La lecture de ce titre a résonné pour moi avec l'actualité. le bateau sur lequel était Asha a fait naufrage. Elle s'est échouée sur le rivage, seule, sans savoir ce que sont devenus les autres, sans savoir ce qu'est devenu son frère. Alors, elle part à sa recherche, et va de rencontre en rencontre sur cette île. Et qui rencontre-t-elle, espérant que ces personnes pourront l'aider dans sa quête ? Des monstres mythologiques, des êtres qui, dans leur majorité, ne pensent qu'à eux, promettent, et ne font rien pour l'aider. Elle aussi commence à se métamorphoser, et il lui est nécessaire de se rappeler, de scander qu'elle n'est pas un monstre. Non, elle n'en est pas un, et peu importe ce que l'on peut lui dire. La transformation physique ne lui ôte pas sa capacité à s'ouvrir aux autres, à aider les autres, à leur montrer qu'eux non plus ne sont pas des monstres.
La force de ce roman est d'utiliser les créatures mythologiques non pour en dresser un catalogue à usage pédagogique, mais pour nous parler de notre époque, de ceux qui prennent le risque d'accueillir les autres, et qui en paient parfois très cher les conséquences, comme Arachné, dans ce récit. D'autres trouveront la force de s'émanciper, au péril de leur vie – ce qui, malheureusement, est toujours possible de nos jours, pas si loin de chez nous.
Pour la guider, nuit après nuit, un jeune pêcheur est là, prêt à veiller sur elle, quoi qu'il arrive, quoi que les autres fassent ou soient prêts à faire. Faire confiance n'est pas toujours facile.
Tendrez-vous la main à Asha et aux siens ?
Commenter  J’apprécie         150
Quand je me suis lancée dans ma lecture, je n'avais pas lu ce résumé. du moins, je ne l'avais pas compris comme tel. Je pensais effectivement que le roman proposait un univers 100% mythologique. En vérité, il va bien au-delà de ça. C'est une histoire qui se lit vite car il y a peu de pages et parce que les chapitres sont courts et captivants. le roman est divisé en 4 parties et le parallèle mythologie – réalité est très bien fait.
Asha est un personnage attachant, dotée d'une grande force. Elle a su m'étonner tout au long de l'histoire, se découvrant petit à petit et comprenant davantage ce qui fait son charme et ce qui va lui permettre de résister face à Circé. Et plus on avance, plus la frontière entre la réalité et le rêve devient fine. Il est facile de comprendre le parallèle qui est fait. Bien évidemment, je ne peux pas vous en parler avec moult détails parce que ça peut vous spoiler et cela gâcherait fortement la surprise.
Surprise, oui, car je l'ai totalement été face à ce roman. Je ne pensais pas du tout embarquer pour une telle aventure. Au-delà de la simple considération romanesque, c'est une véritable leçon qui est donnée ici, une prise de position pour l'humanité. Les mots sont beaux, délicats, il y a une vraie poésie qui se cache entre les lignes. le ton est donné dès le départ mais devient plus fort à mesure que l'on s'approche de la fin. Une fin très positive, d'ailleurs, qui est absolument nécessaire face à ce dont on parle ici. cela nous laisse de quoi réfléchir une fois le roman refermé, notamment sur les conditions d'accueil, sur les positions politiques des pays, sur l'humanité qui perdure face à tout cela grâce aux habitants, grâce aux gens.
Au final, on ressort de là avec beaucoup d'émotions, des questions peut-être pour affronter la réalité, la vraie, celle qui attend dehors et pour laquelle on détourne parfois le regard. C'est une leçon d'humanité que l'on reçoit ici, qui pique tout droit dans le coeur et qui est nécessaire. C'est un roman qui, en plus, est accessible à des lecteurs plus jeunes, c'est de base un roman +/- jeunesse, mais qui plaira aussi aux plus âgés.
J'ai dévoré ce roman et je le recommande chaudement.
Commenter  J’apprécie         70
Marco ouvrit la porte de sa cabane en grand. Sa mère étouffa sa tristesse et se résolut à le quitter, quand son pied buta sur le vieux livre que son fils avait jeté par terre. Elle le reconnut, le ramassa, en épousseta la couverture et sourit, un peu fadement, en se remémorant les soirs où, suspendu à ses lèvres, Marco en redemandait à chaque page qu’elle tournait.
