Par troupes, les Flamands franchissaient les Alpes : gens de tout métier, plus spécialement des artistes, et beaucoup s'expatriaient sans esprit de retour. « Ils se rendent en Italie », lisons-nous dans Guichardin, « les uns pour apprendre, les autres pour voir choses antiques et cognoistre les hommes excellents de leur profession, et autres pour chercher adventure et se faire cognoistre, et le plus souvent, après avoir accompli leur désir en cet endroit, retournent à la patrie avec expérience, faculté et honneur ».
Hollandais et Flamands montrèrent un enthousiasme égal à suivre la méthode du peintre liégeois, et si l’on se pénètre de cette circonstance que Frans Floris, au dire de Van Mander le plus parfait représentant des théories de son maître, et dont l’atelier compta plus de cent élèves; Hubert Goltzius, à qui sa numismatique des empereurs valut d’être, en plein Capitole, proclamé citoyen romain, et bien d’autres furent les missionnaires de la doctrine de Lombard, il est possible de s’expliquer que, par une rare fortune du destin, à l’égal de ces peintres de l’antiquité dont la gloire a traversé les siècles, sans aucune œuvre pour lui faire escorte, Lambert Lombard soit resté populaire quand si peu de nous ont eu le privilège de fixer leurs regards sur une production authentique de son pinceau.
Il est à peine besoin de rappeler que deux procédés absolument contraires interviennent dans la production des estampes. Dans la gravure en relief, autrement dite en taille d‘épargne, d’ordinaire sur le bois, le trait est seul atteint par l’encre d’impression et marque seul, tandis que, dans la gravure en métal dite taille-douce, la matière colorante s’introduit dans les creux tracés par le burin, et l’empreinte est obtenue par le passage de l’encre, contenue dans ces creux, sur le papier humide. Des procédés ingénieux sont venus, dans ces derniers temps, s’ajouter à ces deux modes de traduction, les rendre plus expéditifs, sans en altérer toutefois l’aspect final.
Il faudrait remonter aux origines de l’art lui-même pour trouver les premiers essais de gravure. La pierre, le bois, le métal ont été de tous temps les confidents de la pensée de l’homme, ont transmis à ses descendants le souvenir de son passage sur cette terre. Pourtant le mot gravure, pris dans le sens usuel, limite à quelques siècles à peine le champ de nos investigations. L’art dont nous avons à étudier les manifestations sur le sol belge ne date que de l’époque où vint à quelque esprit inventif l’idée de multiplier, par l’impression en couleur, des figures ou des traits créés en vue de ce but particulier.