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sur 281 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
AU CHÂTEAU D'ARGOL de JULIEN GRACQ
Albert issu d'une famille riche et noble vient d'acheter le château d'Argol sans le visiter sur les recommandations d'un ami. En arrivant à pied il découvre les murs de grès bleu, le toit en terrasse, les fenêtres basses, un intérieur tout blanc, des couvertures jetées éparses, des tapisseries murales et des vitraux aux fenêtres. Un fort orage secoue la forêt de Storrvan qui entoure le château alors qu'Albert se promenait. En rentrant, il découvre un pli de son ami Herminien qui lui annonce sa visite avec Heide qu'Albert ne connaît pas. En attendant il reprend son étude sur Hegel, l'analyse de la chute de l'homme. Bonheur de retrouver Herminien et choc de découvrir Heide qui remplit à elle seule le château, la forêt et les environs, à peine terrestre, presque surnaturelle, chaque salle semble être commandée par sa voix. Il y a entre Herminien et Heide une sorte de reconnaissance mutuelle mais lorsque Heide et Albert vont monter sur la tour et qu'elle l'embrassera fougueusement, tout va se transformer.
Récit sans dialogue, attente d'une apparition merveilleuse, on baigne, dans ce premier roman de Gracq, en plein surréalisme, avec un héros marqué par Hegel qui attend la chute pour sa rédemption dans un paysage dont la description préfigure les drames. Impressionnante écriture.
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J'ai lu ce roman de Julien Gracq trois fois, au moins. C'est dire combien ce livre, par son mélange savamment pesé de mystère et de suspense, me fascine. Et le plus incroyable, c'est que je ne me lasse pas de relire certains passages, de temps à autres.
Trois personnages apparaissent, puis disparaissent, au fil du récit : Albert et Herminien, deux amis de longue date, appartenant tous deux à cette espèce fort rebutante que sont les philosophes (rires). Puis, entre ces deux-là s'immisce une certaine Heide qui, comme l'on pouvait s'y attendre, ne manquera pas de renverser l'ordre établi, à force d'affections et de baisers volés. La machine s'enraye, pour faire place à la Mort, titre du dernier chapitre du roman.

Ce n'est pas tant le canevas que je trouve merveilleux (d'ailleurs il n'a rien de si original), que la présence, surabondante, omniprésente, de la nature, ainsi que cette inépuisable variété dont le narrateur fait preuve pour décrire le lien instinctif qui lie le déchaînement des éléments à celui des passions. La rage de la tempête et celle des émotions ne m'ont jamais paru si bien concorder que sous la plume de Gracq. Quelle sensualité que celle de la Nature dans ce roman, nature qui est peut-être, en définitive, le seul véritable personnage.

Une pure merveille, et que je vous recommande chaleureusement ! :)
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C'est avec Au Château d'Argol que je découvrais la plume de Julien Gracq et, pour ainsi dire ... je trouve cela sublime! D'abord surpris par un style un peu mystérieux et envoûtant, l'oeuvre m'a totalement conquis comme les passions ont conquis nos trois personnages. On rentre de suite avec Herminien, Albert et Heide tout en gardant une certaine distance par le côté un peu surréaliste du roman. de ce fait, nous sommes balancés constamment entre le regard des personnages et celui de la nature même, qui occupe une place d'honneur dans l'oeuvre. En effet, le génie de Gracq a parfaitement réussi à faire ressentir aux lecteurs les sensations et les sentiments de notre trio rien que par les mouvements flous et parfois sombres de la nature environnant ce château si mystérieux et de son atmosphère parfois pesante. Bref, un chef d'oeuvre à découvrir sans hésitation!
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Sentir l'intensité de l'instant. Celui qui précède dans le cimetière de la lande rase, celui qui s'étire dans la tourmente nocturne de la tempête qui fait rage ou celui qui s'abandonne dans l'écume des vagues ou sur la mousse contre un arbre, proche de l'onde enténébrée, celui qui se perd dans les méandres d'un château habité plus qu'habitable :

« un esprit exercé ne pouvait voir là qu'un raffinement de la fatalité qui leur prodiguait ces traîtreux réconforts comme le vin mêlé d'épices et d'aromates dont on fortifie le corps des suppliciés pour redoubler en eux l'acuité de nouvelles tortures et leur en faire pénétrer jusqu'au fond les poignantes délices. Dans l'après-midi une torpeur que le soleil faisait peser sur les cours et les appartements du château annonçait à leurs nerfs aiguisés par l'attente le prélude d'un jeu mortel. »

Les ingrédients du roman gothique sont là : le château témoin d'une majesté passée isolé par l'insondable forêt, l'imminence d'un péril mortel, des lieux appesantis de solitude, «une horloge de fer [...] le bruit grinçant et régulier de son mécanisme, qui ne pouvait au milieu de ces solitudes se rapporter en quoi que ce fût pour l'âme à la mesure d'un temps vide en ces lieux de substance » – Baudelaire ou Poe ne sont jamais très loin – .

