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EAN : 9782070362196
160 pages
Gallimard (04/06/2009)
4/5   20 notes
Résumé :
Une jeune fille aux yeux sombres, en larmes, sur le quai d'une gare battu par le vent froid de l'automne ; deux jeunes pêcheurs, à l'aube, au bord d'une rivière ; un homme qui marche dans la nuit et fait une étrange rencontre...
Découvert par Aragon, l'écrivain Iouri Kazakov donne vie aux gens simples, à la nature généreuse, dans un style limpide et sensible.
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Ce recueil bilingue regroupe trois nouvelles de Iouri Kazakov : La Petite Gare, Une Matinée Tranquille et Nocturne. Kazakov fait partie des rares élus dont je trouve l'écriture somptueuse. Il me rappelle fort, tel un miroir soviétique au meilleur de la guerre froide, l'un de mes auteurs américains fétiches ; j'ai nommé l'immense John Steinbeck.

Vous vous rendez sans doute compte que dans ma bouche ou sous mes doigts, cette comparaison n'est pas un mince compliment ; c'est un Goncourt, un Pulitzer, un Nobel et une Palme d'Or réunis tellement c'est rare et prestigieux.

J'ai hésité longuement à mettre quatre ou cinq étoiles. Me pensant peu objective et ayant un tout petit peu moins goûté la dernière des trois nouvelles par rapport aux deux autres, absolument sublimes à mes yeux, j'ai préféré opter pour quatre, pour vous qui peut-être allez me lire et pas forcément vibrer à l'unisson de ce que j'exprime ici, mais mon coeur est à cinq, indubitablement.

À ce niveau d'écriture, on comprend que la littérature est réellement un art. À ce niveau d'écriture, on s'aperçoit que l'outrage d'une traduction ne peut entacher que très faiblement la lumière du propos. Iouri Kazakov parvient à écrire de la prose comme vous rêveriez la poésie : simple, limpide, évidente, belle, puissante, essentielle, magique.

Il vous raconte des petites histoires infimes, des gens de rien perdus au fin fond du trou du cul de la Russie (l'U.R.S.S. à l'époque), il vous parle d'une rivière, d'un bois ou d'un quai de gare d'une bourgade dérisoire et pourtant, il vous prend aux tripes. En quatre mots, il a évoqué toute une vie, tout un lieu, toute une relation entre des êtres, toute une alchimie entre des gamins et le milieu où ils vivent.

Waouh ! C'est beau, monsieur Kazakov. Ça se passe de commentaire, ça se passe de tout. La seule fois où j'avais ressenti ça auparavant, c'était à la lecture de certaines nouvelles de la Grande Vallée de Steinbeck, notamment, la toute petite intitulée le Petit Déjeuner ou bien encore cette autre du même recueil qui s'appelle le Meurtre. Ici, la même puissance d'évocation, la même sensibilité, le même amour des gens et des lieux qu'il décrit.

En deux mots, mais c'est presque sacrilège de dévoiler quoi que ce soit, La Petite Gare nous parle du départ d'un jeune homme de la campagne pour aller vivre une autre vie en tant qu'haltérophile à la ville tandis que sa petite amie reste au bercail. Une Matinée Tranquille évoque une partie de pêche entre un gamin autochtone et un petit qui vient d'arriver de Moscou. Enfin, Nocturne nous plonge dans une forêt, la nuit, alors qu'on essaie de gagner un bon coin de chasse avant l'aube. Sachez qu'il peut toujours s'y faire des rencontres insolites…

Oh oui, assurément, il y a du talent sous cette plume qui fut révélée à la France par Louis Aragon ; il y a une maîtrise aussi grande à nous parler de l'humide et fraîche Russie campagnarde des années 1950 que celle d'un Steinbeck à nous portraiturer la poussiéreuse et chaude Californie des années 1930.

