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sur 2441 notes
On ne sort pas indemne d'une telle plongée en enfer.

Affronter l'histoire de l'ange de la mort d'Auschwitz, c'est comme regarder le diable en face, le mal absolu, la négation de l'Homme. J'ai pensé très fort à ceux qui l'ont croisé, pour leur plus grand malheur, Violette en particulier, tous ceux qui ne sont plus là maintenant pour témoigner.

Olivier Guez nous emmène à la chasse au nazi dans l'Amérique du sud complaisante de l'après guerre où se cache le sinistre Mengele, mais aussi un nombre impressionnant de ses compatriotes, dont Barbie ou Eichmann. Il nous détaille réseaux et complicités. Mengele s'est abrité derrière ce mur de solidarité et de silence et a survécu grâce à l'armée d'avocats et la fortune de sa famille dans des dictatures peu regardantes. Incroyable qu'il ait pu revenir se balader en Europe et visiter ses parents !

L'auteur nous livre ce récit avec un style dépouillé et une structure simple. Il est précis sur les faits et la seule concession faite au romancier c'est quand Il entre dans le cerveau de son personnage arrogant, dépourvu d'émotion et de regret seulement préoccupé de sa personne, imbu de lui-même.

c'est la chronique de l'inhumanité incarnée, un discours raciste porté jusqu'à la tombe, la rencontre entre une idéologie mortifère et un psychopathe, un homme froid qui ne se réfugie pas dans l'excuse de l'obéissance aux ordres.

Inquiétant que personne n'ait songé à trahir quelqu'un de si détestable. Ces ambiguïtés et ces silences en disent long sur les fidélités fondées sur des convictions partagées. le Mal n'est peut-être qu'endormi…

Les contingences géopolitiques, la guerre froide, puis les conflits du Proche Orient, ont ralenti la justice internationale, et Mengele est mort bêtement à la plage . Toutefois, s'il n'a pas été jugé comme Eichmann, il a vécu dans une prison à ciel ouvert, de plus en plus mal au fur et à mesure de ses changements d'identité, misérable paranoïaque se brouillant avec tout le monde, ressassant son passé et justifiant ses crimes.

Les prix littéraires me laissent perplexe la plupart du temps, je ne vois pas trop les raisons de leur subite promotion. Pour ce récit simple et fort, j'approuve le choix du jury. Au moment où des nazis entrent au Bundestag, Olivier Guez interpelle notre présent à la lumière d'un passé terrible.

Méfions nous, les vieux démons mutent comme les virus, leurs habits neufs ne sont que des leurres.

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Josef Mengele est souvent considéré comme l'un des pires criminels nazis, « le symbole de la cruauté nazie », pour le président du tribunal de Yad Vashem, le procureur général du procès d'Eichmann. Un tortionnaire de la pire espèce qui, comme Klaus Barbie et beaucoup d'autres, a bénéficié d'aides et de complicités pour se cacher en Amérique latine. A commencer par celle de l'argentin Peron, favorable aux nazis, qui rêvait pour son pays d'une destinée exceptionnelle, quand les Soviétiques et les Américains se seraient anéantis à coups de bombes atomiques.

Mengele a aussi été soutenu financièrement par sa famille, des riches industriels de Günzburg en Bavière qui ne souhaitaient pas qu'il soit arrêté parce qu'ils risquaient d'être associés à lui. Mais après une période relativement sereine, Mengele a vécu constamment sur le qui vive, dans la peur d'être pris et jugé, et probablement exécuté comme Eichmann qu'il a croisé dans son exil. Car Mengele est surtout un lâche, un sociopathe narcissique et paranoïaque dont la monstruosité s'est épanouie avec la guerre.

Mais tout ça, on le sait plus ou moins, alors pourquoi écrire encore un livre, un roman de surcroît, sur un criminel nazi ? On espère pour les bonnes raisons. Pour ne pas oublier. Pour que ça ne recommence jamais. Pour rendre hommage aux victimes de Mengele et à leurs familles parce qu'il n'y a pas eu de procès pour leur donner la parole, " un procès nécessaire pour analyser L Histoire et l'assumer pour le présent " comme l'a écrit le Die Ziet après le procès Barbie.
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Josef Mengele était médecin dans le camp d'extermination d'Auschwitz. Ce chercheur zélé affectionnait particulièrement les expériences sur les jumeaux et les nains. Il collectionnait les yeux bleus, qu'il épinglait tels des papillons sur les murs de son bureau.
Comme de nombreux criminels nazis, Mengele est parti se cacher en Amérique du Sud après la guerre, où il a bénéficié du soutien de pairs également en exil, et de l'aide financière de sa famille - des riches industriels - restée en Allemagne.
Comment et pourquoi, à la fin des années 40, le gouvernement argentin acceptait de recueillir ces hommes et éventuellement leurs proches, leur épargnant ainsi les procès qu'ils auraient dû affronter en Europe ?

