L'un de mes auteurs du moment est l'écrivain hongrois
Imre Kertész. Pourtant, je me souviens être resté sceptique et dubitatif après la première lecture de l'une de ses oeuvres : "Un Autre, chronique d'une métamorphose". Mais je prends aujourd'hui conscience qu'il est absolument nécessaire dans l'appréciation d'une oeuvre, de s'intéresser à l'auteur, à sa vie, son parcours, ses idées. On ne peut pas dissocier une oeuvre de son créateur. Attention, je parle d'oeuvre artistique et non d'oeuvre marchande ou commerciale !
Un lecteur recherche dans la littérature à la fois des histoires et des univers auxquels il n'est pas confronté dans sa vie quotidienne. Il a soif d'aventures et d'images pour mieux comprendre son existence. Ces histoires et ces univers ne tombent pas du ciel (si c'était le cas, dites-moi à quel endroit ils se posent pour que j'aille en ramasser). Ils sont les produits d'une personne et d'une pensée, construits non pas pour les bons plaisirs des consommateurs que nous sommes, mais pour répondre à un besoin créatif irrésistible. Je crois que c'est cette impulsion créatrice que nous recherchons en tant que lecteur et que derrière l'oeuvre nous voulons rencontrer le créateur. C'est parce qu'
Imre Kertész est un drogué de la littérature qu'il a attiré mon regard.
Dans "
Roman Policier"
Imre Kertész nous surprend un peu, car, paradoxalement, il s'agit d'une commande de son éditeur, en 1975, pendant la période communiste. L'intrigue de ce court roman (une centaine de pages) se déroulait initialement en Hongrie et dévoilait les rouages d'un système totalitaire visant au contrôle et à l'encadrement des individus. Pour éviter les affres de la censure,
Kertész a transposé son récit dans un quelconque pays d'Amérique Latine (dans les années 1970, ce continent fut aussi confronté à des contrôles politiques similaires). Par l'utilisation des récits imbriqués permettant le changement des points de vue et, comme souvent chez
Kertész, l'emploi d'une tonalité ironique, les mécanismes d'une société étouffée et étouffante sont pointés du doigt. Vouloir tout contrôler entraîne à l'oppression généralisée. Notre cher président, ainsi que certains de ses ministres devraient l'avoir constamment à l'esprit.