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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Une histoire truculente qui nous vient de Malasie, d'une écrivaine chinoise.
Au nord de Kuala Lumpur, Lubok Sayong, un village situé “ à la confluence de la volonté divine et des lois de la météorologie », est inondé plusieurs jours par an.
Y vit un trio insolite, mais oh combien attachant.
Beevi, succulente petite vieille qui s'engueule avec son poisson qui ne rêve que de déguerpir, Auyong, son paisible copain, un vieux chinois, propriétaire d'une conserverie de litchis,et Mary Anne, fillette de onze ans, orpheline très futée , recueillie par Beevie, par un concours de circonstances.

Dans cette communauté mixte de malais, d'indiens et de chinois, malgré les divergences ethniques et religieuses, tous les ingrédients de la chaleur humaine sont présents : l'honnêteté, l'amitié, la tendresse, la solidarité, la tolérance.
Mami Beevi est une conteuse hors pair à l'auditoire fidèle. Elle a trés mauvais caractère et pas sa langue dans sa poche, et peut être follement amusante quand elle est de bonne humeur, malheureusement ça n'arrive pas souvent,
Mary Anne est une petite fille au caractère bien trempé, qui se lance dans des entreprises surprenantes pour son âge, tout en rêvassant que sa mère est une star de cinéma, et voyant des anges aux endroits les plus bizarres, même dans les journaux ou à la télé,
Alors que Auyong, le neutron du trio, est un doux qui observe la vie, toujours au service de Mami Beevi, pour laquelle il semble avoir « une sorte d'amour de vieux, tranquille et sans chichis. », pourtant, à ses heures....
Quand aux personnages secondaires, ils ne sont pas moins farfelus, tout aussi attachants, particulièrement, Ismet et Miss Boonsidik, que je vous laisse découvrir.

Ceux sont Auyong et Mary Anne, qui s'alternent, pour nous raconter l'histoire foisonnante d'anecdotes trépidantes et insolites, mi-réelles, mi- imaginaires, de ce sacré bled caché derrière des plantations d'hévéas, et de ses habitants à la douce folie. le style directe, simple, sans fioritures, pétillant d'humour fait le sel de ce récit fantasque et touchant.
Sublime !

« Je voudrais dire à ceux qui passent, à qui voudra bien m'écouter, que les leçons viennent de la vie et non des histoires. »
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Autant le dire tout de go, certaines régions du monde me sont inconnues. Je ne les connais que par les clichés idylliques d'agences de voyages. Vous savez ce genre de montage photos qui vous présente l'Australie sous forme de carte postale, un magnifique kangourou bondissant devant les sables écarlates de l'Ayers Rock, le tout sous un un ciel azuré à souhait ! Il en va de même pour l'Asie du Sud-Est. Que sais-je de cette région ? Hormis que la gastronomie thaïlandaise est délicieuse, que les plages d'Indonésie sont paradisiaques et qu'il y a eu une guerre au Vietnam ? Pas grand chose d'autre malheureusement. Et si vous me demandez ce que je connais de la Malaisie, j'aurai bien du mal à vous répondre.

Enfin, ça c'était avant, puisque les éditions Zulma ont toujours eu l'art de me faire découvrir des cultures et des auteurs de l'autre bout du monde sans tomber dans le travers de lieux communs. Sans vouloir leur faire une publicité particulière, je dois bien avouer que les romans traduits chez Zulma m'ont rarement déçu. Pour cette petite analyse-ci, je vous invite à traverser mers et océans afin de faire un tour du côté de la littérature malaisienne avec La Somme de nos folies de Shih-Li Kow.

L'histoire:

Dans la Malaisie actuelle, plusieurs destins vont soudainement se heurter les uns aux autres. Il y a d'abord l'impétueuse Beevi, qui mène sa vie, tambour battant, en compagnie de son énorme poisson domestique. le vieil ami fidèle, Auyong, qui gère la conserverie de litchis du coin et enfin la jeune Mary Anne, une orpheline de Kuala Lumpur, sur le point d'être adoptée. de cette rencontre inattendue, entre ces trois personnages, se dessinera des tranches de la vie quotidienne malaisienne. Entre désir d'une modernité à l'occidentale et envie de garder les choses d'antan.

