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Dans ce roman, "Sept hiboux", écrit en 1922, l'auteur hongrois, Gyula Krúdy, décrit Budapest à la fin du 19ème siècle, ses milieux littéraires surtout, ses artistes qui hantent les tavernes, de jeunes écrivains misérables et talentueux, comme Józsiás, l'un des personnages du roman, plus faible que véritablement infâme, bien qu'il fasse parfois le malheur des femmes. Les descriptions de Gyula Krúdy sont pleines de poésie, Budapest au début de l'hiver, la neige, le Danube gelé sous un épais brouillard, des silhouettes fantomatiques la nuit... et confèrent au roman une impression de rêverie. Les intrigues amoureuses de Józsiás, dans une société qui semble avoir perdu tout idéal, en constituent la trame principale.
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Une belle découverte que cet écrivain hongrois, qui en 1922 nous restitue l'ambiance de Budapest à la fin du XIXè siècle. On est frappé par la remarquable qualité littéraire, dans un style classique où romantisme, poésie et sensualité sont au rendez-vous.

Jozsias, écrivain trentenaire à la notoriété montante, charmant et indécis avec les femmes, va successivement connaître trois femmes marquantes...Léonora, la plus mûre, qui l'aime sincèrement, alors que lui n'a déjà plus d'yeux que pour Zsofia, jeune femme mariée et pétillante, qui n'a de cesse de le provoquer et de jouer avec lui une sorte de cache-cache et de jeu de l'amour...mais aussi la jeune, gentille, sage et timide Adalska...qui peut-être pourra lui redonner une santé devenue vacillante et un regard optimiste vers l'avenir, après les épreuves et difficultés qu'il va traverser. Pour l'accompagner tout au long de ce parcours initiatique littéraire et amoureux, le vieux et discret
Guszti Szomjas, qui connaît Budapest comme sa poche et loge à l'hôtel des sept hiboux, joue, parfois à l'insu de son ami, les messagers du coeur auprès de ces femmes et nous sert de guide dans la cité.

L'auteur nous décrit un monde finissant, mais sans forcément sombrer dans une nostalgie excessive, voyant bien les travers de ce milieu et délivrant un message positif par la bouche d'Adalska, tournée vers l'avenir et de Szomjas sorte de passeur vers le nouveau siècle.

Au final, si la fin est ouverte, que le déroulement traîne un peu en longueur et que les noms d'écrivains et de lieux hongrois sont en effet un poil agaçants, on ne peut être que charmé par un style splendide, et des morceaux de bravoure comme la description du baiser de Zsofia dans cette folle et dangereuse nuit glacée sur le Danube avec son amant (voir ma longue citation par ailleurs). On retrouve parfois à mon sens des accents et thèmes de Balzac, Flaubert ou Stendhal dans ces pages.

Ma lecture a d'abord été laborieuse, voire fastidieuse...et puis en s'accrochant, le plaisir de (re)découvrir Budapest, de ces belles pages d'amour et de sensualité, très présente, m'a séduit.

Un grand merci à Babelio pour cette découverte rare, et à l'immense indulgence de Marie-Delphine pour mon retard assez conséquent dans la publication de cette critique !



