Quel est l'élément qui a contrarié la lecture de ce roman qui avait tout pour me séduire et qui me laisse pourtant un sentiment mitigé, contrasté ?
Est-ce la surcharge de vertus pour un seul homme ?
C'est plutôt la soumission constante d'un berger pourtant lettré qui m'a agacé.
Dans l'
Algérie coloniale de 1914, l'effroyable histoire de l'insignifiant Yacine contraint par un caïd de prendre la place de son fils atteint d'une insuffisance cardiaque pour aller combattre en France afin qu'il ne perde pas la face m'a quelquefois transporté dans de captivantes sensations romanesques mais m'a souvent laissé sur le sable du désert.
Est-ce l'écriture limpide de l'auteur qui a parfois manqué de mordant à faire revivre les atrocités de cette boucherie monstrueuse que j'ai jugé un peu trop tièdes ?
C'est peut-être quatre ans plus tard, le retour au pays de Yacine muté en Hamza Boussaïd qui m'a semblé insipide et bien lent à la recherche de ses vrais parents qui dès son départ ont été bassement chassés par l'impitoyable caïd.
C'est probablement sa servilité à défendre l'honneur d'un ingrat qui ne souhaitait que sa disparition qui m'a asticoté ou c'est sa docilité à se laisser bafouer pour avoir défendu l'intégrité d'une femme qui a abusé de son amour qui m'a, sans aucun doute, le plus exaspéré.
Jusqu'à ce que tout bascule : « La peur qui m'essorait les tripes, se transforma en une haine dont je ne me croyais pas capable. Je me voyais déchiqueter de mes mains nues l'homme qui avait bouleversé le cours de mon existence et fait de moi une bête traquée. »
D'avoir retrouvé Zorg, un colosse mal léché, compère de tranchée qui a constitué une petite armée pour récupérer les territoires exploités en
Algérie par l'envahisseur français, va inciter Yacine à surmonter les pires épreuves que la vie lui réserve sans pour autant perdre son humanité ni sa loyauté. On est pourtant qu'à l'aube de tout ce qui va l'ébranler.
« L'existence m'avait appris à me méfier de ce qui ne me faisait pas souffrir, à ne percevoir dans mes rares joies que le prélude de mes peines. »
Finalement, ce roman m'a davantage plu à la fin qu'au début. Les ressentis de chaque lecteur ne seront jamais identiques. Faites donc votre propre opinion de cet ouvrage qui possède toute l'élégance et l'intensité de l'écriture de
Yasmina Khadra ainsi que la grâce de son immense expérience de romancier.
Comme dit ma petite fille de six ans : dans la vie, ni les gens, ni les choses, rien n'est pareil sauf les chaussettes. du coup, je n'ai plus le moral dedans.