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Critique de NMTB


NMTB
19 décembre 2014
Avant d'être un écrivain Pierre Klossowski était un penseur. Il a entrepris des études de théologie, traduit des oeuvres de Nietzsche, Heidegger, Wittgenstein, Walter Benjamin ou même le Journal de Kafka et n'a commencé à écrire de la fiction que quarante ans passés. Autant dire qu'on est loin d'avoir affaire à un inconscient, pas plus qu'à un écrivain-né. Auteur exigeant donc, avec un univers très particulier.
Trois livres écrits dans les années 1950 sont réunis sous le titre des Lois de l'hospitalité.
« Roberte, ce soir » ressemble à une pièce de théâtre un petit peu érotique dans laquelle un homme, Octave, éminent professeur de scolastique, a inventé des Lois de l'hospitalité qui consistent à offrir sa femme à ses invités. « La révocation de l'édit de Nantes » est une reprise de ce thème, mais d'une manière plus romanesque et plus développée. Elle prend la forme de deux journaux, celui d'Octave et celui de Roberte, qu'on lit alternativement. Enfin, « le souffleur » est une mise en abîme où l'auteur de « Roberte, ce soir » est confronté à des évènements étranges, plus embrouillés les uns que les autres. Les mauvaises langues pourraient dire avec justesse que c'est un prototype d'autofiction (avec énormément de fiction, toutefois) germano-pratino-intellectualiste. L'essentiel de l'histoire se passe en effet à Saint-Germain-des-Prés et l'on croise des personnages indéniablement inspirés par des personnalités connus de l'époque.
Mais il ne faut pas donner trop d'importance au caractère autobiographique de ces trois livres. S'ils sont ancrés dans l'actualité de l'immédiate après-guerre, avec quelques allusions à la politique, à la collaboration, ce n'est pas le sujet. Comme autrui, la vie de couple, la psychanalyse, la religion, l'art, tous ces thèmes ne sont que des vecteurs pour mettre en scène un « je » et son rapport au monde à travers le langage. Qu'est-ce qu'un nom, une identité ? Roberte, en tant qu'être pensé ? Un constant retour sur soi. Un abîme sans fond décrit avec un humour burlesque ou subtil. Difficile de donner plus de détails sur ce livre foisonnant qui exalte la confusion dans une recherche de cohérence, sinon que l'auteur a un véritable penchant pour dévoiler les dilemmes. Lors d'une fameuse conversation avec le narrateur, un célèbre psychanalyste s'exclame : « Théodore, vous êtes un chef-d'oeuvre d'inconséquence ! A force de vouloir maintenir le pour et le contre, votre raison s'exténue. » L'important c'est de le savoir.
Et ce n'est pas sans raison que ces trois livres ont été réunis, ils se complètent les uns les autres. On aurait aussi pu ajouter « le baphomet », qui est tout aussi délirant que « le souffleur » mais plus fantastique.
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