Une couverture très accrocheuse qui m'a fait penser au "Salaire de la peur" et bien sûr aussi à Mad Max, je me suis dit dans le genre "postapo" ça m'a l'air efficace ce... truc !
J'ai donc ouvert cet album, repéré par ma bibliothécaire qui connaît mon goût pour le bon dessin et m'en a dit du bien l'air de rien.
Elle a bien fait pour ce qui concerne le dessin, aussi bien que pour la mise en couleur d'ailleurs !
Pour le reste...
On est bien dans un univers à la Mad Max : en 2070, après quelques turpitudes genre coup d'état, apocalypse nucléaire et autres joyeusetés, la douce France ressemble plutôt aux déserts africains, australiens ou sud-américains.
Quoi qu'il en soit, la mission d'un gros
convoi de véhicules improbables (un gros truck, quelques camions blindés, un scraper surpuissant et surarmé, le tout escorté par des berlines hypervitaminées montées sur d'énormes roues et par une flottille d'ULM) sera de convoyer de la Normandie à Marseille un gros chargement de médocs, denrée devenue si rare qu'elle est
convoitée par tous les pirates qu'il ne manquera pas de rencontrer sur sa route, pirates eux aussi équipés d'engins tout aussi excentriques (une armée de 4L souvent, improbables mais très réussies avec elles-aussi leurs gros, très gros pneus crantés)...
Dans ce
convoi, chauffeurs et convoyeurs sont un ramassis de mercenaires aussi musclés et déjantés que leurs véhicules, aussi dépourvus en neurones et ... aussi peu genrés qu'eux d'ailleurs, car la sexualité n'a plus rien de classique en ces temps troublés !
Le décor est planté et Jef va s'en donner à coeur joie sans se prendre au sérieux, pas plus que son scénariste K.Stevens mais avec beaucoup de talent pour mettre en scène ses camions de oufs, ses engins de chantier et ses bagnoles sorties des usines françaises dans les années 80 : des 205, des R12, des 2CV même, toutes customisées génialement sans retenue aucune, bagnoles et camions qu'il va pulvériser joyeusement sans plus d' égard pour elles que pour leurs pilotes....
Ca baoume, ça crashe, ça wiizze, ça shebamme, ça cabosse sans pitié, ça canarde et ça saigne non stop, en un mot pour les yeux du reluqueur y a du rififi mon kiki, mais pas trop pour ses neurones, du moins ceux qui sont dediés à la sensibilité ou l'intelligence....
Ne cherchez pas trop de cohérence, ni de sérieux comme dans la célèbre série "Neige" (un chef d'oeuvre que je préfère de beaucoup, une référence culte du genre selon moi, beaucoup plus addictive d'ailleurs). Appréciez sans arrière-pensée cet exercice de style graphique, en acceptant (ou pas) le scénario. Car celui-ci n'est que prétexte à un délire qui se croit rigolard mais que j'ai trouvé fort laborieux, nébuleux et pour tout dire... consternant.
Si vous aimez l'humour gore, vous sourirez des allusions sarcastiques au fanatisme écolo, au véganisme, au "transgenrisme". Sinon, tant pis pour vous...
Si vous êtes puritains, vous zapperez peut-être une séquence de sexe un peu... chaud-bouillant quand la patronne du
convoi s'envoie en l'air avec son chauffeur préféré, un type d'ailleurs un peu plus normal physiquement que ses confrères, un peu moins testostéroné, tout aussi bien monté mais euh...pas plus cortiqué.
Vous manquerez ça, tant pis pour vous...
Si vous adulez les frères Bogdanofs, vous serez choqués de les voir croqués par Jef en doux dingues un peu simplets, et...
Tant pis pour vous...
Faut pas trop chercher à comprendre, mais je n'ai pas pu m'empêcher de sourire (un peu) et surtout de reluquer la ballade déjantée dans la poussière et la fournaise, en me disant que Jef a du talent pour mettre en scène des véhicules et pour les fracasser, pour brûler sans se prendre au sérieux nos idoles dérisoires d'antan, même si ça dégage un (mad)max de fumées toxiques ! Ce talent là, il l'a et d'ailleurs c'est moins polluant (peut-être ?) de délirer sur du papier que de produire les vrais Mad-Max.
Il l'a, donc, ce talent. Soit.
Pour le reste, à vous de voir. Moi donc, je me suis rincé l'oeil et me suis dit : so what ?...