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EAN : 9782080813817
258 pages
Flammarion (04/01/1999)
3.75/5   4 notes
Résumé :
Rome ne s'est pas faite en un seul jour... J. -M. David montre comment, de la deuxième guerre punique à la fin du règne d'Auguste, les populations conquises de l'Italie perdirent leurs différentes identités pour former une communauté, pour l'essentiel unifiée, de citoyens romains. Un aspect fondamental de l'histoire de l'Antiquité.
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Placées sous le signe de la confrontation militaire - puisque la péninsule est le premier terrain des conquêtes romaines -, les relations entre Rome et ses voisins italiens - par ailleurs extrêmement divers quant à leurs langues, leurs cultures et leurs organisations politiques et sociales - entre la prise de Tarente (272) et la mort d'Auguste (14) paraissent exclusivement verticales. La conquête s'accompagne pourtant de phénomènes d'acculturation et d'homogénéisation politique et sociale, regroupés sous le nom de romanisation. Celle-ci marque la construction d'un territoire - en l'occurrence l'Italie vue, à l'époque d'Auguste, comme un ensemble homogène - et induit aussi de profonds changements dans l'organisation politique et sociale de la Ville elle-même : citoyenneté romaine étendue, puissance militaire décuplée, vision universaliste de l'empire.

La romanisation est le fait de deux phénomènes liés qui se manifestent de façon très importante durant ces trois siècles : les guerres romaines et l'homogénéisation culturelle et la formation d'une identité italienne originale. Les guerres romaines se font à l'extérieur de la péninsule (conquête du pourtour méditerranéen) et à l'intérieur d'elle (guerre sociale et guerres civiles), et elles modifient brutalement la société romaine : par les richesses qui affluent à leur suite (or, esclaves ...), par les sanctions prises par Rome à l'égard des cités vaincues (confiscation des terres, distribution des terres aux Romains, dispersion des populations dans l'ensemble de l'Italie), par les relations de clientélisme qu'elles induisent entre les cités italiennes et Rome. Chronologiquement la première, la deuxième guerre punique constitue une épreuve pour les relations entre Rome et ses alliés italiens. La Ville enregistre plusieurs défections (Capoue notamment) qu'elle punit durement à la fin de la guerre. L'aristocratie romaine profite de la victoire pour devenir plus puissante encore, notamment par le biais des expropriations foncières dont elle est la bénéficiaire. Ce phénomène ira en grandissant jusqu'à atteindre un paroxysme au Ier siècle avant notre ère, lorsque quelques individus seulement - Sylla, Pompée, César, Auguste - possédèrent la richesse et le charisme nécessaires pour décider du sort politique de la République.

Les guerres du IIème siècle étendent l'empire de Rome : Espagne, Gaule, Grèce, Macédoine et Asie mineure passent sous le contrôle de la Ville. Un afflux de richesse bouleverse les équilibres démographiques et économiques de l'Italie. de très nombreux esclaves arrivent dans la péninsule à la suite des guerres. Ils sont employés dans les nouvelles structures agricoles ou artisanales qui se spécialisent dans la production d'une denrée ou d'un objet : poterie, blé, huile, vin ou laine. Ces productions sont vouées à l'exportation, signe que l'économie romaine prend une dimension méditerranéenne, ce que souligne le nombre croissant de marchands italiens dans les nouvelles possessions de l'empire. Cet afflux massif de populations serviles ainsi que la nouvelle organisation des campagnes provoque des bouleversements dans les sociétés italiennes traditionnelles : exode rural vers les grandes villes, la plaine du Pô ou les nouvelles provinces, fin des petites propriétés agricoles au profit des villae et des latifundiae. Les tensions naissent à cause de ces nouvelles conditions démographiques et économiques exaspèrent les relations entre Rome et ses alliés italiens qui réclament, pour avoir leur mot à dire dans la définition des politiques romaines, la citoyenneté romaine, jusqu'à provoquer la guerre sociale (91-88). L'armée romaine joue un rôle considérable dans la romanisation, notamment parce que le latin qui y est parlé devient la langue de référence de la péninsule, malgré l'existence d'autres langues italiques (osque, étrusque, ombrien ...). Les guerres civiles usent des mêmes mécanismes et conduisent aux mêmes conséquences. À ceci près que la concentration des richesses et des pouvoirs - via le clientélisme - finit par élire une poignée d'individus aptes à diriger la cité, jusqu'à signifier même la fin de la République et le début du principat. Les guerres civiles entraînent leur lot de confiscation des terres, de redistribution aux soldats (qui se professionnalisent et s'attachent de plus en plus à un seul chef), de bouleversements des équilibres politiques, sociaux et ethniques locaux. Par ce biais, les îles aussi (Corse, Sardaigne, Sicile) sont peu à peu romanisées. La romanisation est parachevée par Auguste qui, après sa victoire sur Antoine, unifie l'Italie en redéfinissant le cadre civique, en accordant la citoyenneté à l'ensemble des habitants du territoire, Sicile comprise, en faisant bâtir des infrastructures (route, postes, bâtiments officiels) et en ouvrant plus largement la vie politique romaine aux élites italiennes.

