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Citations sur Le seuil (77)

L'IDOLE

Tu veilles dans tes yeux
aux bambous de ténèbres
Une lampe pour les autres
ceux qui t’observent
Le sang essuie les vitres
de nos maisons en ruines
Petites ombres tu suis les morts
à la trace de nos pas
Fraîcheur des lignes des barbelés
On se fait signe avec les lames de la rose
Les amants affrontent leur visage
Leur voix peuple les ondes
de ce pays au tien
aux abîmes d’étoiles

Place

à l’eau qui dort dans l’eau au creux des mains
à l’air à ses chapeaux trop larges pour nos têtes
au sable à l’herbe jeune sœur de nos orteils

Place
aux brebis du vent halées dans les étables
aux vaches sourdes sur les paliers de grêle
au renard au chien bruyant des jours et des nuits
Place

au verbe ascendant vert des édifices
aux fenêtres à leurs rames épaisseur du temps
à la girouette montée sur roues de miaulements de chaton
Place

Aux sirènes du souffle à leurs agrafes de lis
aux chevelures dans les sapins de l'orgue
au pain rose des museaux de poisson

Place
á la tour penchée des passions de paille
á la rouille des attentes des grandes voiles
á la mer aux villes suspendues aux cloches de Noël

Place

à la solennelle enquête des marches
au cours fleuri
La parole est au soleil levé sur la salive
La parole est aux trente-deux candélabres des baisers
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Le Désir d'un commencement II

Indatable regard.
Mémoire d'horizon.


Un bloc de glace n'est jamais qu'une quantité limitée d'eau que le froid a surpris.
Il n'a plus qu'une raison d'être; glacer à son tour.

Au seuil de la mort, ce n'est pas l'avenir de l'âme qui nous préoccupe mais le comportement du corps.

L'âme est un oiseau d'oubli aux ailes multicolores.

Que donne á voir le livre? — D'abord, la détresse de l'auteur. Puis son impudence.

Le serpent est, peut-étre, un mot tellement étiré, qu'il ne peut, désormais, que ramper sur son ombre.
Cruelle humiliation.
Inacceptable.
Son venin, cependant - Vengeance. Vengeance - le reconcilie avec la vie.


La mort, á l'oiseau, retire les organes du vol qui lui étaient nécessaires.
Si haut, devra-t-il voler dans la nuit, que ses ailes — les fréles ailes de la vie - lui sont, á présent, inútiles et, de trop, ses grands yeux ouverts et ronds.

Liens étroits rivant le néant au néant.
Rayage d'un beau revé; ó rive, deja, engloutie.
Ce qui coule avec nous, a, pour role et pour fin, de couler.
Objectivité de la perte.
Mais l'instant oppose, á l'esprit, un formel démenti.

Une possible approche de l'univers n'est qu'une sim­ple approche du possible.
Ici, l'impossible se butte á la perenne question de son inconcevabilité; question cruciale á laquelle il s'est toujours, dérobé.

À jamáis, il y aura un impossible que le possible mine.

Celui qui est bien couvert ne craint pas le froid. Ce-lui qui est nú, redoute autant les brûlures du soleil que les morsures du gel.
S'exposer, c'est d'accepter, d'avance, de payer le prix de son audace.
La parole que rien ne protege nous le ressasse mais nous ne l'écoutons plus.

Sereine vieillesse, comme un bandeau sur les yeux.
Bonté de l'áge.

Ne puise pas seulement dans l'amour ta forcé d'aimer.
Puise, également, celle-ci, dans sa royale forcé méme.

Si le monde a un sens, le livre en a un.
Mais lequel?

Passive raison. Raison des gouffres.

Mon père —je Fai, deja, écrit — á l'Etat Civil me de­clara né deux jours avant ma naissance.
Depuis, je vis aux cotes d'un autre moi-méme, de quarante-huit heures mon aíné.


Au Moyen-áge, en Espagne, sous 1'Inquisition, cer-tains «juifs repentis», que Fon désignait sous le nom de «ma-rrannes» et dont la plupart avaient accepté la conversión pour éviter le cbltiment supréme ou l'expuision, portaient, dans une poche appropriée, bien dissimulée dans la dou-blure de l'une des ampies manches de leurs vetements - en general, celle de gauche - un livre de petit formal, recueil de commentaires de la Thorah ou de priéres d'enfance.
Aussi pouvaient-ils, á chaqué occasion, tandis qu'ils fahaient humblement montre de soumission aux volontés de leurs implacables maítres, á travers l'épaisse étoffe qui le protégeait des regards, caresser, de leur main libre, le livre de leurs ancétres, réaffirmant par ce geste obscur, mais ó combien significatif, leur fidélité aux paroles de leur Dieu invisible et, maintenant, silencieux.