« Ces histoires te plaisent toujours ? demanda-t-elle en laissant ses doigts glisser sur la tranche.
– Non, répondit Marco. Pas du tout. Elles ne valent rien, elles sont remplies de choses affreuses.
– C’est que tu les lis mal… Ce livre a traversé les siècles et pourtant, chaque fois, il raconte l’histoire de celui qui le lit. Il est précieux, tu ne devrais pas le laisser traîner n’importe où.
– Oh, pardon ! ricana-t-il. Il est précieux ? Donne-le-moi, je vais m’occuper de lui. Je vais l’installer dans le lit à la place de cette fille dès que je l’aurai jetée dehors. Est-ce qu’elle a traversé les siècles, elle ? Non. Elle n’a même pas réussi à traverser la mer ! Ne t’en fais pas, il sera bien ici, tu peux compter sur moi. »
page 96
CE QUE LES BÊTES CHUCHOTENT À LEURS PETITS
Écoutez ce pas lourd résonner dans le bois,
Ce bruit sourd que tous ici connaissent.
Ce fléau qui s’abat sur les monstres aux abois
C’est Alcide, Hercule, Héraclès !
Œil jaune, crocs blancs, griffes noires
Regagnez vos tanières ou craignez sa massue !
Ailes, pattes, cornes, voraces mâchoires
Surveillez vos arrières, Alcide est revenu.
Le Ciel est maculé du lait de sa nourrice,
La Terre, du sang de ses prouesses.
Au berceau, il broyait deux serpents sous sa cuisse,
À la gloire, il offrit sa jeunesse.
Œil jaune, crocs blancs, griffes noires
Regagnez vos tanières ou craignez sa massue !
Ailes, pattes, cornes, voraces mâchoires
Surveillez vos arrières, Alcide est revenu.
Le feu de sa colère emporta ses enfants,
Et sa femme a suivi dans les braises.
Aux bêtes on le voua ; ce fut son châtiment
Pour que la bête en lui se taise.
Œil jaune, crocs blancs, griffes noires
Regagnez vos tanières ou craignez sa massue !
Ailes, pattes, cornes, voraces mâchoires
Surveillez vos arrières, Alcide est revenu.
Mais vêtu de la peau du lion qu’il étrangla,
Confondu avec la proie qu’il chasse,
Ceux qui le voient rôder se murmurent tout bas,
Est-ce un homme, ou un monstre qui passe ?
Œil jaune, crocs blancs, griffes noires
Regagnez vos tanières ou craignez sa massue !
Ailes, pattes, cornes, voraces mâchoires
Surveillez vos arrières, Alcide est revenu.
Page 44
CHANSON DE LA MAGICIENNE
Dans son palais, rumine sans cesse
La magicienne abandonnée.
Enfant ! Fuis devant ses caresses,
Ou tu pourrais le regretter.
Si tu aperçois sa baguette,
Ne dis pas que tu n’as rien fait !
Des cornes poussent sur ta tête,
Et des griffes au bout de tes pieds.
Des héros l’ont drapée de promesses,
Sans lui offrir un second baiser.
Ils ont fui à toute vitesse,
Et son cœur s’est ratatiné.
Si tu aperçois sa baguette,
Il est trop tard pour pleurnicher !
Des cornes poussent sur ta tête,
Et des griffes au bout de tes pieds.
Dans ses yeux, petite princesse,
Où se miraient ceux qu’elle chérissait,
Brûle une flamme vengeresse,
Heureux qui peut lui échapper !
Si tu aperçois sa baguette,
C’est que tu l’as bien mérité !
Des cornes poussent sur ta tête,
Et des griffes au bout de tes pieds.
Les poissons brillants s'étaient remis à nager. La cascade ronronnait. L'ombre du feuillage se rayait de lumière tiède. La source était redevenue un décor indolent débarrassé des caprices des créatures qui lui rendaient visite. Sans baigneurs, sans harpies, sans magicienne. Mais pas sans monstre.
A l'occasion de la Rentrée littéraire Automne 2023 organisée par Occitanie Livre & Lecture, Tristan Koëgel est venu présenter son nouvel ouvrage "Quand on dansait sur les toits" (Ed. Didier Jeunesse, 2023).
Enregistré à la médiathèque José Cabanis de Toulouse le 21 septembre 2023.