“ Je me félicitais du départ des bénévoles, nous laissant le plaisir d'assister à de telles scènes. Attention aux maladies véhiculées par l'eau, répétaient les gens de la capitale. Attention aux crocodiles et aux serpents. Attention de ne pas marcher sur la carcasse pourrie d'une bête morte. Gare au choléra. Gare aux tourbillons et aux courants. Ils publiaient des consignes de survie dans les journaux qui n'étaient pas distribués ici et qu'on lisait dans la capitale en sirotant un café latte frappé, bien installé au sec chez Starbucks. Gare à la vie. “

Le style:

La plume de Shih-Li Kow va à l'essentiel, elle ne s'embarrasse pas de fioritures, ce qui permet au lecteur d'être immergé dans le quotidien des personnages et de faire connaissance avec cette culture malaisienne. L'auteure sait jongler avec l'humour, la liberté de ton mais aussi avec un certain côté tendre. Cette manière de procéder fait en sorte que l'on s'attache, quasi instantanément, aux différentes petites histoires que l'auteure nous conte calmement et qui finissent par devenir la trame du livre.

Au niveau de la structure narrative, La Somme de nos folies est un roman duophonique puisque ce sont les voix de Mary Anne et Auyong qui s'alternent afin de donner corps à l'histoire. Ainsi, peut-on lire une même situation mais qui est vécue et racontée par deux personnages ayant des perceptions différentes sur les choses ; l'un étant un enfant et l'autre un vieil homme.

Le thème de la filiation:

Malgré les diverses oscillations de la vie des protagonistes, il y en a un thème qui revient sans cesse, en filigrane, tout au long du roman. Il s'agit de celui de la filiation — ou plutôt d'absence de filiation. Derrière l'espièglerie de Mary Anne, on aperçoit les cicatrices d'une enfant orpheline qui imagine sa mère en actrice de cinéma et qui pense soudainement l'avoir retrouvée en la personne d'une certaine Violette simplement parce qu'elle correspond en tout point au fantasme qu'elle se construit depuis toute petite.

D'autres personnages ne sont pas en reste sur ce thème de la filiation manquée puisque l'on retrouve l'histoire d'un avortement forcé afin de protéger l'honneur de quelques-uns ou encore la vie d'une jeune adulte, orpheline elle aussi, qui n'a jamais été adoptée (au contraire de Mary Anne) et qui se construit seule dans la frénésie de la capitale malaisienne, Kuala Lumpur.

La Malaisie :

Ce livre est aussi l'occasion d'avoir un aperçu sur ce pays tiraillé entre la modernité, représentée par la capitale malaisienne, et la vie provinciale, représentée par Lubok Sayong (ville imaginaire où se déroule le récit). Sans jamais forcer le trait, l'auteure nous emmène dans cette dichotomie où certains veulent continuer à vivre “à l'ancienne” tandis que le monde contemporain les rattrape bien malgré eux.

La Somme de nos folies permet aussi de rentrer dans cette Malaisie à majorité musulmane où l'on dénombre quand même pas moins de 20% de bouddhistes et un peu moins de 10% de chrétiens. Au niveau des ethnies, il en va de même puisqu'on y retrouve trois ethnies principales: les malais, les chinois et les indiens. Tout ce petit monde vit ensemble avec ses aléas quotidiens … comme dans l'histoire du roman.
En conclusion, Shih-Li Kow signe une histoire simple où la narration pourra surprendre les lecteurs et lectrices francophones puisque le rythme n'est jamais effréné, à l'image de la culture asiatique serai-je tenté de dire. La Somme de nos folies ne verse jamais dans l'excès ni dans le tape-à-l'oeil et déroule la vie actuelle en Malaisie non sans un certain sens de l'humour qui fait mouche 😉.
Lien : https://lespetitesanalyses.c..
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Auyong un chinois à la retraite, qui a repris la gestion d'une conserverie de litchis, est bien intégré à Lubok Sayong, cette petite ville de Malaisie, à une trentaine de kilomètres de Kuala Lumpur. Il s'entend particulièrement avec Mama Beevi, une femme au caractère bien trempé qui n'a pas sa langue dans sa poche et qui est toujours en colère avec les enfants des trois femmes que son père a épousé après la mère de Mama Beevi. Quand Assunta, l'une de ses demi-soeurs - la seule qui trouvait grâce à ses yeux -  meure avec son mari dans un accident de voiture, elle accepte de recueillir Mary Anne, une petite fille de onze ans que le couple venait juste d'adopter. La petite qui sort tout juste de l'orphelinat Sainte Mary, se retrouve par hasard, sous la responsabilité et dans la maison que Mama Beevi décide de transformer en gîte.