L'homogénéisation culturelle de l'Italie passe d'abord par les stratégies de peuplement de la Ville : les colonies de droit romain ou latin étendent l'influence de Rome et garantissent les conquêtes. Ces fondations continuent tout au long de la période. Elle passe ensuite par l'inscription dans un contexte méditerranéen où l'héritage hellénique demeure une référence. La Ville, à travers le mythe fondateur d'Enée, se place dans la tradition homérique tandis que, du point de vue de la religion, de la monnaie ou des arts (architecture, sculpture, littérature), elle se raccroche aux modèles venus De Grèce. Cette hellénisation est surtout le fait des élites aristocratiques, romaines comme italiennes puisque les aristocraties italiennes, bien que soumises à Rome politiquement, empruntent les mêmes modèles de développement que l'aristocratie romaine. Leur enrichissement est fondé sur la même possession foncière ; elles recherchent la dignité et l'honneur dans les mêmes comportements (respect de la parole donnée, protection des inférieurs, évergétisme). Certes, les situerions varient entre les différentes parties de l'Italie, plus ou moins hellénisées, plus ou moins ouvertes sur le monde méditerranéen, notamment via le commerce. L'aristocratie romaine, elle, profite en plus de la relation de patronat qui se développe entre elle et ses clients italiens - clients personnels ou cités entières - et qui fait entrer au coeur de la vie politique des Italiens les personnages les plus influents de Rome. Ceux-ci, du même coup, diffusent leurs valeurs dans ces sociétés. Au-delà des marques visibles (architecture influencée par l'hellénisme, importance de l'évergétisme dans les politiques d'aménagement urbain ...), la diffusion de la romanité s'observe dans l'onomastique. La romanisation impacte ici directement le quotidien des populations, ne serait-ce que par l'usage des noms. A la fin du Ier siècle avant notre ère, langue, valeurs communes et esthétique de la cité idéale définissent l'Italie romaine, maîtresse du monde connu.

Le livre de Jean-Michel David s'apparente à un manuel pour licence d'histoire. L'auteur s'en tient rigoureusement à son sujet, sans faire de digressions pourtant faciles sur les différentes guerres de la République ou sur les politiques démagogiques menées par certains tribuns de la plèbe. Manquent peut-être un nombre plus important d'exemples qui donneraient à voir - ou tout du moins à imaginer - les conséquences concrètes de ce processus de romanisation sur les populations italiennes. Il s'agit toutefois d'un manuel solide, relativement accessible et pourvu de cartes intéressantes et d'une bibliographie étoffée. La romanisation de l'Italie apparaît ainsi comme un phénomène intéressant pas seulement en soi, mais aussi parce que l'intégration de l'Italie à la cité - comme unité politique - romaine est à la base de la définition de notre propre citoyenneté, fondée sur le partage de valeurs communes et dépassant les différences identitaires.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Ce sentiment d'appartenance à une même identité du peuple conquérant soutenait la solidité et la cohésion de l'ensemble. Répété à chaque instant de la vie publique, il forçait à l'unité et à la révérence au Prince qui en était le garant.
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>Péninsule italique jusqu'à 476>Italie et Rome antique>République romaine: 500-31 av. J.C. (8)
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