La beauté fatale de Hyde semble nouer l'intrigue. Herminien est son amant. A moins que ce ne soit Albert ? Peut-on croire à l'existence d'Herminien ? ou bien Albert et Herminien se confondent ? La sensualité de l'écriture – au sens premier du terme – rend certains passages d'un érotisme troublant, et le point de bascule vers l'insoutenable n'est pas toujours repérable au moment où il est franchi.

1938. Voilà, le premier roman de Gracq dont lui-même n'avait pas idée une heure avant de l'écrire, et pourtant. Tout ce qu'il développe plus tard est là. Les phrases à la respiration lente et le vocabulaire sophistiqués font de Gracq un auteur « à part » mais selon moi le trouble vertigineux dans lequel nous plonge ce roman fasciné en vaut la peine, comme une expérience de lecture elle aussi, à part.
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~ Géologiquement charnel ~

Il est des livres que l'on offre, comme une partie de soi donnée à l'autre. Comme un élan & une joie, une douce pensée. le bonheur simple & pur de partager, don d'amitié ou d'amour. Cependant mon ami m'a offert Gracq parce qu'il a détesté, et surtout pour s'en débarrasser !

Et moi, comme il l'avait prédit, j'ai aimé d'amour ce récit, où le temps complètement suspendu est témoin des formes & des regards, l'âme frémissante, onirique, j'oscille encore entre chimères & réalité !

Au château d'Argol je me suis posée & reposée, je me suis laissée porter par le son des vagues, fascinée par la forêt dense, gorgée de soleil et baignée de lune je suis encore !
Au château d'Argol, j'etais avec deux hommes & une femme en vase clos, celle-ci n'est qu'un objet, et moi qu'une indélicate voyeuse!
Au château d'Argol peut-être que les deux hommes ne forment qu'un seul, a la fois double et contraire. Un bien curieux triangle amoureux !

Pas d'intrigue, pas de dialogue, pas d'action, simplement des situations. Gracq a le phrasé fin, atemporel plus qu'intemporel, physique, mystique, magnétique, incarné & terricole
De l'intelligence du coeur, de l'esprit & de la langue.

Au château d'Argol est un chuchotement au creux de mon oreille. Une toute petite voix, minuscule, infime, qui prend toute la place, me ferme les yeux, m'ouvre le coeur. Et finit par gronder au fond de mon ventre.
Sans cesse ballottée entre confiance & defiance !
Au château d'Argol, je suis encore !
Il faut que vous y allez vous aussi !
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Amour et amitié intenses, forêt, grève et manoir bretons, attente et drame. Saisissante beauté.

Sur mon blog : http://charybde2.wordpress.com/2016/01/08/note-de-lecture-au-chateau-dargol-julien-gracq/

