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EAN : 9782868691804
225 pages
Actes Sud (10/08/1993)
3.83/5   92 notes
Résumé :
Une femme, épouse bourgeoise, mère de deux enfants, se réfugie régulièrement dans une mansarde pour lire le courrier qui lui est adressé. Or ce qu’elle trouve dans les enveloppes jaunes qu’elle reçoit dans sa boîte aux lettres, c’est, épisode après épisode, le journal qu’elle tenait du temps où, devenue sourde, elle était restée plusieurs mois cloîtrée dans une cabane au cœur de la forêt autrichienne, coupée de son mari et de son fils de trois ans.
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1er billet- mai 2013- Réactualisation le 19 avril 2024

Une femme, épouse bourgeoise, mère de famille, se réfugie régulièrement dans une mansarde pour lire le courrier qui lui est adressé. Or ce qu'elle trouve dans les enveloppes, c'est, épisode après épisode, le journal qu'elle tenait du temps où devenue sourde, elle avait été reléguée par son mari dans une cabane, au coeur de la forêt autrichienne....
Les mêmes thèmes chers à Marlen Haushofer: la solitude, la peur, la difficulté de vivre, l'hypocrisie des relations, la solitude dans les rapports de couple...

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Chronique réactualisée le 19 avril 2024


Les romans de Marlen Haushofer mettent fréquemment en scène la solitude d'une femme au sein de son couple. Ainsi Dans la Mansarde, une femme, épouse bourgeoise, mère de famille se réfugie régulièrement dans une mansarde pour lire le courrier qui lui est adressé. Or ce qu'elle trouve dans les enveloppes jaunes, c'est, épisode après épisode, le journal qu'elle tenait du temps où, devenue sourde, elle avait été reléguée par son mari dans une cabane, au coeur de la forêt autrichienne. Avec ce texte, Marlen Haushofer réunit les thèmes qui lui tenaient le plus à coeur : la peur, la solitude, la mémoire, l'hypocrisie des relations.

En plus de la solitude pathétique dans le couple de l'héroïne, il y a sa différence, sa marginalité à cause de sa surdité subite et sans origine physique…qui la mettent à l'écart de son couple. Elle dérange. Marlen Haushofer décrit de façon très dense les méandres et les tourments mentaux, intérieurs d'une femme qui, quelque part ne trouve pas réellement sa place dans l'existence. La solitude revêt mille costumes, entre la maladie physique, la pauvreté, la laideur, le handicap, et dans cette histoire, il s'agit d'un profond mal de vivre. Dans les mots de cet écrivain, il y a l'obsession de la mort, du néant. Il ne faut pas oublier que cette femme a vécu les bombardements, la seconde guerre, et le nazisme.

Son idée du couple est noire : la réunion de deux individualités qui ne se comprennent pas ou si mal. Ainsi l'héroïne de la Mansarde dit les choses suivantes en parlant de son époux, tout au début du roman : Il ne se rend pour ainsi dire pas compte de ma présence et ne m'adresse pas la parole mais il faut que je sois dans la pièce. le mariage envisagé comme un échappatoire à la solitude : un pis-aller…j'ai épousé un homme aux moeurs bourgeoises, je m'occupe d'un intérieur bourgeois et dois me comporter en conséquence. Mes extravagances hors des règles d'une vie bourgeoise se limiteraient à passer la soirée dans la mansarde.

Quand deux êtres sont ensemble et qu'un seul pleure, rien de bon ne peut en sortir.
L'auteur décrit la difficulté de vivre, d'adhérer à son existence : Non seulement je ne pouvais pas entendre mais j'osais à peine parler car je ne savais pas à quoi ma voix se ressemblait. J'avais vraiment le sentiment de ne rien avoir à faire sur cette terre. (…) Pauvre Hubert (le mari de l'héroïne) , il ne peut pas être comme son père. Il n'aime pas les femmes, il a seulement besoin d'elles. Il n'aime pas non plus vraiment la vie, il la prend comme un devoir que lui aurait donné un maître d'école inconnu, comme un travail dont il ne peut venir à bout, quelque mal qu'il se donne. Et il s'en donne !

Il est aussi beaucoup question de tourment mental, comme cette surdité qui apparaît à priori sans raison physique ni précise : Pourquoi moi ou cette étrangère qui est en moi ne voulons-nous plus nous entendre ? Et pourquoi ce refus alors que j'avais enfin ce que j'avais toujours voulu avoir, une famille pour moi seule ? (…) Je reste assise à attendre que cette étrangère en moi condescende à réentendre.


