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Citations sur Le bonheur fou (32)

Hier, j'avais du bonheur, se dit-il (*). Je pensais constamment à faire notre gloire, à la force du poignet. Ce tour de passe-passe est bête comme chou. Lecca me répondra avec juste raison qu'au lieu de sang nous n'avons répandu que de la salive. Mais je ne serai heureux que si je suis mêlé à de grands événements.

(*) Angelo
(p.447)

Je ne sais pas ce que vous a raconté Lecca pour vous embaucher, dit Angelo, mais quoi que ce soit, ce sont des craques. Une seule chose est certaine: nous ne sommes pas les anges de la liberté. Tout ce que je peux vous dire, moi, c'est que je n'ai pas d'idées.
-Je n'ai jamais rien compris à ce que je voulais, moi non plus, dit Giosué.

(p.461)
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Si nous étions aussi comédiens que ces cavaliers de parade, je pourrais vous faire promener tête nue et sans risque au milieu de toutes les batteries. Pour manier des canons, il faut se foutre les mains pleines de graisse et se coltiner pas mal de trucs sur les reins. C'est pourquoi nous sommes tous républicians. Il y a bien longtemps que le roi aurait mis sa police au rancart s'il pouvait compter sur ses canons. Mais il ne le peut pas.

3120 – [Folio n° 1752, p. 158]
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Certes, il … avait connu [des femmes] courageuses. Il savait que le Piémont était le domaine de la passion, que, dans les palais de Turin, les bals étaient, neuf fois sur dix, des réunions de conjurés ; que les couples s'appariaient aux contre-danses pour échanger des consignes et faire passer des mots d'ordre. Il avait été chargé d'assez de missions dans les domaines campagnards, les études de notaires des petits bourgs, les maisons de marchands ; il avait assez cavalcadé en compagnie sur les routes, dans les bois, dans les parcs pour connaître l’existence de femmes graves et déterminées.

3061 – [Folio n° 1752, p. 30]
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Ces gens-là n'étaient pas aimables. Et d'ailleurs ne risquaient rien. C'étaient
des théoriciens. Ils buvaient du café, fumaient des cigares, se brandissaient
comme des drapeaux.
Il s'agissait simplement de savoir qui aurait l'idée la plus brillante.
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Il n'était pas à Turin depuis huit jours qu'un homme de la fraction libérale prétendit avoir découvert un complot militaire. Il ne s'agissait de rien moins, d'après son dire, que de massacrer vingt mille personnes. On devait ouvrir les prisons à une centaine de criminels qui se précipiteraient dans la foule, armés de poignards et provoqueraient les milices. Les officiers prévenus devaient crier « Les libéraux nous assassinent » et faire feu sur la foule. Cerutti respira voluptueusement l'air du pays.

