AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur La Légende des siècles - Les Petites Epopées (60)

LV - LES GRANDES LOIS


I

Je ne me sentais plus vivant ; je me retrouve,
Je marche, je revois le but sacré. J'éprouve
Le vertige divin, joyeux, épouvanté,
Des doutes convergeant tous vers la vérité ;
Pourtant je hais le dogme, un dogme c'est un cloître.
Je sens le sombre amour des précipices croître
Dans mon sauvage cœur, saignant, blessé, banni,
Calme, et de plus en plus épars dans l'infini.
Si j'abaisse les yeux, si je regarde l'ombre,
Je sens en moi, devant les supplices sans nombre,
Les bourreaux, les tyrans, grandir à chaque pas
Une indignation qui ne m'endurcit pas,
Car s'indigner de tout, c'est tout aimer en somme,
Et tout le genre humain est l'abîme de l'homme…

p.358
Commenter  J’apprécie          50
[L’ÉPOPÉE DU VER]

L’univers magnifique et lugubre a deux cimes.
Ô vivants, à ses deux extrémités sublimes,
Qui sont aurore et nuit,
La création triste, aux entrailles profondes,
Porte deux Tout-puissants, le Dieu qui fait les mondes,
Le ver qui les détruit.
Commenter  J’apprécie          50
Le Cercle des Tyrans (XVII, dernière série)

I. Liberté !

De quel droit mettez-vous des oiseaux dans des cages ?

De quel droit ôtez-vous ces chanteurs aux bocages,
Aux sources, à l’aurore, à la nuée, aux vents ?
De quel droit volez-vous la vie à des vivants ?
Homme, crois-tu que Dieu, ce père, fasse naître
L’aile pour l’accrocher au clou de ta fenêtre ?

Ne peux-tu vivre heureux et content sans cela ?
Qu’est-ce qu’ils ont donc fait tous ces innocents-là
Pour être au bagne avec leur nid et leur femelle ?

Qui sait comment leur sort à notre sort se mêle ?
Qui sait si le verdier qu’on dérobe aux rameaux,
Qui sait si le malheur qu’on fait aux animaux
Et si la servitude inutile des bêtes
Ne se résolvent pas en Nérons sur nos têtes ?
Qui sait si le carcan ne sort pas des licous ?
Oh ! de nos actions qui sait les contre-coups,
Et quels noirs croisements ont au fond du mystère
Tant de choses qu’on fait en riant sur la terre ?
Quand vous cadenassez sous un réseau de fer
Tous ces buveurs d’azur faits pour s’enivrer d’air,
Tous ces nageurs charmants de la lumière bleue,
Chardonneret, pinson, moineau franc, hochequeue,
Croyez-vous que le bec sanglant des passereaux
Ne touche pas à l’homme en heurtant ces barreaux ?
Prenez garde à la sombre équité. Prenez garde !
Partout où pleure et crie un captif, Dieu regarde.
Ne comprenez-vous pas que vous êtes méchants ?
À tous ces enfermés donnez la clef des champs !
Aux champs les rossignols, aux champs les hirondelles !
Les âmes expieront tout ce qu’on fait aux ailes.
La balance invisible a deux plateaux obscurs.
Prenez garde aux cachots dont vous ornez vos murs !

Du treillage aux fils d’or naissent les noires grilles ;
La volière sinistre est mère des bastilles.
Respect aux doux passants des airs, des prés, des eaux !
Toute la liberté qu’on prend à des oiseaux
Le destin juste et dur la reprend à des hommes.
Nous avons des tyrans parce que nous en sommes.
Tu veux être libre, homme ? et de quel droit, ayant
Chez toi le détenu, ce témoin effrayant ?
Ce qu’on croit sans défense est défendu par l’ombre.
Toute l’immensité sur le pauvre oiseau sombre
Se penche, et te dévoue à l’expiation.
Je t’admire, oppresseur, criant : oppression !
Le sort te tient pendant que ta démence brave
Ce forçat qui sur toi jette une ombre d’esclave ;
Et la cage qui pend au seuil de ta maison
Vit, chante, et fait sortir de terre la prison.
Commenter  J’apprécie          40
LE SACRE DE LA FEMME
1V

Ève offrait au ciel bleu la sainte nudité;
Ève blonde admirait l'aube, sa soeur vermeille.