L'héroïne exprime de façon bouleversante ses difficultés à vivre à deux et son impossibilité à s'assumer seule : "mon unique partenaire, c'est Hubert. de nombreuses femmes trouveraient que c'est un partenaire impossible. Il me convient. Il est là sans être vraiment présent et jamais il ne s'approche trop de moi."

J'aime ce livre pour une réflexion qui me convient, et que je trouve très juste sur le sentiment de se sentir vivant, indépendant, tout en souhaitant la proximité humaine :
"J'aime bien la solitude dans une pièce mais pas dans toute une maison . Quand on est seul dans une pièce, on a toujours la ressource de frapper à la porte voisine et de demander si l'on peut entrer quelques instants. Et celui qui est à l'intérieur répond (…) Après avoir passé un petit moment avec lui, je retrouve la force de repartir et de rester dans ma chambre."

L'être humain doit parler, semble-t-il, s'il ne veut pas perdre la raison.
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La narratrice, à laquelle l'auteure a choisi de ne pas donner de nom, est une femme au foyer qui mène une vie simple, elle s'occupe de son mari, de ses enfants, de sa maison.
Lorsqu'elle en trouve le temps, elle aime se réfugier dans la mansarde pour dessiner des oiseaux, des insectes, des poissons.
Une enveloppe marron trouvée un matin dans sa boîte à lettres va bousculer ce quotidien.
C'est dans la mansarde, son refuge, qu'elle lit ces pages.
Qui ? Pourquoi ? Elle ne comprend pas, comment le journal qu'elle a écrit quinze ans plus tôt dans des circonstances particulières, peut se retrouver sous ses yeux.
Qui a découvert ce texte ? Où l'avait-elle laissé, perdu ?
Au fil des réceptions les questions deviennent de plus en plus angoissantes et la ramènent au temps qu'elle a passé dans une cabane isolée, après avoir perdue momentanément l'ouïe.

Ce livre m'a beaucoup émue. J'ai été touchée par cette femme qui parle peu, qui observe sans jamais porter de jugement.
Elle ne trouve pas sa place dans ce foyer qui est pourtant le sien. C'est « Dans la mansarde » qu'elle se sent revivre. Elle n'est cependant pas malheureuse, ni résignée, tout au plus indépendante et secrète.

Ce roman est lent, il se passe peu de choses, il est magnifiquement écrit.
Marlen Haushofer m'a entraînée dans la tête de son personnage, j'ai partagé sa solitude, ses doutes, ses émotions.
Un livre magnifique.
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C'est l'histoire d'une femme entre deux âges , mariée , deux enfants ,(seule la fille vit encore avec ses parents , l'ainé est déjà sorti du nid )qui vit péniblement entre deux "mondes" : celui du bas , avec son mari et sa fille et celui du haut qui correspond à la partie secrète de son être .

En bas , elle assume , péniblement son rôle de femme , de mère , et d'être à part entière, avec ce que cela implique d'engagement dans le monde ;
en haut ,dans sa mansarde , elle se réfugie dans son être intérieur et laisse courir librement son imagination à travers son "passe-temps" favori : le dessin !
En ce lieu de refuge , libérée des contraintes sociétales et du regard de l'autre , elle s'adonne à son activité artistique,au pouvoir salvateur pour son équilibre mental ......Un fil directeur obsessionnel dans sa créativité traduit par cette phrase laconique :

"Je voudrais peindre un oiseau qui ne serait pas le seul oiseau sur terre "

On aura bien compris que cette quête là , c'est la sienne : retrouver le contact avec le monde !

A travers un courrier qui lui est adressé régulièrement dans une enveloppe jaune , et dont elle va découvrir le contenu de façon "ritualisée" lorsqu'elle se retrouvera dans sa mansarde , on découvrira une partie de sa vie consignée dans ce journal intime qui lui revient par le plus grand mystère : dès lors le lecteur possèdera l'éclairage nécessaire pour appréhender le personnage dans toute sa complexité !

Ainsi on découvrira qu' un choc émotionnel survenu lors des premières années de son mariage l'ont rendue sourde .
Pendant plus de deux ans , sa vie s'est retrouvée en marge : reléguée au fin fond d'un coin de montagne par son mari , elle ne retrouvera l'ouie qu'à travers un nouveau choc émotionnel .........Lié à la rencontre d'un individu inquiétant , recherchant la surdité de cette femme pour verbaliser le poids de sa conscience : malgré le danger encouru par ce rôle de confesseur , cette relation lui devient nécessaire , la ramenant à reprendre une place "utile" dans le monde ! Un jour où le danger s'avère imminent , l'instinct de survie reprend le dessus et elle retrouve l'usage de son sens ! Elle s'enfuit ....laissant l'individu à ses tourments !

