Sophie Hénaff choisit la carte de l'humour pour aborder un thème qui prêterait pourtant davantage à pleurer qu'à rire, puisqu'il sera question de la sixième extinction (la disparition annoncée de très nombreuses espèces animales du fait de l'homme).
Rien que le titre donne le ton de l'intrigue à venir, un mix improbable entre l'extinction de voix et les espèces en voie d'extinction. Belle trouvaille.
Une intrigue qui va se jouer entre ciel et terre. Non qu'il soit question de voltige aérienne ou autre engins volants plus ou moins identifiés. En plus de personnages terrestres, l'auteure va aussi en piocher quelques-uns dans les hautes sphères bibliques. À commencer par le big boss himself, Dieu… sauf que c'est Déesse (bin oui, Dieu est une femme… ça vous en bouche en coin) et qu'elle est capable de colères à la hauteur de sa divinité (en plus de jurer comme un charretier). Avec une pareille Déesse aux commandes, j'en viendrai presque à avoir envie de me convertir !
Après avoir passé un savon monstre à Noé (le gars du Déluge et de l'Arche), son incapable ministre des espèces animales qui n'a rien vu venir de la menace qui pèse sur ses protégés, elle le somme de réparer ses conneries, s'il échoue elle le fout à la porte du Ciel et l'envoie rôtir en Enfer.
Déesse donnera la parole et une apparence humaine à quatre animaux qui devront plaider leur cause lors du sommet qui se prépare. A Noé de choisir les « élus » et de les former en vue de leur prochaine mission.
Aidé par son pote de pétanque Gabriel (l'Archange à l'origine de l'Immaculée Conception), ils choisiront Kombo – un gorille qui se morfond dans un zoo en rêvant de grands espaces –, TR438 – une truie parquée dans immense ferme reproductrice –, Cléo – une chatte siamoise dont la maîtresse vient de décéder et que les héritiers ne se disputent pas franchement la garde – et Bill – un dalmatien qui son maître vient d'abandonner en l'attachant à un banc dans une station-service –. Reste à préparer les heureux « élus » pour leur mission… et ça c'est pas gagné !
Ces quatre émissaires, pas franchement au courant des us et coutumes de la vie en société chez les humains, ne manqueront pas de solliciter les zygomatiques du lecteur. On passe du sourire au rire, voire parfois au franc éclat de rire tant certaines scènes sont désopilantes.
Du côté des « vrais » humains, les défenseurs de la cause animale ne font pas le poids face aux lobbyistes qui défendent les grands groupes industriels et les profits qu'ils dégagent. Une réalité que
Sophie Hénaff pointe du doigt avec un certain cynisme mais aussi beaucoup de justesse.
C'est d'ailleurs l'un des paris réussis de ce roman, l'auteur use de l'humour pour nous faire réfléchir, nous remettre en question… et ça fonctionne bien mieux qu'un long discours pompeux et soporifique.
Point de longueurs ici, les chapitres sont courts (parfois à peine quelques lignes) et contribuent à assurer une lecture fluide. On sourit, on rigole… et le message fait son chemin dans notre esprit.
Rien de pompeux et de soporifique non plus, le bouquin est plein de peps et d'énergie, encore mieux qu'une double dose de Red Bull ou autre boisson énergisante pour se donner la pêche… et certainement moins nocif pour la santé (j'en consomme occasionnellement et je l'assume pleinement).
En refermant le bouquin on a envie de croire que les choses peuvent encore changer… trop tard pour les espèces que l'activité humaine a déjà détruites. Mais peut-être pas encore pour celles qui sont aujourd'hui ou à court et moyen terme menacées d'extinction. Faut pas rêver, on sera les prochains sur la liste si on ne sort pas les doigts du cul.
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