La somme de nos folies est une chronique mi-tendre, mi-amère, où l'on retrouve une galerie de personnages truculents et hauts en couleur, à commencer par Mama Beevi, femme forte en gueule mais généreuse, combattante et qui prend sous son aile une petite fille qu'elle rudoie mais qu'elle aime tendrement, un retraité chinois qui s'occupe de la petite comme un grand père le ferait, une petite fille sensible et drôle. Dans un récit à deux voix, celle de Auyong et celle de la petite fille, Mary Anne, c'est la vie de tous les jours avec toutes ces petites anecdotes que nous fait partager Shih-Li Kow avec tendresse et humour, quelquefois avec tristesse, mais toujours avec un regard bienveillant.
Les chroniques de nos folies est une belle découverte, qui donne espoir et bonne humeur.
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Jours de pluie ...
Une lecture pour m'évader
Voyage vers des lieux inconnus
La Malaisie !
Sauf ... que j'entre dans ce livre et une pluie torrentielle ouvre le récit !

Si je suis un peu noyée, les habitants eux sont habitués aux catastrophes naturelles, leur village étant inondé plusieurs fois par an !
Et moi je sèche pour parler de ce livre !
Alors, même si je ne comprends pas tout, les mots, rituels, prénoms, fruits exotiques, animaux et lieux, je décide de faire abstraction de ma culture occidentale de mes lacunes géographiques, historiques.
Et je laisse l'auteure m'amener à apprécier et découvrir tout ce qui m'est différent !
Je la suis, humblement et m'immerge dans cette atmosphère entre réalité et fantaisie, gravité et loufoquerie.
Lubbock Sayong, une petite ville au nord de Kuala Lumpur, endroit isolé, une cuvette entre rivières et lacs qui subit inondations, déluges mais où il se passe des choses ! ...
Et des histoires "inconcevables" ...
Mami c'est Beevi un personnage féminin, mystérieux
hors du commun, authentique, caractère bien trempé, sans filtre.
Elle transforme la grande demeure familiale en Maison d'hôtes. Elle est la conteuse . Toutes ses histoires commencent par "inconcevable" entre fabulation et exagération !

« Dans les histoires de famille de Mami, il y a autant de monde que de nouilles dans une soupe, on a vite fait de s'embrouiller. »

Les deux narrateurs :
Auyong, l'ami fidèle, retraité au grand coeur qui dirigeait une conserve le litchis. Il est le regard de la sagesse, non dénué d'humour, sur le monde, les touristes, la société !
Mary-Ann et son imagination débordante, quitte l'orphelinat pour être adoptée.
Une panoplie de personnages : une cinglée éleveuse de sangsues, la directrice de l'orphelinat "soeur cougar" , le transexuel engagé, le talentueux et bienveillant Ismet potier...
La somme de nos folies est un roman enchanteur, dépaysant. C'est l'histoire des rapports humains, l'amitié, la solidarité et la tolérance.
Chaque personnage prend soin de son grain de folie personnel : il en découle des anecdotes truculentes , des légendes et la magie des traditions.
Ce roman est tout à tour émouvant, drôle, tragique et loufoque.
Ce roman nous fait dire :
"Que nous ne sommes que la somme de nos folies racontées ou tues"