La vie reprendra son court , avec cette fracture qui la divise en deux , dans ses actes , ses pensées et sa notion de l'espace temps .
Sa vie d'en bas , mécaniquement réglée , ne laissant aucune place au vagabondage de l'esprit.....s'occupant avec acharnement à des tâches répétitives telle la scansion d'un mantra pour ne pas s'écarter du fil tenu qui la maintient dans les schémas névrotiques garde-fous , l'aidant à tenir en respect la folie qui la guette sournoisement tapie dans l'ombre .....avec un besoin maladif d'expier "la faute existencielle"! le style du livre s'accorde merveilleusement bien à cette rigueur drastique dans son rythme scandé , mécanique ! Les sentiments semblent inexistants , aucun affect , juste une énonciation de faits avec beucoup de distanciation :

Je décidai de réunir mes dernière forces pour combattre cet assombrissement , je courus à la salle de bain , remplis un seau d'eau, saisis une serpillière et allais m'agenouiller sur le parquet vitrifié du salon.Je ne pris pas le balai, je rampais sue les genoux pour netttoyer tous les coins que le balai n'atteint pas .Ce fut un grand bienfait car je cessai de penser .ce travail est merveilleusement astreignant , il faut se déhancher pour passer sous les armoires , pour déplacer les meubles ,le dos vous fait mal et les vous brûlent vous brûlent .Il n'y a rien de mieux pour les pensées importunes ."

Plus loin encore :
"Je chargeai les tapis sur mon bras et les remportai dans la maison.La matinée était vraiment finie .J'allais dans la salle de bain me laver la figure et les mains en me félicitant de mon travail.Je sentais bien que j'exécrais cette besogne mais je savais à quel point elle m'était nécessaire "

Et encore :
"d'un seul coup , j'eus très froid.Ce 'était pas surprenant car j'avais transpiré en battant les tapis et je ne m'étais pas changée.J'eus l'impression que je ne pourrais plus me lever .Je pensais alors à mon lit et me dit qu'il ne tenait qu'à mopi de m'y allonger .Mais cela aurait naturellment bouleversé tout mon système, il ne pouvait donc en être question."

A travers ces extraits , on prend conscience de l'extrême fragilité psychique de cette femme, de la culpabilité de vivre même ,et qui tente de garder contact avec la réalité par une discipline de fer qu'elle s'impose ....Hum, on n'est pas loin de PADRE PIO et des grands mystiques fervents pratiquants de l'autoflagellation !

Un roman glacé qui parle d'absence à soi , au réel , de l'impossibilité de communiquer , du poids du passé , du grand vide ou du trop plein de l'être intérieur .....de la solitude des êtres qui se tiennent sur le fil ....aujourd'hui on écrirait "borderline" !