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Ma première expérience de la littérature hongroise – Les braises de Sandor Marai - m'avait encouragé à me frotter à un autre auteur de la même origine. Curieuse idée. Il n'y a pas plus de chance d'apprécier un auteur parce qu'on a aimé les écrits d'un compatriote. Disons que c'était plus surement l'intention d'approfondir la connaissance d'une culture qui a sa particularité en Europe, ne serait-ce que par sa langue. Elle fait exception. C'est une île dans l'océan de ses voisines slaves, germaniques et latines.
Mais comment percevoir l'exception dans une traduction ? La traductrice de Sept hiboux nous ouvre une fenêtre sur cette particularité avec la fidèle préservation des innombrables toponymes et patronymes de la version originale, à tel point que cela devient un inconvénient, un obstacle à la fluidité de la lecture. Essayez vous à la lecture de ce qui suit, sachant en outre que le clavier français ne permet pas de placer les accents sur certaines voyelles
- page 86 "on l'appelait Szerelemvölgyi",
- page 91 "…les compliments sur la colline Svabhegy….une excursion à la taverne Hartarcsarda de Megyer.
La présence d'innombrables renvois de bas de page, explicitant, commentant, traduisant, les insertions couleur locale est un autre obstacle au confort de lecture. La traductrice pousse le perfectionnisme jusqu'à traduire en hongrois, en bas de page, ce que le texte donne en français. Sans doute destiné aux expatriés. Je n'ai pas perçu le bénéfice d'un tel luxe.
Sept hiboux est un ouvrage pour ceux qui n'aiment pas être tenus en haleine par un suspens insoutenable jusqu'à la dernière page. Pour tout dire d'ailleurs, en raconter l'intrigue n'est pas chose aisée. Nous sommes dans un roman d'ambiance, celle de la vie citadine d'un jeune écrivain, Joszias, à la vie amoureuse erratique et irrésolue, en quête de notoriété. C'est une ambiance empreinte de ce romantisme du XIXème siècle avec les caractéristiques qu'on lui attribue : l'exaltation des sentiments, qui sombrent parfois dans la mélancolie, le goût de la solitude, une forme de lyrisme qui ralentit le pas de l'intrigue quand elle a décidé de se révéler. C'est une ambiance qui peut aussi prendre une tournure épique, comme dans cet ouvrage avec la traversée du Danube pris par les glaces par des amoureux décidés à théâtraliser ce qu'ils pensent être leurs derniers instants.
Il y a dans ce genre de prose d'incommensurables longueurs. Pour preuve la retranscription, tirée de l'ouvrage que Joszias cherche à faire éditer, de la passion de son héros pour la chevelure des femmes. Il faut bien s'assurer de sa vigilance, à moins de partager la même passion, pour franchir le cap. Pas moins de quatre pages.
Je me suis toujours demandé quelle était la part de fiction dans ce roman, tant les références à des personnages ayant réellement existé dans l'histoire de la Hongrie, en particulier des milieux littéraire, politique, et journalistique, y sont omniprésentes. Sans oublier un autre personnage, tant elle prend sa place dans la narration et dans le cœur des protagonistes, qu'est la ville de Budapest. Nous sommes à l'époque de sa création par la réunion des trois villes riveraines du Danube : Pest, Buda et Obuda. On perçoit bien l'attachement que lui porte l'auteur, Gyula Krudi, lui pardonnant ses laideurs. Cela fait évidence dans la bouche des personnages de ce roman. Cela fait aussi évidence de nostalgie à la veille de la grande guerre qui va précipiter la fin de règne de la monarchie austro-hongroise.
Les autres personnages, les vrais, sont des êtres complexes. Leur passé reste flou, voire mystérieux, mais on comprend qu'il a été plus ou moins chaotique. Ils peuvent faire preuve d'une grande fantaisie, sont toujours sincères, et ne se fixent pas d'autre but que celui de vivre une passion ou de leur passion. Ce roman nous offre une belle palette des mœurs et de la vie quotidienne d'une classe sociale moyenne qui rêve d'émergence dans l'Autriche Hongrie François-Joseph 1er et de l'impératrice au triste destin, Sissi.
Bien que servi par une belle écriture ce texte n'a pas emporté mon suffrage. Ma soif d'exotisme s'est évanouie dans les brumes de Budapest. De chapitre en chapitre je suis resté dans l'attente de ce coup de fouet qui aurait réveillé mes sens. Peut être que lorsque j'aurai soupé des turpitudes de ce monde je trouverai avantage à me laisser bercer par ce romantisme doucereux et nonchalant.
Je remercie Babelio et les éditions des Syrtes de m'avoir permis de faire connaissance avec Gyula Krudi, auteur prolifique et populaire en son temps et son pays.
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Un grand merci à Babélio et aux Editions des Syrtes pour ce partenariat et la découverte de ce livre.



Bienvenue à Budapest à la fin du 19ème siècle, découverte au fil de la lecture aux côtés de Jozsias, un écrivain romantique qui dresse le portrait des femmes qui ont comptées dans sa vie. Accompagné de son ami, Guszti Szomjas qu'il aide à la diffusion de certains messages à ces dames, nous découvrons les ruelles, les enseignes et l'atmosphère d'une vie riche et vivante.

Telle est la trame du livre, dont le résumé n'est pas chose facile, tant le mouvement dans la lecture est constant : nous évoluons dans une ville, entre découverte, recherche d'amour, de connaissance.

Les difficultés premières concernent la fluidité dans la lecture : d'innombrables bas de page viennent hacher la lecture, mais ils ont leur importance tant les référence à des personnages existant sont nombreuses : mais est ce un témoignage de vie ou un témoignage de ville? Ces informations se diluent progressivement, car nous avons par moment une impression de déchiffrer une carte, par exemple, lorsqu'on nous signale que telle rue se trouve à tel endroit près de telle ruelle.

La seconde grande difficulté porte sur l'exactitude des noms : hormis les prénoms des personnages principaux, il m'est arrivé de ne faire que survoler des Noms de rues, de lieux ou de personnes tellement j'avais des difficultés à les retenir voir à les prononcer. L'exotisme de la nouveauté est plaisant, et on s'amuse parfois sur la prononciation, mais revenir plusieurs fois de suite sur ces même noms alourdit la lecture et la compréhension du texte.