Chair de la femme ! argile idéale ! ô merveille !
O pénétration sublime de l'esprit
Dans le limon que l'être ineffable pétrit !
Matière où l'âme brille à travers son suaire !
Boue où l'on voit les doigts du divin statuaire !
Fange auguste appelant le baiser et le coeur,
Si sainte, qu'on ne sait, tant l'amour est vainqueur,
Tant l'âme est vers ce lit mystérieux poussée,
Si cette volupté n'est pas une pensée
Et qu'on ne peut, où les sens sont en feu,
Étreindre la beauté sans croire embrasser Dieu !

Ève laisser ses yeux sur la nature.

Et, sous les verts palmiers à la haute stature,
Autour d'Ève, au-dessus sa tête, l'oeillet
Semblait songer, le bleu lotus se recueillait,
Le frais myosotis se souvenait; les roses
Cherchaient ses pieds avec leurs lèvres demi-closes ;
Un souffle fraternel sortaient du lys vermeil;
Comme ce doux être eût été leur pareil ,
Comme si ces fleurs, ayant toutes une âme,
La plus belle s'était épanouie en femme.
Commenter  J’apprécie          40
DÉPART DE L'AVENTURIER POUR L'AVENTURE

Qu'est-ce que Sigismond et Ladislas ont dit ?
Je ne sais si la roche ou l'arbre l'entendit ;
Mais, quand ils ont tout bas parlé dans la broussaille,
L'arbre a fait un long bruit de taillis qui tressaille,
Comme si quelque bête en passant l'eût troublé,
Et l'ombre du rocher ténébreux a semblé
Plus noire, et l'on dirait qu'un morceau de cette ombre
A pris forme et s'en est allé dans le bois sombre,
Et maintenant on voit comme un spectre marchant
Là-bas dans la clarté sinistre du couchant.
Ce n'est pas une bête en son gîte éveillée,
Ce n'est pas un fantôme éclos sous la feuillée,
Ce n'est pas un morceau de l'ombre du rocher
Qu'on voit là-bas au fond des clairières marcher ;
C'est un vivant qui n'est ni stryge ni lémure ;
Celui qui marche là, couvert d'une âpre armure,
C'est le grand chevalier d'Alsace, Éviradnus.
Ces hommes qui parlaient, il les a reconnus ;
Comme il se reposait dans le hallier, ces bouches
Ont passé, murmurant des paroles farouches,
Et jusqu'à son oreille un mot est arrivé ;
Et c'est pourquoi ce juste et ce preux s'est levé.
Il connaît ce pays qu'il parcourut naguère.
Il rejoint l'écuyer Gaselin, page de guerre,
Qui l'attend dans l'auberge, au plus profond du val,
Où tout à l'heure il vient de laisser son cheval
Pour qu'en hâte on lui donne à boire, et qu'on le ferre.
Il dit au forgeron :-Faites vite. Une affaire
M'appelle.-Il monte en selle et part.
Commenter  J’apprécie          41
Tout reposait dans Ur et dans Jérimadeth ;
Les astres émaillaient le ciel profond et sombre ;
Le croissant fin et clair parmi ces fleurs de l’ombre
Brillait à l’occident, et Ruth se demandait,

Immobile, ouvrant l’œil à moitié sous ses voiles,
Quel dieu, quel moissonneur de l’éternel été,
Avait, en s’en allant, négligemment jeté
Cette faucille d’or dans le champ des étoiles.


Commenter  J’apprécie          40
« À quoi bon ta splendeur, ô sereine nature,
Ô printemps refaisant tous les ans l’ouverture
Du mystérieux temple où la lumière éclôt ?
À quoi bon le torrent, le lac, le vent, le flot ?
À quoi bon le soleil, et les doux mois propices
Semant à pleines mains les fleurs aux précipices,
Les sources et les prés et les oiseaux divins ?
À quoi bon la beauté charmante des ravins ?
La fierté du sapin, la grâce de l’érable,
Ciel juste ! à quoi bon ? l’homme étant un misérable,
Et mettant, lui qui rampe et qui dure si peu,
Le masque de l’Enfer sur la face de Dieu ! »
Commenter  J’apprécie          30
La conscience