Marlen Haushofer réussit brillamment à traduire cet état : à lire les jours de "positive attitude" !!!
Mais je suis encore sous le choc de ce talent pour exprimer les méandres du cerveau "fracturé" ......
J'ai adoré et j'entends bien continuer avec MARLEN HAUSHOFER
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Une semaine dans la vie d'une femme autrichienne, chaque chapitre dédié à une journée. La narratrice raconte le quotidien lent, sans surprise, et elle se raconte sans y prendre garde. Son refuge, c'est la mansarde où elle peint et où elle marche sans crainte de déranger son époux. Quoi qu'elle fasse, cette femme tente d'échapper au passé et aux souvenirs qui pourraient ébranler le précaire équilibre du présent, renverser le statu quo d'une existence pétrifiée. « le passé, quel qu'il soit, doit être liquidé. C'est une démarche douloureuse devant laquelle toute ma vie, je me défile. » (p. 48) Hélas, un oiseau lui rappelle son enfance entre des parents malades, un grain de poussière ravive le souvenir des deux ans durant lesquels elle a perdu l'ouïe. Et justement, le courrier du jour lui apporte les pages du journal qu'elle a écrit pendant ces mois de silence. « Les médecins […] ont dit qu'il n'y avait pas de cause organique à ma surdité. J'aurais seulement oublié comment l'on entend. Cela me reviendra peut-être. » (p. 58) Qui envoie ces courriers, et pourquoi ? En se relisant, des années après, la femme se rappelle la solitude et le détachement de ce qui faisait son monde. Comme elle, le/la lecteur·ice se demande comment elle a retrouvé sa place. Mais l'évidence se fait : cette place est restée perdue, et celle qui est revenue du silence n'était pas tout à fait la même. On comprend alors les terribles efforts qu'elle fait pour ne jamais regarder en arrière. « Il m'est parfois importun d'avoir en tête autant d'images cachées qui peuvent surgir à tout moment. » (p. 115)
La quatrième de couverture parle d'un roman d'une étonnante modernité, et c'est tout à fait juste. On flirte par moment avec le fantastique tant l'étrangeté de cette femme est considérable. Dans son intérieur figé, auprès d'un époux hautement prévisible et d'enfants évanescents, la narratrice marche sans cesse sur des oeufs et ne trouve pas le repos. Elle lutte contre ses pulsions de liberté et rêve de s'affranchir des chaînes qu'elle s'est laissé passer au cou. La mansarde, alors, tout autant partie de la maison que refuge mental, est le lieu de tous les possibles, mais aussi celui de tous les interdits. « Les choses et les pensées qui concernent ma vie dans la mansarde n'ont pas à pénétrer dans le reste de la maison. » (p. 26) J'ai découvert Marlen Haushofer avec le mur invisible, autre lecture tout à fait inoubliable.
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Dans ce roman, on suit le quotidien d'une quinquagénaire mère au foyer dont les enfants sont adolescents voire adultes et vivent leurs vies de leur côté. le récit s'oriente principalement sur la vie de couple et l'entretien de la maison, entrecoupé de souvenirs soulevés par l'arrivée impromptue dans la boîte aux lettres d'extraits de journaux intimes de jeunesse de la narratrice, que cette dernière s'empresse de dissimuler dans un tiroir de meuble de la mansarde, sa pièce maîtresse, son atelier où elle vient régulièrement dessiner des oiseaux.
Le récit s'étire sur une semaine, le temps que chaque extrait de journal soit envoyé, lu et aussitôt détruit.

J'ai adoré le mur invisible, j'avais la sensation qu'il se dégageait une certaine sérénité de ce livre. A contrario, Dans la mansarde m'a considérablement angoissée et plusieurs jours après l'avoir terminée, cette lecture m'évoque encore un sentiment de malaise. le style magnétique du Mur invisible n'a pas opéré avec Dans la mansarde – les deux livres ont été traduits par des personnes différentes. Dans le mur invisible, le détachement émotionnel de la narratrice peut être perçu comme une force qui lui permet de survivre dans un milieu hostile, exempt de toutes relations humaines. La narratrice de Dans la mansarde présente ce même trait de caractère alors qu'elle est entourée de sa famille et de ses amis. Elle observe sa vie, son entourage, ses proches, avec un détachement quasi pathologique. Elle exprime régulièrement son absence de sentiments – ni haine, ni amour – son acceptation d'un ennui certain, cette routine incessamment répétée. La narratrice expulse sa rage sous-jacente dans les tâches ménagères de la maison qu'elle ne déléguerait à personne d'autre, quand bien même son mari lui proposerait d'embaucher un femme de ménage.
Toutefois, le discours lisse et presque monotone entraîne progressivement, suite à la lecture des souvenirs reçus par voie postale – on ne sait et ne saura jamais comment – , une discrète évolution dans la psyché de la narratrice.