«Accepte les prophéties pour ce qu'elles sont — disait un sage. Il y a longtemps qu'elles ont cessé de briller.»
Et il lança la pierre qu'il tenait dans sa main contre le mur oú le narguait son ombre.

Ce philosophe estimé pensait que la vérité était moi-tié juive et moitié chrétienne.

L'absolue Vérité, n'étant jamáis que l'ambition dé-mesurée de toute Vérité, la question que l'on serait en droit de se poser, alors, est celle-ci: «Comment peut-on divisar, en deux, ce qui est toujours en devenir?»

«Avoir, pour témoin, le livre - écrivait un sage - c'est avoir l'univers entier pour répondant.»
Sauvés par le livre sauvé.

Le juif fait face au juif, comme la page du Livre á la page du Livre.
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Désir D'un Commencement
"...un livre - disait-il - que je n' écrirai jamais parce que nul ne peut l'écrire, étant un livre:
"-- contre le livre.
"-- contre la pensée.
"-- contre la vérité et contre le mot.
"-- un livre, donc, qui s'émiette à mesure qu'il se forme.
"-- contre le livre, car le livre n'a, pour contenu, que lui-míme et il n'est rien.
"-- contre la pensée, car elle est incapable de penser sa totalité et míme le rien.
"-- contre la vérité, car la vérité c'est Dieu et Dieu échappe à la pensée; contre la vérité, donc, qui demeure, pour nous, une légendaire inconnue. "-- contre la parole, enfin, car la parole ne dit que ce qu'elle peut et ce peu est le rien que seul le rien pourrait exprimer.
"Et pourtant, je sais:
"-- que le livre s'écrit contre le livre qui cherche à l'anéantir.
"-- que la pensée pense contre la pensée qui lui envie sa place.
"-- que la vérité s'impose, à travers l'instant vécu, en tant que seul instant à vivre.
"-- que le mot, en s'effaçant, ne révële rien d'autre que la détresse de l'homme qu'il efface".

Prendre congé du jour. Nuit propice.
Noire est la couleur de l'éternité.

La mémoire remue l'ombre; tel l'ombre- chevalier, son univers d'eau.

Mettre ses idées au propre, comme on essange un torchon.

Penser l'origine, n'est-ce pas, d'abord, mettre à l'épreuve l'origine?
Désir d'un commencement.

(Ah ce livre, ce livre qui serait mien, tels mon coeur et mes yeux, telles mes mains et mes jambes.
Ce livre qui emplit mes pensées.
Mais si l'on me demande: "A quoi penses-tu? Tu sembles absent", je réponds,
imperturbable: "A rien".
Ce Rien mon unique livre?)Si, comme l'écrivait Heraclite: "La foudre crée l'univers", peut-être, pouvons-nous dire que la blessure crée l'homme.

Comme, de l'abîme de la nuit, ont surgi les astres, l'homme de la seconde moitié du vingttième siècle est né des cendres d'Auschwitz.

Ne point contrarier le cours du fleuve.
Laisser les rêves d'eau l'aiguiller.

Dans la soif, éviter de boire une eau polluée.
On la reconnaît à sa trouble transparence.
Elle a la limpidité de la non-pureté.

L'évidence, comme le vide qu'elle évince, dérange; car elle met en difficulté la vérité de laquelle elle s'est détachée.
Astres lucides; chaque fois, aux prises avec leur passé.
Le néant scintille.
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LES CLÉS DE LA VILLE
I
Première voix
Prince du grave oubli du dernier jugement du sang
dans le nuage des mains trop pleines
dans le couloir des vices entrecoupés de plaintes males
dans le sillage des cris que découpe parfois l'azur
Deuxième voix
Maitre du sommeil des mers pour la féconde sieste des oursins de l’aube
au cœur de l’homme invisible dont le rayonnement est imprévisible
au centre hurlant du monde à refaire et à défaire sans cesse
Première voix
Prince du jour déchu Une fois la porte a forcé ton mystère
papillon brulant ses ailes au rythme du tambour fatal
paon aux images innocentes de conteur pour petites filles traquées
aux pattes de myriades d'insectes enfoncées dans l'amour
impossible de soi-même
Deuxième voix
Prince des fonds de force ennemi du sage urbaniste
La berge à la nuque de limon ou s'esclaffent les crocodiles
affame le chacal de minuit que ta douleur étonnée étoile
Tu règnes sur chaque voute sur chaque chemin de soif
Prince des cibles de l’air des affres des clochers d'orgueil
Première voix
Maître de l'éternel adieu des fleuves et des miroirs enroués
l'instant est venu de saluer ta raison vierge dont la danse
emplit ton palais d'oiseaux
Dans le mal pourpré des cimes et dans l'or convulsé des
carrières
mille couples devenus cierges promis au silence défient pour
ta gloire les siècles
Première et deuxième voix
Tiendras-tu désormais tête à l'avenir
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APRÈS LE DÉLUGE

