Bon, je sais, vous allez penser : de quoi il se mêle celui-là ? Auquel cas je serai obligé de répondre que j'ai subrepticement dérobé ce livre pour ne pas être pris en flagrant délit... Cela me rappelle ma jeunesse au siècle dernier et certaines cassettes...
On commence donc ce livre avec des phrases amusantes après la période que nous venons de vivre : « La médecine et l'anatomie n'ont jamais été des sciences stables: elles sont influencées par des facteurs socioculturels, économiques et politiques. ». J'oserai questionner : est-ce alors complètement de la science ?
En tout cas, j'avoue avoir été surpris de peu de connaissances académiques autour de l'organe féminin sujet de ce livre. C'est à peine croyable d'être si mal être informé de cette partie d'anatomie jusqu'aux mots qui s'y rattachent : éjaculation, orgasme, clitoris, vagin, urètre, prostate.
Le préliminaire est ici culturel puisqu'on commence avec la Chine et la place occupée par l'acte sexuel dans la culture et les écrits : « Pour que l'homme et la femme puissent s'unir en toute harmonie, l'homme doit apprendre à «lire» le plaisir de la femme. Les textes chinois anciens décrivent jusqu'à la moindre de ses réactions sexuelles et indiquent précisément à l'homme comment réagir à quels signes. ». L'auteure cite de nombreux textes qui gagneraient peut être (si ce n'est déjà fait) à être traduits en français : Fleur en fiole d'or, Femmes derrière un voile...
Le voyage continue en Inde, où on apprend qu'en sanskrit, un seul et même mot, śukra, désigne l'éjaculat masculin et féminin. Kamasutra, Kāmashāstra (manuels d'érotologie ) Bouddhisme tantrique ...
On s'approche ensuite : antiquité... un début d'explication pour notre civilisation gréco-romaine (désolé pour les autres) : « le désir et le plaisir sexuels de la femme n'y jouent plus qu'un rôle négligeable, et par conséquent la semence féminine ne jouit pas de la même considération que les fluides sexuels féminins dans les textes anciens chinois et indiens. »
La femme devient alors une version imparfaite de l'homme, puis avec l'avènement de la chrétienté, elle est essentiellement là pour procréer. Il est vrai que les livres érotiques (L'École des filles ou La philosophie des dames) existent également mais on les cache, on les brûle...
Au 19ème les mots se précisent pour nommer l'éjaculation féminine : «pollutions» que certains médecins identifient comme un symptôme de l'hystérie.
Moriz Rosenthal dans son «
Traité clinique des maladies du système nerveux », ouvrage de « référence » traduit partout, consacre un chapitre entier à l'hystérie la «plus mystérieuse parmi toutes les maladies des femmes et leurs troubles nerveux». C'est à lui que l'on doit l'ajout aux signes cliniques de l'hystérie la fameuse pollution nocturne. Décidément, les viennois...
On rappelle que la théorie psychanalytique de M.
Sigmund Freud tend à considérer la femme comme un être masculin incomplet, un homme castré.
Il faut attendre en gros 1978 pour étudier sérieusement la prostate féminine, le clitoris, l'urètre et le lecteur sera surpris d'apprendre qu'aujourd'hui, avec toute la technologie d'investigation dont nous disposons (scanners, IRM, échographie etc...) subsiste une telle incertitude de représentation autour de cet organe féminin par excellence.
« En 1998, Helen O'Connell publie dans la revue Journal of Urology les résultats de ses recherches sur l'anatomie du clitoris et montre que le clitoris est bien plus qu'un «petit bouton de chair». Il s'agit au contraire d'un organe érectile complexe qui, au-delà de sa partie visible, la perle, se prolonge à l'intérieur du corps et est étroitement lié au vagin et à l'urètre. O'Connell explique que les manuels d'anatomie, même récents, ainsi que la plupart des articles scientifiques, décrivent le clitoris de manière imprécise, incomplète ou carrément fausse »
On s'interroge... On apprend en passant que des organismes sont chargés de définir la dénomination exacte des organes : l'International Federation of Associations of Anatomists (IFAA), établit ainsi une terminologie médicale unifiée à l'échelle internationale. L'une de ses extensions le Federative International Committee for Anatomical Terminology (FICAT), décide seulement en 2001, d'inclure la notion de «prostate féminine» dans la nouvelle édition de sa Histological Terminology.
Enfin, la dernière partie est résolument sociétale (et plutôt étasunienne) et insiste sur tous les aspects du plaisir sexuel féminin, allant jusqu'au porno qui mise à fond sur cette redécouverte.
Il est temps pour moi de rendre ce livre aussi discrètement que je l'ai emprunté, au moins ai-je l'impression d'avoir appris quelque chose. Mais il ne faut pas l'ébruiter...