Si les éditeurs d'Actes Sud estime dans la quatrième de couverture que Dans la mansarde est « le plus subtil et le plus abouti » des romans de M. Haushofer, à mon sens, il n'égale pas le mur invisible et s'apparente d'avantage mais de manière plus développée à Nous avons tué Stella.
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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Peut-être suis-je un peu folle sans le savoir. Cela n'aurait finalement rien d'étonnant. La folie qui s'est emparée de toute ma génération est la conséquence d'événements que nous n'étions pas capables d'assumer. Il existe vraisemblablement des événements qu'aucune génération n'est à même d'assumer. Nos enfants doivent avoir l'impression que leurs parents sont bizarres et incompréhensibles. Mais peut-être eux aussi connaîtront-ils un jour une situation analogue et ce jour-là ils seront distancés comme nous le sommes aujourd'hui et tous ceux qui les regarderont de l'extérieur les trouveront incompréhensibles à leur tour.
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J'avais pleuré pour la dernière fois après mon retour de Pruschen, pendant la première nuit que je passai avec Hubert. J'avais cru que tout irait bien de nouveau parce que j'avais recouvré le pouvoir de pleurer. C'aurait pu être le cas si Hubert avait eu la même réaction. Mais c'est un homme et on lui avait appris quand il était petit garçon à se maîtriser. Quand deux êtres sont ensemble et qu'un seul pleure, rien de bon ne peut en sortir, on ne peut en attendre aucune délivrance réelle. Aussi je reperdis très vite la faculté de pleurer. On n'imagine pas avec quelle facilité cela s'oublie. On n'y prête pas davantage attention, on se dit qu'une occasion se représentera bien un jour, mais lorsqu'elle se présente, on ne peut plus.
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Aujourd’hui je suis allée en forêt. Silence glacé et beauté. Rien ne me distrait, ni un craquement d’arbre ni le crissement de mes chaussures qui s’enfoncent dans la neige. Je me rappelle très distinctement ce frottement sec. Le silence me donne un sentiment d’irréel, j’ai l’impression d’être un fantôme qui vient hanter la forêt enneigée. Pas un seul animal en vue. Où sont-ils tous ? […] Quantité de mésanges et de pinsons viennent picorer sous ma fenêtre mais dans la forêt je n’ai pas vu un seul oiseau. Peut-être s’effraient-ils en entendant mes pas, il ne faut pas que j’oublie que je fais du bruit comme tout autre être humain.
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Les œufs avaient un goût de vieux, comme d'habitude, mais je ne m'en étonne plus depuis que je sais qu'ils ne sont pas pondus par des poules alertes qui peuvent gratter la terre mais par d'infortunées créatures en cage. Ces œufs sont leur vengeance. Je suis naturellement sans réserve du côté de ces pauvres robots. Les œufs devraient avoir un goût bien plus infect encore pour nous punir de nos agissements infâmes.
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L'arbre s'élève et s'étale sur le fond du ciel, tel un dessin sur du papier de riz gris. Il a un côté un peu chinois. Si on le regarde pendant un long moment, tout du moins si je le regarde, moi, assez longtemps, il se transforme. Le ciel gris-blanc commence à se glisser et à s'arrondir entre les branches, il prend la forme de balles légères et bientôt l'arbre, qu'il soit acacia, aulne ou orme, le tient emprisonné entre la multitude de ses doigts gris-argenté. Si je ferme alors les yeux pour les rouvrir une minute plus tard, l'arbre est redevenu plat comme sur un dessin. Ce tableau ne m'apporte ni tristesse ni joie et je pourrais le regarder pendant des heures. L'instant suivant, la mystérieuse métamorphose recommence, le ciel s'arrondit et se prend dans les doigts aux lignes délicatement brisées.
Mais ce qu'il y a de plus merveilleux dans cet arbre, c'est qu'il peut absorber et éteindre les désirs. Non que j'aie encore des souhaits particulièrement ardents, mais je connais tout de même des inquiétudes, des désagréments et des accès de mauvaise humeur. L'arbre les extrait de mon être, les niche dans les fourches de ses branches et les recouvre de balles de nuages blanches jusqu'à ce que tout se dissolve dans la fraîcheur humide. Je suis alors vide et légère, je peux détourner la tête et me rendormir une demi-heure. Je ne rêve jamais pendant ce temps-là ; l'arbre, acacia, aulne ou orme, est un arbre scrupuleux sur lequel on peut compter.
Je lui en suis très reconnaissante car l'important est de rassembler des forces grâce auxquelles on occupera dignement le temps qui passe.
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Vidéo de Marlen Haushofer
C'est à la fin de l'année 1941 que les Américains, entraînés contre leur gré dans la Seconde Guerre mondiale, découvrent, mi-fascinés mi-inquiets, l'existence d'une science nouvelle dans l'exercice de laquelle les Allemands seraient passés maîtres et qui expliquerait leurs spectaculaires succès : la géopolitique.
Un vif débat s'engage alors : faut-il rejeter la géopolitique au motif qu'elle serait un savoir nazi par principe pernicieux ? Ou au contraire s'en rendre maître pour mieux la retourner contre ses concepteurs ?
Entre Seconde Guerre mondiale et guerre froide se joue ainsi un épisode crucial de l'histoire d'une discipline dont l'américanisation rend possible la normalisation et qui éclaire d'une lumière neuve la genèse des visions et des pratiques américaines du monde au XXe siècle. . . .
0:00 Comment les États-Unis se sont approprié une science venue d'Allemagne nazie 0:39 le tournant mackindérien 6:10 Haushofer à Nuremberg 8:19 Une science qui s'américanise

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