La paix est dans la clé
des contradictions dans le soufre
des clartés fugitives Tu es là
pour un instant Désert bleu
aux dunes de pluie La soif est exaucée
L'espace est une brèche Tu brûles dans la nuit
sans murailles Je vois par ton huile
par la mèche de feu qui fleurit au milieu
Je vois par ton amour La paix jeune pie
a l'allégresse multicolore de nos yeux
après le déluge
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L'ÉCRAN PULVÉRISÉ

J'ai vu les morts mourir une seconde fois
couchés sur la mer
J'ai vu les morts inventer les ponts
Si tu passais
je te suivrais Toujours il y a
entre deux feux entre deux bûchers
un empire d'orage ou de dalles
une ivresse de venin à boire dans la fiole
des poissons des hirondelles Si tu
passais je serais le dessein de tes pas
l'entêtement mystérieux du fil et je mettrais
le temps qu'il faudrait pour fixer ton visage
Les jours se comptent sur le bout des voix
tues Puis tout est noir J'ai vu les morts
respirer avec nos poumons et la mer dessous
perpétuer leur souffle tandis que tu échafaudais
pour chaque antenne un écran pulvérisé
de patience
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LE COLLOQUE DES RAMES

Colloque des rames
à la conquête de l’eau Le
secret est dans le bois la parole
dans le désir d'allaiter de ronde
Penche-toi sur la mer lèvres entrouvertes
Penche-toi sur l'infini du sable efféminé
que le rêve inonde pour les coquillages
énigmatiques colts sans songer que la mort
un jour les rendra au soleil
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LE MASQUE DE LA MORT

Le masque de la mort
retrouve ses origines
pierre creuse où l’on voyage
Le droit a rompu les puissantes digues
de l'insolence Les chemins
se croisent au cœur exorbité des eaux
Le droit est une règle de trois
Aussi simple que la magie des lampes
le soir dans la chambre des conspirations
Tu dormiras longtemps avant d'aborder au jour
J'isolerai tes rêves comme la mer ses îles
Tu dormiras avec la mappemonde aux allées filtrées
d'échanges Mais tes yeux n'auront qu'un
regard
Le masque de la mort
retrouve ses traits
empruntés à la légende
Le peintre s'agenouille
devant une ombre aux flèches léchées
dont il fait des pinceaux pour mourir
Tu dormiras avec l'oubli
fontaine des nuits d'homme
sur les places illuminées
Tu dormiras les rames tombées
la barque livrée à elle-même
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SUR LE SOCLE DES MERS
Pour Philippe Rebeyrol

Sur le socle des mers
le bruit apaise le sang
femme nue aux gestes accordés
l'onde femme nue aux gestes
couronnés d'écume
Furieuses sont les maîtresses des îles
aux pins de granit douces pourtant
avec les feuilles et les fruits
Océan ou finissent nos hésitations et nos blessures
Une fois a marqué ma vie pour toujours
Au camp des esclaves les grelots bavent
comme des nouveau-nés Il faut la patience
des murs pour retenir les forçats la confiance
du plomb et du fer Il faut aussi la mort
au collier de ruisseau perdu
Sur le socle des mers
le soleil est un vautour que les vents enivrent
Jamais plus
les larmes fleuriront sur Peau des champs
Jamais plus la révolte ne hantera les sentiers vendus
La route est tracée vous dis-je
et les pas des poètes sont surs
Le souci de vivre est une fleur pressentie
sa forme le parfum sont lieux précis d'exil
Le rêve est assis entre ses deux bourreaux
et ce sont eux qui pâlissent
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L' ÉTRANGER

La coquetterie des choses
à paraitre ce qu'elles sont
Le monde est une coterie
L'étranger y a du mal se faire entendre
On lui reproche gestes et langue
Et pour sa patiente courtoisie
récolte injures et menaces
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