C'est plus facile d'être malheureux qu'heureux, et moi, tu m'entends, je n'aime pas les gens qui choisissent la facilité, je n'aime pas les geignards.
C'est un cercle vicieux : moins tu travailles, et plus tu détestes l'école ; plus tu la détestes, et moins tu travailles...
"Monsieur le directeur de l'école de Grand-champs,
Je voudrais être admis dans votre établissement, mais je sais que c'est impossible parce que mon dossier scolaire est trop mauvais.
J'ai vu sur la publicité de votre école que vous aviez des ateliers de mécanique, de menuiserie, des salles d'informatique, une serre et tout ça.
Je pense qu'il n'y a pas que les notes dans la vie. Je pense qu'il y a aussi la motivation.
Je voudrais venir à Grandchamps parce que c'est là que je serais le plus heureux, je pense.
Je ne suis pas très gros, je pèse 35 kilos d'espoir.
Au revoir,
Grégoire Dubosc
P.S n°1: C'est la première fois que je supplie quelqu'un pour aller à l'école, je me demande si je ne suis pas malade.
P.S. n°2 : Je vous envoie les plans d'une machine à éplucher les bananes que j'ai fabriquée quand j'avais sept ans."
Dis-toi que tu es le flic des mots. A chacun tu leur demandes leurs papiers avant de les laisser circuler :
- Vous là! Comment vous vous appelez?
- Adjectif.
- Avec qui vous roulez, mon garçon?
- Avec "chiens"
- Bon, alors, qu'est-ce qu'il vous faut?
- Un s, monsieur.
- C'est bon, circulez. p.95
Je hais l'école.
Je la hais plus que tout au monde.
Et même plus que ça encore...
Elle me pourrit la vie.
Je passais des heures à mâchonner mon stylo en regardant les mouettes. Je rêvais que je me transformais en mouette. Je rêvais que je volais jusqu’au phare rouge et blanc, tout là-bas. Je rêvais que je devenais copine avec une hirondelle et qu’au mois de septembre, le 4 par exemple – comme par hasard juste le jour de la rentrée ! -, nous partions ensemble pour les pays chauds. Je rêvais que je traversais les océans, je rêvais que nous all…Et je secouais la tête pour revenir à la réalité.Je relisais mon problème de maths, une histoire débile de sacs de plâtre à empiler, et je rêvais encore : une mouette venait s’oublier sur l’énoncer… Splotch ! une grosse fiente blanche qui pourrirait toute la page.Je rêvais à tout ce que je pouvais faire avec sept sacs de plâtre…Bref, je rêvais…
Sur mon bulletin de fin de maternelle, Marie avait écrit :
« Ce garçon a une tête en forme de passoire, des doigts de fée et un cœur gros comme ça. On devrait réussir à en faire quelque chose. »
C’était la première et dernière fois de ma vie qu’un membre de l’éducation nationale ne me saquait pas.
Tous les soirs, après les cours, je marchais au lieu d'aller regarder la télé au foyer. Je traversais les villages, les bois, les champs. Je marchais longtemps. Je respirais lentement et profondément. Avec toujours la même phrase en tête : "Prends tout ça, grand-Léon, respire ce bon air. Respire. Sens cette odeur de terre et de brume. Je suis là. Je suis tes poumons, ton souffle et ton coeur. Laisse-toi faire. Prends." C'était du bouche-à-bouche à distance.
Bien sûr, c'est plus facile de se dire qu'on est nul et ne rien faire ! Bien sûr ! C'est une fatalité ! C'est si simple de penser qu'on est maudit !
A cette époque de ma vie, j'aimais tout le monde, et je croyais que tout le monde s'aimait.