Lien : http://charybde2.wordpress.c..
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La lecture du Château d'Argol est en voyage dans mes souvenirs d'enfance, dans ces lieux qui m'oppressaient par leurs immensité, lenteur et silence. Décidément, Julien Gracq a(vait) la magie de l'écriture qui emprisonne le lecteur dans l'histoire qu'il raconte. A la fin, on retrouve le soleil, le coeur se libère de cette sujétion sourde, mais tellement heureux d'avoir lu ce court roman (moins de 200 pages). Que dire du plaisir sensuel de libérer les pages, non massicotées, à la lecture ? Je ne sais pas si les dernières éditions de ces oeuvres ont su conserver cette originalité suprême.
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Au Château d'Argol /Julien Gracq
Albert sur le conseil avisé de son meilleur ami vient d'acheter sans l'avoir jamais visité le petit château d'Argol en Bretagne et tandis qu'il chemine lentement sur le sentier tortueux y menant, il savoure étrangement l'angoisse naturelle du hasard.
Albert est le dernier rejeton d'une famille noble et riche et a vécu toute son enfance entre les murs solitaires d'un manoir de province. le démon de la connaissance s'est rendu maître depuis longtemps de cet esprit curieux. Figure angélique et méditative faite pour pénétrer les arcanes les plus subtils de la vie, il passe pour dédaigner les femmes et consacre son temps à la recherche philosophique. Hegel est son idole.
le château se dresse à l'extrémité d'un éperon rocheux et domine une solitude sylvestre tout alentour qui parait à Albert triste et sauvage telle un bois dormant dont la tranquillité absolue étreint son âme. Dès la visite intérieure il remarque que la plus grande partie des salles et les aîtres en général semblent dépourvus de toute destination précise et lui procurent une sensation bizarre de malaise, simplement meublés de cathèdres de chêne. le sol est jonché de fourrures en abondance d'once et d'ours blanc.
le chapitre descriptif évoquant le château et son environnement est sublimement écrit par Julien Gracq dont on ne vante plus la qualité et la beauté inégalées du style.
Peu à peu une ambiance de vacances s'installe et Albert se laisse aller au charme de cette demeure étrange tout en se consacrant à la logique hégelienne, la Bretagne lui prodiguant toutefois ses séductions pauvres, ses fleurs humiliées, ses genêts, ses ajoncs, ses bruyères couvrant les landes.
Surviennent deux visiteurs attendus, Herminien son ami le plus cher qui étonne toujours par une singulière aptitude à percer à jour les mobiles les plus troubles de la conduite humaine, et une certaine Heide qui en une seconde peuple tout le château de sa radieuse et absorbante beauté. Albert ignore tout de la nature des rapports entre Herminien et Heide. Et il va aller de surprise en surprise quand Heide s'approche de lui…
« Les solitudes qui environnaient le château se refermèrent vigilantes sur les hôtes dont le séjour parut très vite devoir revêtir une durée indéfinie… »
Confortablement installée Heide « se repaissait avec une inconscience animale de l'air vif et exaltant et de la pureté des eaux vives », avec Albert en point de mire paraissant revêtir une robe de fraîcheur et d'innocence.
La présence d'Albert lui semble s'élargir aux limites extrêmes de son domaine enchanté après que le premier soir sur la terrasse elle lui a donné un baiser dont l'audace la plonge encore dans une parfaite stupéfaction.
Une force irrépressible pousse Heide et Albert l'un vers l'autre, Heide s'abandonnant comme une esclave soumise, « élevant vers lui comme une prière les trésors d'un corps qui lui est entièrement dévoué. » Mais Albert, insensible , méprise un triomphe pour lequel il n'a pas combattu tandis qu'Herminien espionne la belle séductrice suivant de l'oeil et de la pensée chacun de ses pas et s'interroge , ignorant la pauvreté extrême des sentiments d'Albert pour Heide, livré qu'il est chaque soir à une imagination destructrice.
L'hallucinante séquence du bain de mer à trois, nus, est révélateur de ce jusqu'où sont capables d'aller dans l'autodestruction les trois personnages.
Puis vinrent les jours de longues pluies bretonnes s'abattant sur Argol frappant d'un lourd désoeuvrement les hôtes du château, la parole se faisant rare et peu significative. On s'évitait avec persistance, le malaise planait… Lorsque réapparurent les rayons du soleil ouvrant toute grande la forêt et ses embûches aux trois hôtes d'Argol, Albert solitaire s'enfonça dans les halliers bordant le ruisseau et allongé glissa dans une profonde rêverie avec cependant la sensation indéfinissable et prochaine d'un danger…L'enchantement avait disparu et soudain il crut voir l'impensable au bord du ruisselet. Fantasme ou réalité ?
La mort rôde autour du château et même dans le château et tout trois vont y être confrontés dans un final assez violent, la haine alternant avec l'amour, avec le thème de Parsifal en toile de fond.
Ce roman surréaliste paru en 1938 est le premier du genre et le premier roman de Julien Gracq. Et déjà le style extrêmement travaillé et poétique fait merveille tout au long de ce dédale de situations étranges et surprenantes et préfigure la vague gothique. La violence des sentiments est rarement explicite et le lecteur devra lire entre les lignes de ce qui est suggéré. de longues descriptions en harmonie avec les sentiments des personnages parcourent ce récit au caractère onirique. Pas de dialogue . Sont ici posées les premières pierres qui permettront l'écriture du Rivage des Syrtes dix ans plus tard, le chef d'oeuvre de Julien Gracq.



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Passé l' "avis au lecteur", ce livre est d'une puissance forte. Il tient en tension le lecteur par de longues phrases très travaillées et poétiques au service de descriptions exceptionnelles de la nature et de minuscules incidents qui font toute l'intrigue du livre. Il ne faut pas s'attendre à une intrigue folle et à des personnages bien définis mais se laisser embarquer dans les mystères du château d'Argol.
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Narration neo - romantique " noire " , et exploration narrative du Néo - Tragique contemporain Hégélien : unité des contraires , et differenciation radicale de ces mêmes contraires , antagonisme du point de leur écart differentiel.

Dialecticité et négativité aux prises avec l ' inconscient , inconscient collectif ( le décor archéo - historique monumental d' Étrangeté Dépaysante , traces matérielles d' une énigme ou d' un mystere de relations historiques factuelles et soustraites ) et inconscient groupusculaire ( le trio des jeunes " activistes ", à l ' Échangisme fusionel rendu " impossible " , par leur subjectivation propre , et réciproque ) , la dialectique retorse de leur vis - à - vis en miroir pour chacun, ( le groupe et le Site ).

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