La façon dont on passait Noël était considérée comme un message adressé au monde à propos su point où on en était dans la vie, une indication sur la profondeur du terrier qu’on était parvenu à se creuser.
Il ressentit soudain pour lui un petit élan d’affection. Marcus était si enfermé en lui-même, si indifférent à tout et à chacun, que l’affection semblait la seule réponse possible : l’enfant, d’une certaine façon, semblait à la fois ne réclamer absolument rien et réclamer absolument tout.
C'était marrant de voir à quel point on connaissait de petites choses sur les gens, comme l'endroit où ils cachaient leur boîte à herbe, même si on ne savait pas ce qu'ils allaient penser d'un semaine à l'autre.
Ce n'était pas uniquement de la faute de sa mère. Il lui arrivait d'être bizarre simplement parce qu'il était comme ça, et pas à cause de ce qu'elle faisait. Comme le fait de chanter... Quand parviendrait-il à se corriger de ça ? Il avait toujours un air dans la tête, mais de temps en temps, lorsqu'il était nerveux, l'air lui glissait des lèvres. Pour une raison ou pour une autre, il ne faisait pas la différence entre le dedans et le dehors, parce qu'il ne lui semblait pas qu'il y en ait une. C'était comme de nager dans une piscine chauffée un jour de chaleur, on pouvait sortir de l'eau sans s'en rendre compte, parce que la température était la même ; il devait se passer la même chose avec le fait de fredonner. En tout cas, un air lui avait glissé des lèvres, hier, en cours d'anglais, pendant que le professeur lisait ; si on voulait vraiment faire rire de soi, mais alors vraiment ce qui s'appelle rire, le meilleur moyen, il l'avait constaté, meilleur encore que d'avoir une mauvaise coupe de cheveux, était de chanter tout fort quand chacun dans la salle s'ennuyait en silence.