Omniprésents en bande-dessinée et au cinéma, les super-héros demeurent inexplicablement absents des pages de nos romans, une lacune qu'
Austin Grossman, journaliste et designer de jeux vidéo américain, se charge de combler en partie avec
Un jour je serai invincible.
CoreFire, le plus puissant et le plus populaire des super-héros (plus ou moins l'équivalent de Superman) est porté disparu. Ses confrères soupçonnent aussitôt le Docteur Impossible, son éternel rival, l'individu le plus intelligent du monde (rappelant bien sûr Lex Luthor). Grâce à l'alternance de chapitres consacrés aux aventures des "méchants" puis des "gentils", nous pénétrons ainsi successivement dans l'esprit de Docteur Impossible, puis de Fatale, une jeune femme ordinaire qui à la suite d'un terrible accident a été changée en cyborg destiné à combattre dans le camp du bien...
Si le menu est alléchant, le résultat n'est pas exempt de défauts qui empêchent ce roman d'être une véritable réussite. La narration est souvent confuse, notamment du fait d'incessants flashbacks et autres digressions. Les scènes d'action, en particulier les combats, se révèlent peu palpitantes. Enfin l'intrigue n'a pas grand intérêt en elle-même, et sert surtout de prétexte à la présentation d'une foule de super-héros et de super-vilains, chacun se singularisant par une apparence, des pouvoirs, des origines, exposés avec une grande précision. On sent que l'auteur s'est amusé en inventant ces personnages, à la fois différents des célèbres créations Marvel et DC, et tout à fait cohérents en tant que super-héros. C'est clairement l'un des atouts de ce roman.
Mais au bout du compte, le meilleur argument en faveur de
Un jour je serai invincible est d'appartenir à un genre sous-représenté, a fortiori en langue française, et donc de constituer un passage quasi obligé pour l'amateur de super-héros désirant aller au-delà des comics et des blockbusters hollywoodiens. Dans cette optique, il s'agit peut-être du roman le plus proche, dans son esprit, des comics traditionnels, par rapport à des oeuvres plus psychologiques (Comment je suis devenu super-héros), satiriques (La vie sexuelle des super-héros) ou parodiques (Medieval Superheroes).
Pour finir, la comparaison avec Watchmen apparaissant en quatrième de couverture semble présomptueuse au premier abord, et n'est évidemment qu'une promesse non tenue car impossible à tenir... Mais qui pouvait en douter ?