Olivier Guez explique cela dans cette biographie romancée parfaitement documentée, en exposant le contexte politique argentin : dans sa mégalomanie, Juan Perón entendait profiter de la Guerre froide qui opposait l'est et l'ouest pour tirer son épingle du jeu et créer un IVe Reich, aidé en cela par de jeunes et fringants fascistes, brillants scientifiques, issus d'Allemagne ou d'Italie, et dont le bel avenir promis en Europe avait été fauché en plein vol...

J'ai parfois peiné dans ma lecture, le contexte géopolitique est assez complexe (Guerre froide, conflit israélo-palestinien), d'autant que les personnages sont nombreux (noms allemands, et parfois plusieurs pseudonymes pour un même individu)... Quoi qu'il en soit, le portrait de ce criminel en fuite lâche et geignard est saisissant. On espère que sa frousse et sa paranoïa croissantes l'ont autant torturé qu'un procès et quelques années de détention ? Car des remords, il ne semble pas en avoir eus...

Parfois ardu, mais passionnant.
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L'humanité génère et recèle de ces monstres qui font vaciller notre raison et notre espoir. Ceux-ci croissent et prospèrent, souvent dans les périodes d'instabilité et de cahot, puis disparaissent dans la fuite et la mort.
Joseph Mengele était de ces rebuts dégénérés à qui le nazisme avait offert un champ inespéré d'expérimentation de l'horreur et du mal absolu.
Olivier Guez fait le récit détaillé et passionnant, même si romancé, de la course du monstre déchu et chassé... Aidé dans sa fuite par des gouvernements sud-américains d'une écoeurante complaisance, une famille complice d'ignominie et des réseaux pilotés par les nazis et leurs affidés. du beau linge sale à l'odeur pestilentielle des charniers humains de le seconde guerre mondiale. Pouah!
Au moins, Mengele a-t-il connu la peur abjecte du fugitif et la terreur de tomber entre les mains du Mossad et des chasseurs de prime!... Malade d'avoir bouffé sa moustache de trouille, un comble pour ce démon de la rampe d'Auschwitz.
L'humanité génère et recèle de ces monstres qui font vaciller notre raison et notre espoir. À nous de les empêcher de nuire lorsque c'est encore possible, mais aussi de ne jamais les oublier ni eux ni leurs forfaits. de ne pas oublier, non plus, le cahot et le désespoir qui ont permis leurs exactions. Yougoslavie et Rwanda ne sont pas si loin, qui sont venus nous rappeler l'horreur toujours aux aguets.
Votre livre, Olivier Guez, m'a fait serrer les poings et m'a étreint le coeur. Ne pas oublier est à ce prix et je ne saurai trop vous en remercier.
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Olivier Guez nous propose ici de découvrir comment Mengele a disparu des écrans radars à la fin de la guerre.

Il nous parle de sa deuxième vie en exil, tout en la reliant avec le passé, la décryptant à la lumière des évènements de sa première vie dans l'Allemagne nazie, car les deux sont intriquées, imbriquées, l'une expliquant l'autre.

On approfondit le rôle joué par Perón, et d'autres dictateurs d'Amérique du Sud, tel Stroessner au Paraguay. Perón recueille tous les nazis et comparses, « veille personnellement au déroulement de la grande évasion », constituant « un Quatrième Reich fantôme » (P 39 à 41)

Il pense que la guerre froide va dégénérer et que la troisième guerre mondiale est proche, donc il a toutes les cartes en mains pour tenir le monde….

