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Citations sur En Suisse... Et en Savoie (6)

Quoique notre second relais ne marchât pas si bien que le premier, nous arrivâmes à Berne au commencement de la nuit, en longeant un magnifique bois de sapins, dont les fûts filaient à travers l’ombre comme des mâts de navire ou des nervures de piliers gothiques, et rappelaient cette étrange forêt que Gustave
Doré fait parcourir au Juif errant ; en feuilletant ces bizarres il-lustrations, nous avions trouvé les arbres crayonnés par le dessinateur trop pareils à des tuyaux d’orgue ; nous nous empressons aujourd’hui de retirer notre critique. Doré avait raison. La nature justifie toujours l’art.
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Nous avons bien peur d’avoir marqué notre premier pas sur la terre étrangère par un acte de paganisme – une libation au soleil levant ! L’Italie catholique, qui sait si bien s’arranger avec les dieux grecs et romains, nous le pardonnera ; mais la rigide Genève nous trouvera peut-être un peu libertin. Une bouteille de vin d’Arbois, achetée en passant à Poligny, jolie ville au pied de la muraille jurassique qu’il faut franchir pour sortir de France, fut bue par nous au premier rayon du jour ! Phoebo nascenti ! Ce rayon venait de nous révéler subitement, au bas des dernières croupes de la montagne, le lac Léman, dont quelques plaques miroitaient sous la brume argentée du matin.
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Le Français – le Parisien surtout – est si naturellement casanier, qu’il lui faut un prétexte à peu près raisonnable pour partir, comme si le voyage n’était pas à lui seul un but ! Personne n’ose dire : « Je m’en vais afin d’être ailleurs, de ne plus voir les mêmes rues, les mêmes maisons, les mêmes figures. Le lieu où j’irai m’est indifférent, pourvu qu’il soit autre ; mon existence ordinaire m’ennuie comme un drame à salon et à tapis, et il serait temps de changer de décor ». Nous-même, bien que nous y mettions plus de franchise, nous avons tâché de motiver à nos propres yeux notre départ soudain, en nous disant qu’on annonçait pour le 23 ou le 24 une exposition de l’industrie à la Haye, et qu’une exposition de l’industrie à la Haye (en hollandais S’gravenhaag) devait être bien curieuse.
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L’idée de Mme de Staël, avec ses gros sourcils noirs, son turban jaune et sa courte taille à la mode de l’Empire, nous a fort tracassé en traversant Coppet. Quoique nous la sachions morte depuis longtemps, nous nous attendions toujours à la voir sous le péristyle à colonnes de quelque villa, ayant à côté d’elle Schlegel et Benjamin Constant ; mais nous ne l’avons pas vue. Les ombres ne se risquent pas volontiers au grand jour ; elles sont trop coquettes pour cela.
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Voilà à peu près les linéaments grossiers du tableau ; mais ce que le pinceau serait peut-être plus impuissant encore à rendre que la plume, c’est la couleur du lac. Le plus beau ciel d’été est assurément moins pur et moins transparent. Le cristal de roche, le diamant ne sont pas plus limpides que cette eau vierge descendue des glaciers voisins. L’éloignement, le plus ou moins de profondeur, les jeux de la lumière lui donnent des teintes vaporeuses, idéales, impossibles, et qui semble apparte-nir à une autre planète : le cobalt, l’outremer, le saphir, la turquoise, l’azur des plus beaux yeux bleus, ont des nuances terreuses en comparaison. Quelques reflets sur l’aile du martin-pêcheur, quelques iris sur la nacre de certaines coquilles peu-vent seuls en donner une idée, ou bien encore certains lointains élyséens et bleuâtres des tableaux de Breughel de Paradis.
On se demande si c’est de l’eau du ciel ou la brume azurée d’un songe que l’on a devant soi : l’air, l’onde et la terre se reflètent et se mêlent de la façon la plus étrange.
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Il est étrange comme un grand nom peuple une ville. Celui de Rousseau nous a poursuivi tout le temps que nous avons passé à Genève. L’on comprend difficilement que le corps d’un es-prit immortel ait disparu, et que la forme qui enveloppait de divines pensées s’évanouisse sans retour ; aussi nous avons été affligé de ne pas rencontrer au détour d’une rue l’auteur de La Nouvelle Héloïse et de l’Émile, en bonnet fourré et en robe arménienne, la mine triste et douce, l’air inquiet et songeur, regardant si son chien le suit et ne le trahit pas comme un homme.
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