Tu entreras dans le siècle en lisant Fantômas

A défaut d'entrer dans le siècle, il est probable que je termine l'année en lisant ce livre.
Une année tellement piteuse qu'il se pourrait bien qu'elle soit un coup de Fantômas !
Car pour moi, pour vous, pour l'auteur de ce livre peut-être, Fantômas est vivant.
Aussi vivant que peuvent l'être Arsène Lupin ou Sherlock Holmes, mais si l'ombre du premier plane encore sur Etretat et si la longue silhouette du second hante toujours Baker-Street, l'imaginaire de Fantômas est lui insaisissable.
Car qui est Fantômas ?
Il est celui que le monde entier recherche, que nul n'a jamais vu, que nul ne peut reconnaître !
Il est le crime, la nuit. Il est la mort ...
Le livre de Dominique Kalifa, paru aux éditions Vendémiaire en 2017, est un ouvrage élégant paré de noir, inquiétant parce que l'incendie, sur sa couverture, y crève l'obscurité par une fenêtre ouverte sur la peur, sur la nuit, sur le crime peut-être ...
Je n'aime pas trop lorsqu'un essai se donne des airs d'abécédaire, c'est souvent l'aveu d'un manque d'ordonnancement dans sa structure.
Mais, ici, la richesse de l'essai est très vite venue happer le lecteur que je suis et dissiper mes inquiétudes.
Il ne s'agit pas évidemment, nous dit l'auteur du livre, de commenter les 32 épisodes du cycle romanesque des aventures de Fantômas.
Lisons-les, relisons-les plutôt !
Mais il s'agit, ici, d'ouvrir 32 fenêtres sur le monde selon Fantômas.
Tel est est le propos de Dominique Kalifa.
Il se veut, il est un éclairage.
Et cela fonctionne.
Seul, un glissement à peine perceptible pourra venir interrompre la lecture du livre.
Les chapitres s'enchaînent, et l'on s'enfonce dans l'imaginaire de Pierre Souvestre, et de Marcel Allain.
Mais pas seulement, dans celui aussi de quelques uns de ses plus célèbres lecteurs qui ont contribué à épaissir le mythe.
Car il fut fort à la mode dans plusieurs milieux littéraires et artistiques.
Et finalement, au bout de sa lecture, cet ouvrage magnifiquement illustré, se révèle être une somme, une analyse littéraire intelligemment menée, un livre avec lequel on aura plaisir à quitter l'année, puisqu'il est maintenant trop tard pour entrer dans le siècle ...

Je l'avoue, avant d'ouvrir ce livre je ne connaissais de Fantômas que deux ou trois films avec Jean Marais et Louis de Funes, vus il y a très, très longtemps mais étrangement je me souvenais des noms : l'inspecteur Juve et le journaliste Fandor et de quelques scènes rocambolesques, mais rien en ce qui concerne les intrigues alors terminer l'année 2020 « Hannus Horribilis » pourquoi pas, d'autant plus que le titre était alléchant…

Ce livre est composé comme un abécédaire a priori mais il y a des astuces, clins-d'oeil : ce qui nous donne, en fait, trente deux entrées comme… le nombre de livres écrits pas le duo d'auteurs de la collection « Fantomas », à savoir Pierre Souvestre et Marcel Allain qui étaient d'illustres inconnus pour moi (eh oui ! et en plus ils ne sont même pas dans ma PAL pourtant ubuesque !) nobody's perfect !

On peut ainsi découvrir la vie au début du siècle, la Belle Époque qui n'était pas si belle que cela, ce que pensait Desnos ou Aragon de Fantômas, le syndicalisme, les grandes manifestations qui rappellent les gilets jaunes qui se sont ralenties autour de 1910. On rencontre aussi des réflexions sur le nihilisme…

Je ne pensais pas que Fantômas avait été autant apprécié par des auteurs tels qu'Apollinaire, Desnos et Queneau pour les plus connus, mais alimentait aussi les conversations d'Aragon ou Sartre, Simone de Beauvoir…ou inspirait des peintres tels que Magritte par exemple.

On apprend au passage, moi du moins, que l'esperluette & que j'aime beaucoup était alors la vingt-septième lettre de l'alphabet, et qu'elle collait bien au duo d'auteurs, ou encore une réflexion sur l'accent circonflexe qui a fini par disparaître sur certaines lettres comme le « i » ou le « u » (j'écrirai toujours disparaître de toute façon ! et en plus j'aimais mieux le vieux François : le mesme est bien plus joli que le même … c'est ainsi que traversant l'Atlantique Fantômas perdit son accent circonflexe… et il fallut attendre 1979 1980 et le téléfilms de Claude Chabrol et Luis Buñuel pour que Fantômas soit correctement orthographié.