Qu'est-ce que vous risquez à le lire dans le fond ? Une superbe émotion ou, au pire, une vague indifférence, n'est-ce pas ? Un petit livre minuscule, qui pourra rafraîchir quelques souvenirs de russe à certains et si vraiment vous le trouvez nul et inintéressant, vous aurez le droit de m'insulter mais j'ai vraiment trop envie de vous le recommander pour m'arrêter si près du but. D'ailleurs, souvenez-vous que ce que je baragouine ici n'est que mon avis, donc fatalement pas le vôtre, c'est-à-dire, très peu de chose.
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Ce recueil bilingue comprend trois nouvelles magnifiques de Iouri Kazakov (1928-1982). Elles sont situées dans le Nord de la Russie entre la mer de Barents et la mer Blanche. Les protagonistes en sont des jeunes gens , simples et solitaires : un couple qui se sépare, deux copains pêcheurs, un chasseur et des adolescents et puis la Nature à l'humeur changeante qui influence le comportement des personnages. de micro-drames intenses se nouent alors au milieu de l'immensité.

1.La petite gare (1954) : « C'était un automne gris et froid... » Une jeune fille aux grands yeux sombres comprend sur le quai d'une petite gare que son fiancé attiré par les lumières de la ville ne reviendra jamais.

2. Une matinée tranquille (1954) : «Les coqs ensommeillés venaient à peine ». de lancer leur premier appel, il faisait encore sombre dans l'isba » Iashka se lève quitte son village recouvert par un édredon de brouillard, s'empare de sa canne à pêche, récupère ses petits vers froids et colorés puis s'en va en frétillant retrouver son nouveau copain.Volodia est un Moscovite, un gringalet ignorant…

3. Nocturne (1955) : le narrateur quitte sa maison de nuit pour atteindre à l'aube un lac aux canards. Nous l'accompagnons dans son périple odorant à travers la prairie, les chemins doux et silencieux, la rocaille, la terre fraîche...Et puis nous entendons quelqu'un chanter dans la forêt…

Je lirai assurément le recueil complet.
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Edition bilingue de folio, ces trois nouvelles écrites en 1954 m'ont rappelé des récits de Tchekhov comme « La Steppe » où la nature est omniprésente et glorifiée.
Nous sommes dans le Nord de la Russie dans la région d'Arkhangelsk.
Ces récits sont vibrants d'émotion et de lyrisme. Deux jeunes garçons par «une matinée tranquille» partent, leurs coeurs juvéniles gonflés par le rêve d'une belle prise, mais, la tête envahie d'effrayants « racontars » sur leur lieu de pêche.
Ce récit est rempli d'innocence et de jeunesse, il y règne une atmosphère poétique, la nature est sublimée. La tension crée par l'imagination fertile des deux jeunes garçons et la survenue d'un incident conduit le récit à un paroxysme où Kazakov nous fait trembler, mêlant fantasmagorie et brute réalité. Il met en opposition la candeur des jeunes, la quiétude et beauté de la nature et le drame.
Kazakov est un brillant portraitiste et il peint à merveille l'instant présent, il le sublime.
Dans la nouvelle « La petite gare » c'est la séparation des amants sur le quai de la petite gare qu'il met en scène de façon subtile et en toute dernière minute, quand le train démarre, le récit se déchire en quatre mots, laissant une femme déchirée:
« T'entends…Je reviendrai plus T'entends…».
La nature de Kazakov est baignée de lumière diaphane, inondée de rosée, grouillante de vie lors de ces parties de pêche ou de chasse, elle n'est que silence, douceur, calme et senteur. A lire c'est un régal !
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Ce fut un triomphe lorsque Aragon publia ce recueil: "La petite gare et autres récits" (На полустанке и другие рассказы), dans les années soixante.
L'auteur, Iouri Kazakov, est né à Moscou en 1927 et mort en 1982.
Il venait d'un milieu modeste et était originaire de Smolensk.
Après une carrière de violoncelliste, il sentit grandir en lui la vocation d'écrivain.
ll entra à l'insitut littéraire Gorki.
Les trois nouvelles du recueil ont pour thème commun la Russie profonde des années cinquante, quand elle s'appelait Union Soviétique. La campagne aussi, la vie simple et rustique sont très présentes.
La première nouvelle nous conte une séparation déchirante entre deux jeunes gens sur le quai de la gare: lui est impatient de mener une carrière sportive à Moscou et la séparation n'a pas le même sens pour lui que pour sa jeune fiancée.
Les deux autres nouvelles nous montrent successivement une partie de pêche entre plusieurs adolescents; partie qui à peu de chose près manque de mal se terminer.
Et la dernière enfin aborde le monde de la nuit à la campagne avec ses peurs, ses risques et ses dangers.. Les ours ne sont pas loin et personne n'est à l'abri d'une mauvaise rencontre.
Iouri Kazakov a le don de donner vie et âme aux gens simples et à la nature généreuse quoique inquiétante.
Ses personnages sont forts et pittoresques: femmes dures qui assument une vie difficile, filles tendres laissées par des butors vaniteux, hommes sans peur qui affrontent la nature sans ciller.
Un livre à savourer, pour se laisser transporter dans une atmosphère spéciale et authentique..
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À la Chasse
Nouvelle de Iouri Kazakov

