobriété volontaire à travers la « décroissance» ou la « transition», les jeunes écologistes édifiant des cabanes arboricoles face aux bulldozers préparant autoroutes et aéroports, les mouvements de critique des techniques nucléaires, spatiales, communicationnelles, numériques, bio-ou nano-technologiques, tous ces collectifs sont absolument invisibles dans le grand récit. Les solutions sérieuses ne peuvent sortir que d'un surcroît d'innovation technologique dans les laboratoires, et non des expérimentations politiques alternatives « par en bas » dans l'ensemble des sociétés!
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Curieusement, au sublime de la catastrophe succède le vertige de la toute-puissance. Après s'être fait brièvement peur en imaginant une planète hors contrôle, nombre de scientifiques et de journalistes enchaînent avec le récit presque glorieux de l'avènement de l'humanité pilote et ingénieure de la planète 168 Que signifie pour nous, humains, d'avoir l'avenir d'une planète entre nos mains ? Un sentiment d'effroi doublé bien vite par un sentiment de puissance? Après avoir depuis des siècles fait de la géo-bio-ingénierie sans le savoir, il s'agirait à présent de rendre toutes nos interactions avec Gaïa conscientes, volontaires et scientifiquement calculées et de nous convertir à une ingénierie écologique généralisée. Alors qu'il pourrait signifier un appel à l'humilité, l'Anthropocène est convoqué à l'appui d'une hubris planétaire. « Nous avons contrôlé tous les autres environnements où nous vivons, pourquoi pas la planète ? » affirme ainsi Lowell Wood, astrophysicien partisan de la géo-ingénierie.
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