Un livre qui dit, qui amène à penser, en une langue simple, gaie et sage, que la pensée, la liberté, la révolution, la sagesse de vivre, sont dans le refus du sérieux, des choix imposés, des évidences, la
possibilité du lien entre les mondes, l'acceptation du ridicule, la gravité du rire intégral.
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Le ridicule volontaire est la seule arme que s’autorise la ludique, la seule arme vraiment critique. En effet, celui qui cherche à éviter le ridicule admet les valeurs de ceux qui le jugent, les règles du jeu en vigueur, tandis que le ludicien, en choisissant de sembler ridicule, rend tout à coup possible de penser l’inverse : que ce soient les règles du jeu et les valeurs des juges qui soient ridicules.
La ludique n’a aucune originalité. Elle invite simplement à refaire le geste éternel de la question socratique, ou du doute cartésien. Car elle ne cache pas son admiration pour ceux qui ont osé tout reprendre à zéro. Qui sait si Descartes, dans le droit fil de sa pensée, ne nous tiendrait pas aujourd’hui un discours de l’améthode.
L’araignée tisse. Cet animal ludique est persuadé que seul un texte peut relier l’un à l’autre les possibles qui s’excluent, et que ce texte est source de vie, pour peu que l’on ait la patience d’attendre que les objets réels, nourrissants et féconds, s’y prennent. L’araignée retourne les contraires en fondement du réseau. Elle retourne les possibles qui s’excluent en moyen de vivre tout le reste.
À première vue, l’espace-temps ressemble à une guerre de néants. Non seulement l’espace est vide et le temps néant, mais chacun nie l’autre et le prive de tout contenu subsistant. Et pourtant entre ces deux déserts infinis, il existe un trait d’union qui les relie et les esquive, comme une navette d’existence. Cette trajectoire minuscule, ce tout petit trajet, c'est l'homme.
J’y peux penser à chaque fois avec la même joie, car le propre de la pensée humaine, c’est de pouvoir, devoir et savoir jouer avec la mort. Tel est le jeu qui rend humain.