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Voyager en Malaisie, pays quasi équatorial, interroge sans doute son rapport à l'humidité. Écrire son ressenti sur cet ouvrage interroge nécessairement son rapport à l'humilité.
En effet, il faut être prudent pour oser une analyse. le cadre géographique ainsi que les références culturelles sont éloignés. Mais, surtout, l'écriture espiègle de l'auteure et le malin plaisir qu'elle prend à osciller entre scènes cocasses et situations graves trouble le lecteur, surtout si il entre dans ce livre comme le touriste entre parfois dans un pays lointain. Ce lecteur, que je crains de reconnaître dans le miroir et qui, forcément, préfèrera se qualifier de bourlingueur, de baroudeur, voire d'explorateur. Consommateur de phrases, comme d'autres collectionnent des paysages, il s'est surpris à penser « Tiens ! Un livre malais… Voyons-voir ! » et pourra plus tard se fendre d'un triomphal « J'ai fait une découverte singulière » comme d'autres diraient « J'ai fait la Casamance ».
Pour éviter le piège insidieux de l'ethnocentrisme, nous sommes donc contraints à des efforts : faire fi de nos a priori, de ces représentations héritées de notre civilisation jadis dominante, nous affranchir de nos « honni soit qui malais pense ». de nombreux passages jouent d'ailleurs de ce rapport à l'altérité qui est marqué par le poids de tribulations historiques encore prégnantes.
« La somme de nos folies » est également une réflexion sur les mutations d'un pays réputé pour être un « tigre économique ». Nous sommes dès lors sur ces thèmes qui préoccupent aussi d'autres régions du monde : la disparition du « Temps longtemps », l'adaptation forcée à la modernité, la confrontation accélérée à la mondialisation. Même en Malaisie, le Grand Pan n'est pas au mieux de sa forme, la magie recule, la technologie progresse. Pourtant, nulle pleurnicherie chez Shih-Li Kow, « Shi-li Kow n'est pas grande mais elle est vaillante ». Elle nous amuse sans doute avec ses poissons géants, ses spectres enfantins pour nous conduire à réfléchir à d'autres problématiques sociétales, l'homophobie, la corruption, la coexistence religieuse, ou intimes comme les secrets de famille. A la manière d'une Cesaria Evora, Shi-Li Kow nous parle de ce petit pays qu'elle aime beaucoup et nous permet de mettre en perspective des problématiques qui ne connaissent pas de frontières. Elle le fait avec intelligence, choisissant deux narrateurs aux âges et aux parcours différents, ce qui permet, avec subtilité, d'ouvrir encore davantage l'éventail des points de vue. Mais l'écrivaine, probablement hédoniste, convoque aussi la gourmandise, les passages culinaires mettant l'eau à la bouche.
Il existe ainsi de belles correspondances avec l'univers d'Ólafsdóttir : L'Islande est loin de la Malaisie et pourtant, c'est comme si « les parfums, les couleurs et les sons se répondent ».
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La chronique pleine de fantaisie et de drôlerie de Lubok Sayong, petit village perdu de Malaisie (dé)bordé par deux rivières et trois lacs.

Il y a quelque chose de Marcel Pagnol chez Shih-Li Kow. Car, si son roman est profondément local, ses personnages hauts en couleur, par leur sincérité, leur tolérance, leurs souffrances, leurs petites et très grandes bizarreries, et surtout leur manière inimitable de tout transformer en histoires improbables à raconter encore et encore, en enjolivant à l'envi leurs souvenirs, confinent à l'universel.

On apprend beaucoup sur la Malaisie. Mais surtout on rit et on se laisse emporter par Beevi, Auyong, Mary Ann et Miss Boonsidik, jamais à court de tendresse, d'imagination et d'exagérations.

Un roman fantasque et pétillant à ne pas manquer !
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Un premier roman remarquable qu'est la Somme de nos folies, roman de la Malaisienne Shih-Li Kow. Elle nous raconte l'histoire à deux voix, de cette petite orpheline Mary Anne et d'Auyong, un retraité, ancien directeur de supermarché de Kuala Lumpur devenu propriétaire d'une usine de mise en boîte de litchi à Lubok Sayong. Entre modernité et traditions dans cette communauté multiculturelle.