3090 – [Folio n° 1752, p. 34]
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Vers les quatre heures du matin, l'orage s'éloigna en grommelant.
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La fréquentation des chevaux et des belles clientes lui avait donné un très beau regard dominateur.
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« Je suis allée aux nouvelles chez les voisins, dit la vieille dame. Une femme seule et de mon âge a le droit d’avoir peur, surtout quand le vent secoue les portes. Le commandant de l’artillerie a fait des siennes. Il a eu, hier soir, une discussion très violente avec un capitaine de lanciers, à propos de vous. Il semble que vous ayez en partie raison. Il n’y avait peut-être pas grand-chose dans le cercueil. Non pas quant au cadavre : on en avait un sous la main, cela ne fait pas de doute ; on a eu soin de l’exposer et cinquante personnes incapables de s’en tenir à un mensonge concerté l’ont vu. Mais, de retour du cimetière, la soi-disant veuve a bu quelques verres de vin et, comme on essayait de l’envoyer coucher sans mettre de gants, elle a réclamé d’une voix puissante un certain argent qu’on lui avait promis. On va jusqu’à dire que les enfants ont été prêtés. Il y en avait d’abord trois : on n’en a vu que deux. On brode. Un esclandre est aussi une cérémonie. Votre commandant d’artillerie a carrément mis les pieds dans le plat, et devant des lanciers qui y buvaient du lait, comme les chats, sans se mouiller les moustaches. Ils allaient se conduire comme des charretiers quand on leur a fait remarquer qu’ils portaient des sabres. On parle de duel.
– J’y vais, dit Angelo. Ce n’est pas à lui de se battre, c’est à moi.
– Où irez-vous ?
– Chez cet artilleur. Il est peut-être à l’instant même blessé ou mort. On l’a certainement placé devant un roublard qui lui aura fait son affaire. Je n’ai qu’une qualité : c’est de savoir me servir d’un sabre. D’ici une demi-heure, il y a au moins un lancier qui n’aura pas du tout envie de rire. »
Il mit son manteau et il répéta cinq ou six fois de suite : « Cette maison a-t-elle une porte qui me permette de sortir sans vous compromettre ? » La dernière fois d’un ton si haut qu’il se fit honte à lui-même. Il posa sa question très gentiment.
« Et si c’était de nouveau un piège ? dit-elle.
– Il faudrait l’accepter, celui-là », dit-il.
Elle le conduisit au rez-de-chaussée où un couloir de communs donnait sur une petite ruelle. Elle ouvrit la porte et elle eut un très joli sourire. « J’aime les femmes, se dit-il. Elles comprennent tout. »
Il était de très bonne heure. La pluie et le vent couraient seuls les rues. Il marcha près de dix minutes, tête baissée avant de trouver un homme abrité sous un sac qui essayait de débonder un tuyau de descente bouché par les grêlons. Il lui demanda où logeait le commandant de l’artillerie. C’était chez un marchand de charpentes qui avait une fort belle maison à côté de ses entrepôts. Angelo frappa à la porte qui fut ouverte tout de suite par une servante très jeune, très effrayée et qui avait pleuré. Elle dit en reniflant entre chaque mot que le commandant était là ; qu’il n’était pas sorti.
« Rassure-toi, dit Angelo, je suis son ami. Mène-moi à sa chambre. »
Le commandant était en pantoufles. Il fumait sa pipe et il regarda Angelo d’un air ébahi.
« Je suis celui qui n’a pas tué le lancier et qui le regrette, dit Angelo. On m’a dit que vous deviez vous battre pour moi. Vous comprenez fort bien que, s’il s’agit d’expédier un des imprésarii du petit opéra bouffe d’hier, je veuille m’en charger moi-même.
– Je croyais qu’il n’y avait plus de Piémont, dit l’autre. Mettez-vous à votre aise et buvez le café avec moi. »
C’était un homme de petite taille, un peu corpulent mais robuste. Le bleu de ses yeux étonnait.
« Quand à prendre ma place, dit-il, vous pouvez vous brosser. Mes canonniers ne me le pardonneraient pas. Je suis loin d’être un novice. À force de nous voir avec des coupe-choux on se dit qu’une latte de cavalerie nous découpera facilement en rondelles. On va y trouver un os. D’ailleurs, le duel a été renvoyé à demain à cause du mauvais temps.
– C’est une malice, dit Angelo. On ne renvoie pas une affaire d’honneur. Je sais très bien ce que va faire votre adversaire aujourd’hui.
– Foutons-nous de ce qu’il va faire aujourd’hui ; je sais très bien ce que je ferai, moi, demain. Savez-vous ce que je me disais, une demi-heure avant que vous frappiez à ma porte ? On sait que vous êtes resté ici puisqu’on a passé les champs au peigne fin. Je me disais : si ce gaillard-là vaut quelque chose, tu le sauras. Si vous n’aviez rien valu, je me serais battu quand même, mais, maintenant, permettez, c’est du nanan. »
Il alla à la porte et appela doucement la servante. Elle devait le guetter, elle arriva tout de suite.
« Mon petit lapin, dit-il, va nous faire un grand pot de café. »
« Et voilà la voix d’un artilleur », se dit Angelo.
« Elle a l’air de bien vous aimer, dit-il.
– Annette ? C’est une chic petite fille. Je suis le bon papa pour elle. Elle est orpheline ; alors, elle fond.
– C’est la première fois que je vais laisser quelqu’un se battre à ma place, dit Angelo, mais, vous avez assez fait depuis un quart d’heure pour que je vous en reconnaisse le droit. Il y a cependant une chose que nous désirons tous les deux : c’est vivre, pour emmerder ceux qui veulent nous voir morts. Or, cela dépend simplement de quelques tours de poignet. Vous en connaissez neuf ; je dois en connaître dix. Il ne faut rien laisser au hasard. Faites dire à votre maître d’armes d’apporter deux sabres de cavalerie, je vous montrerai deux ou trois petites choses que les lanciers sont loin de soupçonner.
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On se livrait partout à des études de physionomie. Tous ceux qui avaient des traits remarquables ou un air étrange, tous ceux qui portaient les moustaches défendues ne pouvaient manquer d’être carbonari. On hasardait des signes de reconnaissance sans obtenir de réponse mais non sans trembler.
Cerutti s'aperçut aussi que ce qui aurait effrayé la police de Paris laissait la police de Turin parfaitement froide.

3104 – [Folio n° 1752, p. 38]
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Doria eut peur pendant dix ans de cette peur qu'on augmente tous les jours par des réflexions.
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