On note parfois plusieurs entrées : « o » comme outrances, oeuvres, ou ô et souvent Dominique Kalifa nous donne en fin de chapitre des alternants, Oua oua oua ou Oulipo dans le cas présent. Évidemment, on retrouve Kriminal, Vladimir le fils de Fantômas, ou des références à l'ubiquité…En fait l'auteur m'a permis de découvrir que Fantômas était un véritable mythe du XXe siècle.

Pour la lettre « C », Dominique Farina a choisi la Capitale le journal où travaille Fandor, mais il aurait pu choisir Cruauté, car Fantômas, est une grosse brute…

Comment arriver à trente-deux ? je vous laisse découvrir : petit d'indice, j'ai parlé d'astuces plus haut…

Je n'ai qu'un seul regret devant le travail de recherche magistral de Dominique Kalifa, c'est de ne pas avoir lu les Fantômas pour l'apprécier encore plus pleinement, car les tomes cités sont importants pour étayer le raisonnement.

Ce livre est magnifique, avec des dessins de Camila Farina pour illustrer les chapitres, et une couverture sublime noire avec ces flammes qui s'échappent d'une petite fenêtre… le papier, lui aussi, est très beau et ce livre est une très bonne idée de cadeau et il va rester à portée de mains pour que je puisse m'y replonger.

Le seul bémol de cette lecture est le délai de trente jours pour fournir ma chronique, c'est beaucoup trop court car on est obligé de survoler parfois ce qui est très frustrant et m'a fait pester plus d'une fois…

Un grand merci à Babelio et aux éditions Vendémiaire qui m'ont permis de découvrir ce très beau livre ainsi que son auteur qui m'a impressionnée et donné envie de découvrir davantage ses livres.

Lien : https://leslivresdeve.wordpr..

Cet excellent ouvrage de Dominique Kalifa nous propose un voyage dans l'univers de Fantômas.
Il s'agit bien ici du Fantômas de Souvestre & Allain, celui qui vit le jour en 1911 à Paris et passionna les foules à travers les 32 volumes que comptent ses aventures.
Les volumes qui suivirent la disparition de Pierre Souvestre, repris par le seul Marcel Allain ne parvinrent pas à ranimer le mythe initial qui souleva les foules de la Belle Époque.
Sous la forme d'un abécédaire, l'auteur fait un tour très complet de l'oeuvre de Souvestre assisté d'Allain et évoque également tous les fantasmes que le sulfureux personnage inspira du début du XXème Siècle à nos jours.
Il évoque aussi les multiples adaptations et tout ce qu'a inspiré cette vivante allégorie du crime, de personnages tombés dans l'oubli à des groupes de rock en passant par l'icône pop d'André Hunebelle dans les années soixante.
Cet ouvrage constitue une mine d'informations et d'anecdotes. Fruit d'un travail de recherche très poussé, il est indispensable à tous ceux qui ont un jour croisé le chemin de l'homme aux cent visages.

Si je n'ai jamais lu Fantômas, je l'ai vu. Sous les traits de Jean Marais dans les films d'André Hunebelle, quand j'étais enfant, à travers les films de Feuillade ensuite, à l'université, grâce à Noël Herpe.
En découvrant ce livre, je savais que j'avais en face de moi un mythe, que je connaissais mal et qu'il me tardait de découvrir.
Sous forme d'abécédaire, Dominique Kalifa nous présente ce roman fleuve en trente-deux volumes, écrit par Souvestre et Allain mais surtout à quel point il a inspiré de nombreux artistes. Cinéastes ou poètes, ils sont nombreux à avoir succombé au maître du crime, Robert Desnos en tête !
On retrouve dans Fantômas les codes du roman populaire, il y a des références aux Mystères de Paris d'Eugène Sue (notamment du côté des apaches), tout est démesuré, les meurtres sont toujours plus atroces, les stratagèmes toujours plus machiavéliques, le style grandiloquent à souhait. Mais c'est ce qui a embarqué les surréalistes, ce qui embarquera plus tard l'Oulipo.
Le style est fluide, l'édition est très jolie, notamment grâce au dessins de Camila Farina qui apporte les touches de couleurs qu'il faut, c'est un essai littéraire qui se lit avec facilité, et qui redore le blason du roman populaire.
C'est d'ailleurs le plus grand mérite de ce livre, que Dominique Kalifa en soit remercié, il donne irrémédiablement envie de se plonger dans le texte, de retrouver le plaisir des lecteurs du début du siècle, et de dévorer avidement les aventures de Juve, Fandor et Fantômas. La preuve, je suis passée voir mon bouquiniste.
Il n'y avait pas meilleure façon de quitter 2020 et d'entrer, non pas dans le siècle, mais dans cette nouvelle année !