Rien ne me verra plus, je ne verrai plus rien.
Commenter  J’apprécie          30
Je suis l'esprit, vivant au sein des choses mortes.
Je sais forger les clefs quand on ferme les portes ;
Je fais vers le désert reculer le lion ;
Je m'appelle Bacchus, Noé, Deucalion ;
Je m'appelle Shakspeare, Annibal, César, Dante ;
Je suis le conquérant ; je tiens l'épée ardente,
Et j'entre, épouvantant l'ombre que je poursuis,
Dans toutes les terreurs et dans toutes les nuits.
Je suis Platon, je vois ; je suis Newton, je trouve.
Du hibou je fais naître Athène, et de la louve
Rome ; et l'aigle m'a dit : Toi, marche le premier !
J'ai Christ dans mon sépulcre et Job sur mon fumier.
Je vis ! dans mes deux mains je porte en équilibre
L'âme et la chair ; je suis l'homme, enfin maître et libre !
Je suis l'antique Adam ! j'aime, je sais, je sens ;
J'ai pris l'arbre de vie entre mes poings puissants ;
Joyeux, je le secoue au-dessus de ma tête,
Et, comme si j'étais le vent de la tempête,
J'agite ses rameaux d'oranges d'or chargés,
Et je crie : " Accourez, peuples ! prenez, mangez ! "
Et je fais sur leurs fronts tomber toutes les pommes ;
Car, science, pour moi, pour mes fils, pour les hommes,
Ta sève à flots descend des cieux pleins de bonté,
Car la Vie est ton fruit, racine Éternité !
Et tout germe, et tout croît, et, fournaise agrandie,
Comme en une forêt court le rouge incendie,
Le beau Progrès vermeil, l'oeil sur l'azur fixé,
Marche, et tout en marchant dévore le passé.
Je veux, tout obéit, la matière inflexible
Cède ; je suis égal presque au grand Invisible ;
Coteaux, je fais le vin comme lui fait le miel ;
Je lâche comme lui des globes dans le ciel.
Je me fais un palais de ce qui fut ma geôle ;
J'attache un fil vivant d'un pôle à l'autre pôle ;
Je fais voler l'esprit sur l'aile de l'éclair ;
Je tends l'arc de Nemrod, le divin arc de fer,
Et la flèche qui siffle et la flèche qui vole,
Et que j'envoie au bout du monde, est ma parole.
Je fais causer le Rhin, le Gange et l'Orégon
Comme trois voyageurs dans le même wagon.
La distance n'est plus. Du vieux géant Espace
J'ai fait un nain. Je vais, et, devant mon audace,
Les noirs titans jaloux lèvent leur front flétri ;
Prométhée, au Caucase enchaîné, pousse un cri,
Tout étonné de voir Franklin voler la foudre ;
Fulton, qu'un Jupiter eût mis jadis en poudre,
Monte Léviathan et traverse la mer ;
Galvani, calme, étreint la mort au rire amer ;
Volta prend dans ses mains le glaive de l'archange
Et le dissout ; le monde à ma voix tremble et change ;
Caïn meurt, l'avenir ressemble au jeune Abel ;
Je reconquiers Éden et j'achève Babel.
Rien sans moi. La nature ébauche ; je termine.
Terre, je suis ton roi.
Commenter  J’apprécie          30
Quatre jours sont passés, et l'île et le rivage
Tremblent sous ce fracas monstrueux et sauvage.
Ils vont, viennent, jamais fuyant, jamais lassés,
Froissent le glaive au glaive et sautent les fossés,
Et passent, au milieu des ronces remuées,
Comme deux tourbillons et comme deux nuées.
Ô chocs affreux ! Terreur ! Tumulte étincelant !
Commenter  J’apprécie          30







    Lecteurs (1892) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Victor Hugo (niveau facile)

    Lequel de ces livres n'est pas de Victor Hugo ?

    Les Misérables
    Notre-Dame de Paris
    Germinal
    Les Contemplations

    10 questions
    1244 lecteurs ont répondu
    Thème : Victor HugoCréer un quiz sur ce livre

    {* *}