Ne à Smolensk situé en Russie dans le sillage des guerres, comme si c'était prédestiné de le dire, en 1927 en Russie communiste, pas moins significative de l'ajouter, Iouri Kazakov, fils d'ouvrier, doit son salut à la qualité de ses études professionnelles qui le destinent tour à tour vers le génie civil, puis la musique et enfin l'écriture.
Il me fait penser à Jakes Helias qui, élève studieux et brillant, aura la chance d'obtenir une bourse qui lui permettra d'accéder à l'université à l'issue de laquelle le métier d'enseignant lui tendait les bras..
Iouri n'est pas qu'un contemplatif, il scrute les âmes et dans cette Russie bolchevique il va en voir de toutes les couleurs. Il sera, la famille sera d'abord affligée par la déportation du père au goulag pour avoir refusé de dénoncer un crime. Cela impactera sa vie comme si c'est lui qui l'avait fait -surtout quand on n'a rien fait . La famille alors s'était exilée à la rue Arbat de Moscou, quartier des artistes ou Pouchkine demeura un temps. Les Kazakov vont y vivre chichement. Iouri retournera au pays qui l'a vu naître. Il ne reconnaîtra plus rien, plus personne ; le sentiment sera l'amertume et il tournera le dos définitivement à son cher pays. À propos de la musique, musicien et professeur de conservatoire, Iouri n'obtiendra pas le poste qu'il convoitait à cause des antécédents paternels. Il tournera le dos à la musique définitivement. Il lui restera la littérature et là, il va engager de sérieuses études comme il a toujours su le faire, sa sensibilité d'artiste va être mise à l'epreuve. . Il va écrire la nouvelle : « La Petite gare » qui est un joyau de la littérature russe, ainsi que de nombreuses autres nouvelles empreintes d'un réalisme poignant et de poésie . On ne sort pas indemne de telles lectures tant l'humanité qui s'en dégage est attachante.
Iouri a des valeurs, et une culture, il a vu du pays et se projette à travers des personnages pour lesquels nous avons une empathie certaine.
Il s'épuisera dans de telles conjonctures, sa vie ne sera jamais apaisée à l'image du Dniepr finalement qui aura vu tant de soldats le traverser pour des issues incertaines ..
Sur la tard, il va ne plus rien produire et se mettre à boire. Il quittera sa maison de Moscou pour se réfugier à la campagne dans sa datcha où il ne sera plus que l'ombre de lui-même. Il n'y aura pas d'alternance et encore moins de rémission : le dépit pour le dépit. Les épisodes ensoleillés de sa vie brilleront à jamais dans son dos..

Et si comme cela ne suffisait pas à son destin éprouvé, cabossé, de sa mort alors, sa datcha sera dépouillée et des manuscrits emportés que l'histoire ne dit pas s'ils tombèrent un jour entre de bonnes mains..

