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Citations sur Le Mur invisible (228)

Pour la première fois de ma vie je me sentais apaisée, non pas contente ou heureuse, mais apaisée. Cela avait un rapport avec les étoiles et c'était en définitive parce qu'elles existaient vraiment. Pourquoi il en était ainsi, je n'en savais rien. Mais c'était ainsi.
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Tant de choses s'étaient passées depuis quelque temps. Perle avait été tuée, un petit taureau était né, la chatte avait trouvé un chat, des chevreuils étaient morts de froid et les bêtes de proie avaient eu un hiver opulent. Quant à moi, j'avais éprouvé tant d'émotions que je me sentais épuisée. Je restais couchée sur le banc et, les yeux fermés, je voyais à l'horizon des montagnes enneigées et des flocons blancs qui descendaient sur mon visage dans un grand silence lumineux. Il n'existait plus ni pensée, ni souvenir rien que la vaste et silencieuse lumière de la neige. Je savais que de telles images sont dangereuses pour quelqu'un de solitaire, mais je ne trouvais pas la force de lutter contre elles.
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Depuis sa mort je rêve souvent d’animaux. Ils me parlent comme des humains et dans mes rêves cela me semble tout naturel. Les gens qui peuplaient mes nuits pendant le premier hiver ont complètement disparu. Je ne les vois plus jamais. Ils ne se montraient pas particulièrement aimables dans ces rêves, alors que les animaux y sont amicaux et plein d’entrain. Mais à la réflexion il n’y a là rien d’étonnant, cela montre tout au plus ce que j’ai toujours attendu des hommes et ce que j’ai toujours attendu des animaux.
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Ce n'est pas que je redoute de devenir un animal, cela ne serait pas si terrible, ce qui est terrible c'est qu'un homme ne peut jamais devenir un animal, il passe à côté de l'animalité pour sombrer dans l'abîme.
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C'est peut-être le chien qui est responsable de la folie de grandeur de l'homme. Même à moi, il m'est arrivé de penser que je devais avoir quelque chose de particulier, quand je vois Lynx défaillir de joie en me regardant.
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Depuis que Lynx est mort, la chatte s'est rapprochée de moi. (...) Il suffit que je lui parle, que je la caresse, pour que sa chaleur passe doucement de son corps à mes paumes et me console. Je ne pense pas que la chatte ait besoin de moi comme j'ai besoin d'elle.
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Mais si le temps n’existe que dans ma tête, et si je suis le dernier être humain, il finira avec moi. Cette pensée me rend joyeuse. Il est peut-être en mon pouvoir de tuer le temps. Le grand filet se déchirera et tombera dans l’oubli avec son triste contenu. On devrait m’en avoir de la reconnaissance, mais personne ne saura après ma mort que c’est moi qui ai assassiné le temps. Dans le fond, ces pensées n’ont pas la moindre signification. Les choses arrivent tout simplement et, comme des millions d’hommes avant moi, je cherche à leur trouver un sens parce que mon orgueil ne veut pas admettre que le sens d’un événement est tout entier dans cet événement. Aucun coléoptère que j’écrase sans y prendre garde ne verra dans cet événement fâcheux pour lui une secrète relation de portée universelle. Il était simplement sous mon pied au moment où je l’ai écrasé : un bien-être dans la lumière, une courte douleur aiguë et puis plus rien. Les humains sont les seuls à être condamnés à courir après un sens qui ne peut exister. Je ne sais pas si j’arriverai un jour à prendre mon parti de cette révélation. Il est difficile de se défaire de cette folie des grandeurs ancrée en nous depuis si longtemps. Je plains les animaux et les hommes parce qu’ils sont jetés dans la vie sans l’avoir voulu. Mais ce sont les hommes qui sont sans doute le plus à plaindre, parce qu’ils possèdent juste assez de raison pour lutter contre le cours naturel des choses. Cela les a rendus méchants, désespérés et bien peu dignes d’être aimés. Et pourtant il leur aurait été possible de vivre autrement. Il n’existe pas de sentiment plus raisonnable que l’amour, qui rend la vie plus supportable à celui qui aime et à celui qui est aimé. Mais il aurait fallu reconnaître que c’était notre seule possibilité, l’unique espoir d’une vie meilleure. Pour l’immense foule des morts, la seule possibilité de l’homme est perdue à jamais. Ma pensée revient sans cesse là-dessus. Je ne peux pas comprendre pourquoi nous avons fait fausse route. Je sais seulement qu’il est trop tard.
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Ici, dans la forêt, je me trouve enfin à la place qui me convient. Je n’en veux plus aux fabricants d’autos, ils ont depuis longtemps perdu tout intérêt. Mais comme ils m’ont torturée avec des choses qui me répugnaient ! je n’avais que cette petite vie et ils ne m’ont pas laissé vivre en paix. Maintenant que les hommes n’existent plus, les conduites de gaz, les centrales électriques et les oléoducs montrent leur vrai visage lamentable. On en avait fait des dieux au lieu de s’en servir comme objets d’usage. Moi aussi je possède un objet de ce genre au milieu de la forêt : la Mercedes noire de Hugo. Quand nous sommes arrivés avec, elle était presque neuve. Aujourd’hui, recouverte d’herbe, elle sert de nids aux souris et aux oiseaux. Quand la clématite fleurit au mois de juin, elle devient très belle et se met à ressembler à un gigantesque bouquet de mariée. Elle est belle aussi en hiver lorsqu’elle est brillante de givre ou se couronne d’une coiffe blanche.
Au printemps et à l’automne, je distingue entre les tiges brunes le jaune passé de ses coussins jonchés de feuilles de hêtre, mêlées à des petits morceaux de caoutchouc mousse et de crin, arraché et déchiqueté par des dents minuscules. La Mercedes d’Hugo est devenue un foyer confortable, chaud et abrité du vent. On devrait placer des voitures dans les forêts, elles font de bons nichoirs. Sur les routes, à travers tout le pays, il doit y en avoir des milliers recouvertes de lierre, d’orties et de buissons. Mais celle-là sont entièrement vide et sans habitants. (P 258)
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Le temps avait seulement dû me paraître passer plus vite. Je crois que le temps est immobile et que je me meus en lui parfois lentement, parfois à une vitesse foudroyante.
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Je me demande où est passée l’heure exacte, depuis qu’il n’y a plus d’hommes. Parfois me revient à l’esprit l’importance jadis de ne pas arriver cinq minutes en retard. La plupart des gens que je connaissais faisaient de leur montre une sorte de divinité et même moi je trouvais cela tout à fait raisonnable. Quand on est tombé en esclavage, il est bon de s’en tenir aux prescriptions et de ne pas mécontenter le maître.
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