Postez-vous à la sortie d'un lycée et observez la jeune génération. Constatez en particulier son addiction aux appareils connectés. Chacun les yeux rivés sur la petite boite lumineuse, ignorant jusqu'à son voisin immédiat. Vous pourrez alors vous convaincre du bien fondé de l'allégation de
Yuval Noah Harari lorsqu'il affirme dans cet ouvrage :
Homo deus, une brève histoire de l'avenir, que la nouvelle religion qui va couvrir le monde ne sera aucune de celles qui ont prévalu jusqu'alors. Cette nouvelle religion, il la désigne sous le nouveau vocable de dataïsme, la religion de la data, de la donnée. C'est elle qui gouvernera les esprits, enfermera homo sapiens dans sa dépendance.
Depuis qu'il a pris le pas sur tout autre forme de vie, Homo sapiens se trouve face à lui-même. Qui plus est, famine, épidémies et guerres, les fléaux qui le menaçaient jusqu'au seuil du XXIème siècle, doivent, selon
Yuval Noah Harari, être conjugués à l'imparfait. Estimant que leur impact ne représente désormais plus une menace d'extinction pour l'espèce.
Après avoir perdu quelque fierté d'appartenir à l'espèce à la lecture de Homo
sapiens, une brève histoire de l'humanité, je m'étais fait une curiosité, sinon un devoir, de vérifier si l'historien visionnaire me donnerait confiance en l'avenir. J'ai donc lu
Homo deus, une brève histoire de l'avenir.
Avant de transcrire mon sentiment sur les lendemains que nous propose l'auteur, je ne peux que saluer la puissance intellectuelle et la force de conception du personnage. le pouvoir de persuasion aussi, tant l'argumentation développée dans son ouvrage est fouillée, les références nombreuses et vérifiables. Et au final, le résultat fait froid dans le dos d'Homo sapiens. Ce dernier pourrait bien en effet, selon les projections faites par l'auteur, trouver son maître, si ce n'est son nouvel esclavagiste.
Selon
Yuval Noah Harari, l'homme n'est à la base qu'un algorithme. On ne peut lui prêter d'autonomie de raisonnement. Tout ce qu'il pense, fait, ressent, ne relève que de calculs prédéterminés et non de son libre arbitre. L'assertion trouvera certainement ses détracteurs. Elle procurera aussi une déconvenue à la mesure de leur ego à tous ceux qui sont convaincus de charisme et d'ascendant personnel sur leurs semblables.
Le postulat étant énoncé, l'auteur s'empresse d'enfoncer le clou dans le crâne d'Homo sapiens en lui assénant le fait que cette conformation nihiliste de conscience et d'esprit sera aussi celle qui le perdra. La machine va s'emballer, l'algorithme va surpasser son initiateur inconscient, se nourrir de lui-même, pirater son géniteur et l'accaparer dans sa dépendance. La déconnection sera synonyme de mort ; plus d'existence possible en dehors de la bulle d'information. Essayez d'ores et déjà de retirer son smartphone à un adolescent. La panique s'empare de lui.
La disparition d'Homo sapiens en tant qu'individu est en cela consentie puisqu'il fait dès à présent consciemment don de sa vie privée au profit du grand maelström d'un réseau connecté global, "l'Internet-de-tous-les-objets", dont l'ambition va même bien au-delà de l'échelle planétaire, à la conquête de l'univers. "Les hommes veulent se fondre dans le flux de données parce que, lorsque vous en faites partie, vous appartenez à quelque chose de bien plus grand que vous."
Dieu est en tout être et en toute chose nous disaient les religions en vogue jusqu'alors. Homo sapiens va se fondre en toute chose dans la bulle de données. Homo sapiens va donc devenir Homo deus. La boucle est bouclée.
S'agissant de l'avenir d'Homo sapiens, je m'attendais à voir évoqué surpopulation de la planète, réchauffement climatique et autres calamités que nous vaudra notre course effrénée vers le toujours plus sur une planète qui elle ses limites, et toujours moins quant à ses ressources. Rien de tout cela. C'est le monstre de l'information qui va se repaître de notre individualité.
Yuval Noah Harari prend toutefois la précaution de rassurer son lecteur devenu perplexe, voire alarmé, en lui précisant qu'il n'a jamais été plus difficile d'envisager l'avenir que de nos jours où tout évolue trop vite, si bien que : "Tous les scenarios écrits dans ce livre doivent être compris comme des possibilités, non comme des prophéties". Ouf !
Alors si l'humanisme est la notion qui selon l'auteur a fait évoluer le monde dans le sens où il va mieux aujourd'hui qu'hier, il est encore temps de continuer à nous parler pour nous comprendre. Car vers l'avenir que j'ai entr'aperçu dans
Homo deus une brève histoire de l'avenir, je n'ai pas vraiment envie d'y aller. Je m'en confie à mes amis de Babelio.
Alors plus que jamais CARPE DIEM !