L'ambiance générale du livre est terriblement mouvante : à la fois romantique et romanesque, le style de l'auteur est très agréable. Les descriptions sont nettes et bien étayées, pour certains, elles n'auront peut être que peu d'intérêt au vue de la richesse narrative. Mais j'avoue avoir pris gout à la découverte de ces lieux, chargés d'histoire et de vie.

Les personnages sont bien décrit, et on les imagine aisément évoluer, s'aimer, se déchirer, se retrouver, se chercher. Une sensation parfois que la complexité est poussée à l'extrême : j''aurais aimé garder une part de mystère chez certains. Et à contrario, d'autres ont été trop esquissé, manquant de profondeur et de couleur : j'aurais aimé savoir ce que renfermait ces silences.

Les Sept Hiboux renferment plus qu'un simple logement : centrale dans la vie de Jozsias, il l'est aussi à la lecture du livre, revenant régulièrement à ce point de départ rassurant.

L'amour est sans doute ce qui nous berce durant cette lecture : l'amour passion, l'amour de la ville, de l'ivresse de ce sentiment qui va, vient et nous tire vers de nouvelle découverte. Mais plus encore, J'ai aimé non pas la fraicheur de ces histoires d'amour, mais leur complexité et leur mélancolie parfois : une part de réalité dans un sentiment qui est trop souvent idéalisé dans la littérature.

Lien : http://lecturedaydora.blogsp..
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Un vieil homme, Szomjas, avoué de son métier, revient à Budapest, qu'il a connu dans sa jeunesse. Un petit pécule amassé, il veut revoir les lieux qui lui sont chers, et qui sait, débuter peut être une carrière de lettres. Son chemin croise celui d'un homme jeune, Jozsias, qui y est dans cette fameuse carrière. Les deux hommes vont devenir proches, Szomjas vivant par procuration le destin de Jozsias, y compris ses amours, devenant le confident des femmes qui aiment le jeune écrivain.

Une ballade dans l'ancienne Budapest, dans ses rues, les cafés, rédaction de journaux, bureaux des éditeurs. L'intrigue n'est pas le plus essentiel, même si les choses deviennent plus tendues à la fin du roman, et que de beaux portraits, surtout de femmes, y sont dessinés. Un beau voyage, qui laisse le temps de contempler les paysages, et laisse la part belle à la nostalgie, et au regret des époques révolues. Avec toujours l'humour de Gyula Krudy, et sa distance élégante par rapport au récit qu'il nous distille. C'est toujours un aussi grand plaisir de lecture pour moi.
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Rares sont les ouvrages où peuvent être satisfaits à la fois le goût pour la poésie, l'intérêt d'un récit romanesque, la curiosité pour un moment de l'Histoire et pour les discussions et débats que connaissait l'époque concernée. 7 Hiboux de Gyula Krudy me paraît présenter ces caractéristiques et c'est pourquoi j'ai souhaité apporter ma contribution à la critique du livre.
J'ai beaucoup apprécié ce livre, un peu étrange et fascinant à travers lequel Krudy nous transporte avec notre consentement dans la Budapest de la fin du XIXe siècle.