Chacun raconte la vie, lui ses amitiés avec le potier, le barman et la très singulière Beevi et elle, Mary Anne, qui ne connaît rien de ses origines s'est imaginée une mère chanteuse, jusqu'au jour où un couple vient la chercher à l'orphelinat. En partance en leur compagnie pour une destination qui lui est inconnue, ils ont un grave accident. Seule Mary Anne est rescapée. Après un séjour à l'hôpital elle est conduite et accueillie chez la soeur de la défunte : Beevi.

Tout commence par cette terrible inondation au coeur de Lubok Sayong, cette petite ville fictive, qui désormais vit chaque année cet épisode fulgurant, de pluies dévastatrices qui s'abattent sur la région, six jours durant. Une crue explosive qui bouscule tout sur son passage. Des bénévoles citadins accourent au secours des habitants, seulement ces derniers n'aspirent qu'à une chose rapidement c'est leur départ ! "L'entrain des bénévoles et leurs platitudes bien intentionnées ne pouvaient qu'irriter la population, déjà sur les nerfs."... " Notre malheur commun était à l'origine de vraies amitiés. Ces heureux citadins, eux, n'avaient à nous offrir qu'une compassion de passage." Tout est dit !

L'arrivée de Mary Anne dans la vie de Beevi est inattendue et page après page nous allons découvrir comment cette petite fille de 11 ans va s'intégrer facilement à cette nouvelle vie et pour cause aussi car très vite sans qu'elle nous le confie tout de suite véritablement, elle va découvrir et mettre en lumière la vérité sur ses origines.

Les personnages sont tous très touchants, attachants et en même temps ils nous invitent tous à de belles réflexions sur les origines, les genres, les communautés ethniques, religieuses et sociales, entre les malaisiens, les indiens, les chinois, les bouddhistes, les musulmans et les chrétiens... la cohabitation .. sur le devenir politique et écologique de la région avec, par exemple, l'arrivée des "étrangers" qui investissent pour créer de grands hôtels ... Tout cela dans un ton joyeux, drôle, réjouissant et parfois très loufoque.

J'ai été très sensible aussi à ce petit être du fond du jardin vivant, sortant de temps à autre de son trou. Un mal-mort .... il a fait écho à cet enfant aussi mal-mort dans le Chants des revenants de Jesmyn Ward ! Une croyance ... " Un phénomène présent dans toutes les cultures, la malemort est paradoxalement un vocable oublié dans notre propre culture et dont le véritable sens demeure, entre autres, dissimulé par les leurres d'éternité de nos sociétés hypermodernes.... Par opposition à une " bonne mort", il y a aussi une "mauvaise mort ", brutale, atroce, injuste, qui rend compte d'un arrachement à une vie restée en suspens." Sandrine Chenivesse, anthropologue

Et je termine enfin par ce que nous confie Auyong ".... que nous sommes que la somme de nos folies, racontées ou tues."

Merci à l'auteure, la traductrice et les éditions Zulma pour ce très beau voyage en Malaisie, si mal connue de chez nous, pour ce grand plaisir de lecture.