«  .. il gratta l'herbe, écarta les marguerites aux longues tiges solides, mais il n'y avait rien qu'une terre grise, de vieilles feuilles pourries, de petits bolets gluants ; des fourmis se traînaient, les gouttes de sang d'un fraisier tremblotaient. « Naturellement … C'est le tourbillon de la vie, se disait Piotr Nikolaievitch déçu et chagrin. Tout passe, tout change .. Voyons' ça suffit, avons-nous même été ici autrefois ? » il se leva, regarda autour de lui : c'était la, quelque part sous un sapin, qu' ils avaient leur hutte. Où la chercher ? Elle était si bell, si fraîche le jour, si chaude la nuit, cette hutte ! Comme il l'avait bien construite, avec son père !.. Où était donc ce sapin ? Est-ce que tout ça, il ne l'avait pas rêvé en fin de compte ? »

Ah' ces rêves qui deviennent rêves d'un passé réel heureux qui a prit fin dans de tristes circonstances dont je mesure plus encore avec Kazakov qu'ils déchirent le coeur des hommes comme je ne l'avais imaginé, porté à croire dans ma solitude que ça n'arrive qu'à soi-même. Je ne pense pas que ça aide dans la vie d' apprendre que ça arrive aux autres : un tel écho ne fait qu'aviver des plaies ..comme un bateau qui se fracasse contre un récif pensant rejoindre la terre ferme !..
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Les coqs ensommeillés venaient à peine, à peine de lancer leur premier appel, il faisait encore sombre dans l'isba […] quand Iachka se réveilla. […] Le village était recouvert par le brouillard, comme d'un grand édredon en duvet. Les maisons les plus proches étaient encore visibles ; plus loin, on les devinait à peine, de simples taches noires, mais plus loin encore, près de la rivière, on ne voyait plus rien et il semblait qu'il n'y avait jamais eu ni moulin à vent sur la butte, ni tour de guet pour l'incendie, ni école, ni forêt à l'horizon… Tout avait disparu, était maintenant caché et l'isba de Iachka semblait le centre de ce petit monde replié sur lui-même.

UNE MATINÉE TRANQUILLE.
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Debout sur le marchepied, le garçon considérait la jeune fille d'un air sombre, puis il rougit et lui jeta à mi-voix :
- T'entends… Je reviendrai plus ! T'entends…
Il eut un rictus, inspira l'air avec force, dit encore quelque chose d'inintelligible, de méchant, et, après avoir pris sa valise sur le marchepied, se glissa de biais sur la plate-forme.
Aussitôt la jeune fille se voûta un peu, baissa la tête… Les wagons filaient à côté d'elle, les traverses avaient un halètement sourd, ça grinçait, ça chuintait, mais elle regardait fixement, sans ciller, une tache de mazout irisée sur un rail qui, un instant cachée sous les roues des voitures, apparaissait à nouveau, elle la regardait pensivement, timidement, se penchait vers elle sans s'en rendre compte, toujours plus près, comme si la tache lui eût fait signe, l'eût attirée. Tout son corps se tendit, elle serra sa main sur son cœur qui souffrait de façon insupportable, ses lèvres timides, encore presque enfantines, étaient toutes blanches.
- Attention ! lança-t-on soudain en un cri sauvage au-dessus de sa tête.

LA PETITE GARE.
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Les coqs ensommeillés venaient à peine de lancer leur premier appel, il faisait encore sombre dans l'isba; la mère n'avait pas trait la vache, et le berger n'avait pas mené le troupeau dans les pâtures, quand Iachka se réveilla.
Еще только-только прокричали сонные петухи, еще темно было в избе , мать не доила корову и пастух не выгонял стадо в луга, когда проснулся Яшка.
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Il fumait à bouffées rapides une cigarette bon marché, crachait, se frottait le menton d'une main rouge aux doigts courts et fixait la terre d'un air maussade.
Près de lui se tenait une jeune fille aux yeux gonflés, dont le foulard laissait échapper une mèche de cheveux. Sur son visage, blême et fatigué, il n'y avait déjà plus ni espoir ni désir ; il semblait froid, indifférent. Et c'est seulement dans ses yeux sombres et pleins de détresse que se cachait quelque chose de maladif et de secret.

LA PETITE GARE.
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J'eus la curiosité de demander pourquoi Piotr Andréiévitch avait félicité Sémione. Celui-ci se troubla et recommença à s'en prendre à sa paume.
- Comme ça, en somme…, marmonna-t-il.
- Il nous compose des tas de musique, expliqua volontiers Liochka. Il a même joué deux fois dans notre école, et aussi au club…
- Et alors, fit Sémione en se retournant vers lui, et après, quoi ?
- Rien…
- Alors, boucle-la !

NOCTURNE.
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