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Critique de dourvach


На полустанке и другие рассказы... Et je dois commencer par citer ici notre amie Nastasia-B : "À ce niveau d'écriture, on comprend que la littérature est réellement un art. À ce niveau d'écriture, on s'aperçoit que l'outrage d'une traduction ne peut entacher que très faiblement la lumière du propos. Iouri Kazakov parvient à écrire de la prose comme vous rêveriez la poésie : simple, limpide, évidente, belle, puissante, essentielle, magique".

Car j'ai ressenti ce même émerveillement devant certaines oeuvres méconnues d'André DHÔTEL ("La maison du bout du monde", "Ma chère âme"), de Yachar KEMAL ("Terre de fer, ciel de cuivre", "La légende des mille Taureaux"), Tarjei VESAAS ("Palais de glace", "Les oiseaux") : ce monde sensible a cette lumière particulière que seuls quelques-uns parviennent encore à discerner... Iouri Kazakov était du nombre. Une matinée au bord de la rivière, le drame tapi dans une lumière dorée irisant la rosée sur les fougères ... Iouri Kazakov détestait visiblement "la grande ville" (où il était né) : comme on le sent bien, et comme on partage ! Comme on préfèreévidemment les bords de Loire et ceux de l'Evre de Gracq aux particules fines du brouillard jaunâtre parisien... Comme on aime les "écrivains provinciaux", au fond ! (ces Maupassant aux odeurs de vase remuée...). Dans ce monde des premiers éblouissements, dans cette "littérature des Pouvoirs Premiers" (comme l'écrivait Notre "Saint" Ramuz...), le monde sensible respirait à l'état d'enfance : on y souffre, on y pleure, on s'y noie... Les tentacules d'une pieuvre d'eau douce peuvent vous aspirer au fond de la rivière (c'est cet affabuleur de Michka Kaïoulenko qui vous l'affirmait quand vous portiez des culottes courtes, tels Iachka et Volodia...).

(1°) "La petite gare" [1954] nous fait entrer immédiatement dans le coeur et l'âme de la très jeune fille au fichu, tête penchée sur l'épaule de son compagnon haltérophile — celui qui l'abandonne — très lâchement en partance vers la ville (Moscou et ses mirages...) : il n'y a plus qu'à sécher ses larmes dans le foin de la charrette qui l'entraînera vers on ne sait quels autres cieux tristes... Une histoire immortelle, n'est-ce pas ?

(2°) "Une matinée tranquille" [1954] nous fait partager les fanfaronnades (et la connaissance naturaliste) estivales de Iachka — le "cousin des champs" — et son ahuri d'"ami des villes", Volodia (tout juste sorti de son ignorance crasse moscovite) : il a fallu se lever avant l'aurore pour aller pêcher au-dessus du gouffre de la rivière lointaine...

(3°) "Nocturne" [1955] est le récit presque "dhôtélien" d'une longue marche solitaire d'un chasseur dans les senteurs de la plaine et des forêts (cette senteur tenace des pinèdes sèches) jusqu'à un lac lointain... et une rencontre double autour d'un feu de camp...

On repense à ce recueil d'exceptionnelles nouvelles " le Vent du Nord" ("Vindane") de Tarjei VESAAS, pour leur côté âpre et panthéiste... [Comparer la prose de Kazakov à celle de Vesaas n'est pas — pour nous — un mince compliment !]

Ainsi, on a hâte de découvrir très bientôt l'intégrale de ce beau recueil (première traduction : 1962 ; ouvrage reparu dans la collection "L'imaginaire" de Gallimard) et l'autre recueil — conseillé par Nastasia B, que nous remercions ici vivement pour nous avoir amenés discrètement et efficacement aux oeuvres de Iouri K. — "La belle vie" au titre si charmeur...
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