Très belle découverte !
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Cette histoire se déroule en Malaisie,pays quelque peu méconnu de nous autres occidentaux,dans un petit village du nom de : Lubok Sayong.
Un petit village dans une cuvette et malheureusement entouré de deux rivières se rejoignant en un lac ,d'où de gros problèmes ,lors des saisons des pluies ,le village se trouve souvent inondé.
Et cela débute par une grosse crue,dûe à des pluies torrentielles au cours de la saison chaude.
Beevi,une des héroïnes du roman au caractère " bien trempé" possède dans un aquarium de deux mètres de long un énorme poisson .Lors de l'inondation ce poisson refuse de manger et se laisse mourir au fond de son aquarium .Beevi ,sait ce qu'il veut : il a senti la crue ,il réclame sa liberté, à contrecoeur ,Beevi le laissera partir dans le lac ce qui ne sera pas sans conséquences......
Dans ces petits villages de Malaisie,le mot entraide prend tout son sens et dès l'inondation ,une horde de bénévoles envahit le village afin de nettoyer et de remettre en état le village.
Autour de Beevi gravitent des personnages singuliers : Ismet selamat ,le potier, Auyong, qui dirigeait un supermarché, ami intime de Beevi.
Beevi à une soeur : Assunta,celle -ci n'a pas d'enfants et elle réside dans une très grande demeure en hauteur et n'est jamais inondée.
Par un hasard malheureux ,le jour de l'inondation ,sa soeur et son beau frère s'étaient rendus dans un orphelinat pour y adopter une petite fille : Marie -Anne.
Personne n'était au courant.
Hélas, au retour leur voiture fait une embardée, ils meurent tous les deux,laissant Marie-Anne légèrement blessée.
Et là on entre vraiment dans l'histoire.
Beevi qui adorait sa soeur va vendre sa petite maison et emménager dans la Grande bâtisse de sa soeur.Elle ėlèvera Marie-Anne .Elle fera des gîtes pour touristes et en vivra.
Et nous voyageons au milieu de ces personnages ,sur fond de scènes truculentes, pleines de fraîcheur, pimentées d'un grain de folie.Aventures cocasses,fantasques au coeur d'une Malaisie pluri culturelle.
Beevi est une conteuse extraordinaire qui nous fait découvrir les contes ,et toutes les traditions de son pays ,contrastant avec la jeune Marie-Anne résolument tournée vers la modernité et c'est ce qui fait le charme de ce très beau roman.
Une petite pépite ce roman qui vous met de bonne humeur tant l'auteur au travers sa plume vous fait sentir le bon côté des choses,malgré parfois la tristesse de certains faits .Une découverte pour moi qui n'est pas sans me rappeler par certains côtes, la littérature japonaise.A recommander chaleureusement. ⭐⭐⭐⭐
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L'histoire se passe à Lubok Sayong, petite ville imaginaire au nord de Kuala Lumpur, en Malaisie. Située dans une cuvette entre deux rivières et trois lacs, la région subit chaque année des inondations qui donnent lieu à des scènes inoubliables, "inconcevables" comme dirait Beevi, une vieille femme au grand coeur, à la fois revêche et fantasque, qui va être au centre de l'histoire.
Cette année-là, au début du roman, une inondation exceptionnelle (inconcevable !) va donc marquer les esprits. L'eau a atteint la terrasse de Beevi. Elle décide de relâcher son poisson d'eau douce qui s'ennuie dans son aquarium et est devenu neurasthénique, c'est facile, l'eau est devant sa porte. Les enfants jouent dans la boue ; Beevi se déplace dans son radeau de fortune fabriqué avec des bidons de plastique ; Ismet le potier tente de rattraper ses poteries qui filent emportées par le courant ; des bénévoles viennent apporter leur soutien et une aide alimentaire bienvenue mais encombrent les habitants qui veulent vivre normalement malgré la présence de l'eau et des maladies autour d'eux.
Mais alors que l'eau reflue et qu'Ismet vient aider Beevi à construire une passerelle pour qu'elle puisse aller voter sans se mouiller les pieds, un drame éclate : la soeur de Beevi et son mari sont victimes d'un accident de la route. La seule survivante est une fillette de 11 ans, qu'ils étaient allés chercher à l'orphelinat pour l'adopter. Au départ Mary Anne est un peu perdu devant cette grande famille pas comme les autres qu'elle ne connait pas et qu'elle découvre alors qu'elle est hospitalisée. Elle va finalement vivre comme prévue...mais sans ses parents adoptifs, que de toute manière elle ne connaissait pas du tout. Beevi quitte sa petite maison sur pilotis, pour emménager dans la grande maison située en haut du village, où vivait sa soeur, une maison qui appartenait à leur père. Et elle décide d'adopter la fillette.
Aidée par Auyong, son ami de toujours, Beevi va peu à peu transformer la maison en chambres d'hôtes. Très vite, ayant trop de travail elle embauche l'exubérante Miss Boonsidik, une lady-boy qui sait défendre sa cause et apporter humour et tolérance dans ce petit monde refermé sur lui-même.
Mary Anne qui a convaincu Beevi d'acheter un ordinateur et d'installer le wifi, va apprendre très vite à en faire la promotion sur internet. Les touristes vont être nombreux à venir admirer le magnifique jardin au coucher du soleil, les chambres décorées de nombreux bibelots, les tourelles qui donnent à la maison un aspect si exotique. Ils découvriront aussi les personnages hauts en couleurs qui l'habitent...