Mengele vit comme un roi à Buenos Aires alors que l'entreprise familiale, à Günzburg, prospère allègrement, réjouissant l'économie allemande, sans jamais être inquiétée, elle emploie tellement de salariés…

Mais la vie de château ne dure qu'un temps, les consciences s'éveillent et la chasse aux nazis commence, avec Eichmann notamment. Il doit fuir au Paraguay, puis au Brésil. Lui qui a terrorisé tant de déportés, tremble à l'idée d'être découvert, le moindre bruit le fait sursauter, il se cache dans des maisons de plus en plus précaires, va jusqu'à se faire construire un blockhaus, d'où il regarde au loin avec ses jumelles pendant des heures. Il est surarmé, se déplace avec une meute de chiens dressés évidemment.

Ce mec (désolée, je ne peux pas dire cet homme, tant il est abject) est vraiment un minable qui manipule tout le monde, y compris ses proches, passe son temps à se plaindre et à gémir, demande de l'argent à tout le monde : famille, autres exilés… son comportement avec son fils est révoltant…

Il est dans le déni : Auschwitz était un camp de travail et il veillait au bon fonctionnement, fier de sa mission. Il n'a rien fait de mal donc pourquoi se sentirait-il coupable ? Voici ce qu'il pense au moment de l'arrestation d'Eichmann selon Olivier Guez :

« Honte aux Allemands, ramassis de mauviettes et de lâches, nation de boutiquiers médiocres aveulis par des dirigeants de pacotille, vendus aux plus offrants, aux marchands du temple : ils ont lâché Eichmann ! ils lui ont tiré une balle dans le dos, alors qu'il n'avait fait que son devoir et que nous nous étions contentés d'obéir aux ordres, au nom de l'Allemagne, pour l'Allemagne, pour la grandeur de notre chère patrie. » P 137

Jamais, pas une seule seconde il n'éprouve le moindre regret, la moindre compassion, pour les êtres qu'il a envoyé à la mort, torturé pour ses pseudo expériences scientifiques, et il ne renoncera jamais à son rêve d'une race aryenne pure, ni à son führer bien-aimé.

Il va se comporter de façon abjecte, dans les actes comme dans la pensée, jusqu'à la fin, et pas une seconde, en lisant ce roman, je n'ai éprouvé la moindre compassion pour lui. Je me demanderai toujours comment des médecins peuvent faire des choses aussi abominables au nom de la science…

Olivier Guez cite, au passage, des extraits particulièrement émouvants du livre de Nyizli, qui fut « le scalpel de Mengele », publié sous le titre « Médecin à Auschwitz ».

Le style est percutant, le livre bien documenté, avec une bibliographie très intéressante si l'on veut en apprendre davantage. Ce roman se dévore.
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Avec beaucoup de sobriété et de pudeur, Olivier Guez relate un pan de l'histoire qu'est la traque du pire criminel nazi, aux monstruosités sans limite. Josef Mengele.
Pourquoi écrire un roman sur sa disparition ? Si ce n'est pour rester sur ses gardes et méfiants envers les hommes toujours capables du pire.
Josef Mengele échappera à son procès, aux crachats qu'il aurait mérités, il n'aura de cesse de fuir avec l'aide et la protection de sa famille d'une part et de plusieurs acolytes inconscients. Si Mengele échappera au jugement dans un tribunal, échappera aux regrets et remords, il sera hanté par la solitude et démoli par l'ascension d'un monde enclin à plus d'humanité, aux droits des hommes, dans une rébellion et intolérance face aux horreurs de la seconde guerre. Mengele devra vivre avec un temps résolu et constater qu'il est de plus en plus seul. Abandonné de tous, ce monstre restera monstre prisonnier de ses convictions patriotiques au coeur de pierre.
On ne refera pas l'histoire mais ne pas oublier est primordial pour éviter les mêmes erreurs. Méfiance, méfiance...
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Roman historique sur le célèbre médecin tortionnaire nazi du camp d'Auschwitz.

Ce roman qui a obtenu le prix Renaudot est très agréable à lire et nous offre sous le format d'un roman la fuite de cet homme traqué en Amérique du Sud après la chute du Nazisme en Europe.

On suit ici la misérable et solitaire descente aux enfers de cette ancienne gloire du Nazisme; la loi universelle qui dit que l'on finit toujours par payer ce que l'on sème se vérifie bien ici aussi.
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Ecriture remarquable, ironie et causticité.
Je ne parle pas de Josef Mengele, tout le monde l'aura compris, mais de l'auteur du « roman » sur sa vie après Auschwitz.
Oui, des gens ont eu une vie après Auschwitz, principalement les SS...