Ce roman est un roman choral qui alterne les voix du vieux Auyong, l'ami fidèle, directeur de l'usine de litchis locale, et de Mary Anne qui n'a que 11 ans et adore qu'on lui raconte des histoires, en particulier quand Mami Beevi est en forme, prend la parole et les invente au fur et à mesure qu'elle les raconte.
Le ton est tout de suite plaisant, drôle, plein de tendresse pour les personnages, tous hauts en couleurs et tellement loufoques. Même les drames sont racontés avec humour et étayés de réflexions profondes sur la vie, le destin, les comportements humains.
Ainsi en est-il par exemple du terrible accident survenu sur le lac lors d'une mémorable partie de pêche, dans lequel un américain emporté par sa proie a tragiquement trouvé la mort.
Les situations sont souvent rocambolesques, mais les personnages forment un panel réaliste montrant le visage multiple de la Malaisie contemporaine, l'homophobie et le racisme ambiant (jusque dans la boisson servie dans un bar qui a trois couleurs symbolisant les Tamouls, les Chinois et les Malais ).
Ici les gamins pour rater l'école à tour de rôle, n'hésitent pas à se faire piquer par des fourmis provoquant de la fièvre pendant seulement une heure, pour pouvoir ensuite s'amuser toute la journée.
Ici les poteries, une fois dispersées dans les arbres ou autre lieu insolite par l'inondation, deviennent des oeuvres d'art recherchées par les gens de la ville ou des nichoirs pour les Calaos.
Ici les touristes débarquent dans ce lieu préservé et le décalage des points de vue est édifiant et bien entendu amusant.
Ici, la réalité côtoie les légendes, la fantaisie et le surnaturel.
C'est un roman à la fois grave et léger, entre modernisme et traditions, qui nous parle de la famille, des différences de genre, de l'importance de la transmission. Sa lecture fait du bien tant l'humour est présent à chaque page. Impossible de s'ennuyer en découvrant tous ces personnages tellement humains. Beaucoup de poésie se dégage de ce premier roman de l'auteur qui a reçu le Prix du Roman Etranger en 2018, ce que j'apprends en rédigeant ces lignes.
J'ai beaucoup aimé et je vous conseille cette lecture si vous voulez voyager tout en passant un excellent moment de lecture, amusant et dépaysant à la fois ce qui ne fait pas de mal pour aborder la fin d'année avec un peu de légèreté.
Lien : https://www.bulledemanou.com..
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La Malaisie est pour moi un carrefour de part sa situation géographique . Entre le monde indien , le sud est asiatique mais aussi la Chine.
Shih Li Kow est membre de la communauté chinoise de Kuala Lumpur. On pouvait s'attendre à un brassage culturel. Je ne fus pas déçu.

L'histoire est finalement celle d'une petite ville qui va évoluer au fil du temps et que des héros du quotidien truculents vont nous faire aimer. Mami Beevi, Auyong, Mary Anne pour les principaux mais aussi Ismet, Mary Beth,Miss Boonsidik, que du lourd ! Déjantés ou posés, ils ne laissent pas indifférent. Entre histoire et légende , ils nous accompagnent sur plusieurs années dans une Malaisie coincée entre Chinois et Indiens.

Pour résumer le sentiment éprouvé par cette lecture , c'est comme une immersion dans une machine à laver dont le tambour tournerait lentement. Ici tout est mêlé, le positif et le négatif se côtoient, les races, les religions sont mélangées pour le meilleur et le pire.

Il y a aussi une vision de ce que devient la Malaisie et notamment la Malaisie touristique, de la politique , de l'écologie, de la génération 4g, des transsexuels...
Il y a beaucoup dans cette lecture assez singulière qui permet de s'évader de très belle façon !

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