Une belle vie ?
Qui pourrait dire qu'être traqué, devoir se cacher perpétuellement, avoir peur d'être reconnu, ne pas oser être pris en photo, être séparé de sa famille, être renié par certains de ses amis, dépendre de la bonne volonté de personnes « gentilles » ou admiratrices, c'est une belle vie ?
Mais en fait, on ne le plaint pas, n'est-ce pas ? On se dit : « Bien fait pour lui ! » (Pour tout renseignement concernant les tortures sous le couvert d'expérimentations qu'il a fait subir aux prisonniers d'Auswchitz, prière de se reporter à des sites d'Histoire. Moi, je n'en dirai pas un mot, c'est impossible ; Guez ne s'est pas répandu outre mesure non plus, ce n'était pas son propos).


De l'Argentine, « l'ange de la mort » a fui au Paraguay lorsque les amitiés politiques ont changé, et puis au Brésil, où il est mort en 1979.
Et c'est cette fuite perpétuelle qui est narrée ici principalement. Cette fuite qui n'aurait pas pu s'opérer sans complicités, bien entendu.
J'ai été effarée par le nombre de SS et de sympathisants en Amérique latine ayant pignon sur rue dans les premières années après la guerre, mais au fur et à mesure du temps qui passe et de l'opinion conscientisée, grâce notamment à la traque par le Mossad, agence de renseignements israélienne, les SS se font nettement moins démonstratifs !
Et Mengele est, de toute façon, tout sauf démonstratif. Egocentrique mais timoré, cruel et vindicatif mais plaintif quand il s'agit de parler de lui, ne reniant rien mais replié sur lui-même et son abominable secret, Mengele est abject.


Je suis contente d'en avoir fini avec ce livre, car l'auteur, même s'il traite son oeuvre de « roman », a conté la vérité.
Et cette vérité, au fil des pages, je la vomis.
C'est le but de l'auteur, non ? Il a réussi tout à fait sa traque, lui, il a atteint et tué Mengele dans son intimité.
Car les autres n'ont jamais pu le dénicher vivant, même s'il est mort honni de tous, sur une plage. Ses os ont servi, des années après, à des expériences scientifiques. Farce macabre du destin ! On n'en finira jamais avec la mort quand il s'agit de Mengele...
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Sur les traces de l'un des plus fameux criminels nazis, Olivier Guez produit un roman plus proche du travail d'investigation que de la fiction. Si l'auteur s'autorise une interprétation du personnage, les faits sont eux parfaitement documentés et reconstituent au plus près la fuite en Amérique du Sud et la traque.

La lecture est ainsi addictive, telle serait celle d'un thriller avec un "héros" nauséabond. le triste Sire s'impose dans toute sa pathologie de folie, de violence, de rancoeurs et d'auto apitoiement. Ses années de fuite éclairent ce que l'histoire a déjà retenu: la complaisance du régime des Perón pour la communauté nazie qui se reconstitue en Argentine, les années confortables pour d'improbables individus qui refont leur vie, remontent des affaires, délirent de projets de reconquête, sans jamais être capables de se remettre en question et faire quête de rédemption.

Bien légitime ensuite qu'ils vivent une cavale sans fin, en reclus et bêtes traquées.
Et c'est là le meilleur du roman, cette capacité à être dans les basques et la tête du fugitif, d'attendre la chute, alors que se développe le mythe d'un insaisissable personnage.
Au-delà de l'individu, il est intéressant aussi de comprendre les difficiles circonvolutions des recherches, au fil des contraintes géopolitiques et diplomatiques.

Une continuité d'intérêt pour moi qui ai beaucoup apprécié le film "Fritz Bauer, un héros allemand" (2016) sur le parcours du juge/procureur, infatigable traqueur de criminels nazis.
Olivier Guez en était le co-scénariste et ce roman est la suite logique de son travail de réflexion sur cette page dramatique de l'histoire de l'Europe.

Dérangeant, captivant, remarquable.
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Des faits, des faits, rien que des faits. le roman d'olivier Guez est un récit richement documenté sur la fuite du "boucher d'Auschwitz" en Amérique du sud et sa déconfiture totale. L'écriture est concentrée, dense, claire, aucune fioriture. le rythme est haletant. Un livre très bien écrit qui participe parfaitement au devoir de mémoire et nous rappelle que si des gens aussi malfaisants ont pu exister dans le passé, notre société est capable d'en fabriquer de nouveaux et à l'identique. Restons vigilants !
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