C'est l'histoire d'un hiver qui commence avec les premiers flocons et qui se termine avec le premier vent tiède du printemps. Un hiver d'exception qui par sa rudesse donne l'occasion de peindre de multiples tableaux et de fournir des sensations par l'évocation des impressions et des couleurs. Un hiver qui embellit la nature mais aussi et surtout la ville recouverte d'une neige qui se nourrit de ses lumières.
J'ai aimé la description irremplaçable de cette ville à travers ses rues, ses personnages ou ses anecdotes, ses tableaux évocateurs, la richesse des dialogues qui mieux que bien des ouvrages nous font toucher aux réalités de cette époque où s'affrontent les générations, les concurrents, les idéaux et où les personnages sont ballottés entre l'envie d'aller de l'avant et de retrouver un paradis perdu.
Un monde sans doute disparu à bien des égards, où l'on ne pouvait cacher les travers d'une société chancelante mais où l'on savait aussi vanter l'art et la manière de jouir de la vie.
Krudy a une façon bien à lui de donner vie à ses personnages en les rendant plus humains qu'héroïques, plus vrais que vertueux et fréquemment renvoyés à leur contradiction : Szomjas, qui se targue d'aisance relationnelle, demeure figé durant des heures sous la neige devant la maison de Zsofia sans oser se manifester, et lui qui recherche les petites économies, termine sa vie avec un geste d'une grande générosité, Zsofia citadine instable et raffinée se montre la plus forte face au péril, Jozsias enfin, l'ambitieux, qui rêve de devenir le plus grand écrivain semble y renoncer à la fin de ce récit pour une vie modeste dans un cadre chaleureux.
Le monde littéraire et les maisons de presse sont décrits sans complaisance, donnant l'image d'un univers fermé dans lequel les rentes de situation s'entretiennent et se perpétuent au bénéfice de quelques uns et à l'exclusion des jeunes prétendants. L'important ici est d'être connu, reconnu. « Sois célèbre » explique Szomjas « et tout ira bien pour toi, rien de grave ne pourra t'arriver ». Cette obsession de la notoriété est poussée jusqu'au ridicule avec le personnage de Simli. Elle témoigne en tout cas d'une progression considérable de l'influence de la presse à cette époque, nous dirions aujourd'hui des médias, jugée apte à faire et à défaire des carrières, à satisfaire ou à contrarier les ambitions, tout cela sans donner de sérieux gages d'objectivité et de compétence.
Jozsias lui-même exprime sa fascination pour la presse à la fois lorsqu'il se représente une vie rurale avec Léonora en songeant aux impressions que lui produiraient les informations provenant d'une ville qu'il aurait quittée et plus encore dans la période où après avoir fait la une des journaux, ses aventures tumultueuses -à son grand désarroi- retournent peu à peu dans l'oubli.
Un monde journalistique et littéraire dont les principaux personnages ne se montrent pas étouffés par les scrupules. Aventures féminines multiples facilitées par la position sociale, traitement condescendant des auteurs, libertés prises avec la morale, au motif que ne cessant de la proclamer ils sont eux dispensés de la suivre, on comprend qu'au travers de ce parcours initiatique douloureux et frustrant, notre héros finisse par se réfugier dans les bras d'Adalska et de son brave homme de père.
Si l'ouvrage peut comporter quelques longueurs dans les descriptions celles-ci sont largement compensées par des temps forts et des scènes magnifiques. le chapitre où Jozsias exprime un véritable cri d'amour est un grand moment où l'imagination et la poésie servent une superbe écriture. La proximité de la morgue, l'ambiance de cet endroit et la descente jusqu'au caveau prépare dans la solennité, la sobriété et la crainte le coup de théâtre qui est sans doute le tournant du livre, le moment où Jozsias reçoit, après un temps d'incrédulité, un choc d'une extrême violence dont il aura peine à se remettre.
Enfin la promenade épique et cauchemardesque sur l'Ile Margit donne à Krudy l'occasion de jouer admirablement des images des rêves, des tableaux et des personnages que la brume et la nuit dessinent à foison. La débâcle du Danube lui offre le cadre fantastique et effrayant qui autorise toutes les angoisses et toutes les audaces dans ce moment intense et rare où l'on craint que sa fin soit proche.
Szomjas conseille à Jozsias de rayer impitoyablement tout ce qui se réfère aux anciens, au siècle qui se termine. Il n'est pas sûr qu'il soit sérieux. En tout cas ce serait dommage car il y a là dans cet univers de la jeunesse de Krudy un charme indicible dans l'écriture et le récit, et aussi dans la façon d'esquisser des débats qui sont encore ceux d'aujourd'hui.
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Sept Hiboux

Je trouve que la publication de 7 Hiboux dont je viens de terminer la lecture mérite beaucoup mieux que ce qui en a été dit le 10 octobre. J'ai en effet été enchanté par cet ouvrage et je trouve certains commentaires injustes et parfois pas très ouverts à la langue et à la culture hongroises.

J'avais lu plusieurs livres de Guyla Krudy mais je ne l'ai véritablement découvert qu'à travers la traduction récente de cet ouvrage qui montre au public français d'autres facettes de son talent. Il est vrai que tout en demeurant l'une des toutes premières références de la littérature hongroise, celui-ci n'en reste pas moins méconnu chez nous. La faute à qui ? J'en suis à me demander si notre monde littéraire, qui semble ne pas s'y retrouver aisément avec Krudy, ne fait pas barrage. Ne voudrait-on pas que Krudy vienne jouer sur notre terrain, copie nos grands auteurs, reprenne nos schémas et nos manies pour se faire accepter alors qu'il n'en a cure et devient agaçant par son obstination à être d'abord lui-même.

Pardonnez-moi mais je lis avec surprise que des notes de bas de page parfois traduites en hongrois -que j'ai trouvées utiles pour ma part, même si on pouvait tout autant les retrouver en fin d'ouvrage- font obstacle à une lecture confortable. Il est permis de tourner la page. Si on se réfère au foisonnement de cette formule dans les publications d'hier et d'aujourd'hui, il y a de quoi s'étonner. de même le maintien de noms ou prénoms hongrois non francisés- et avec accents- semble indisposer. Il est vrai que cela peut obliger à changer ses bésicles et que cela agace. L'usage de l'anglais aurait-il suscité de telles remarques ?

Krudy n'est pas Marai et comparaison n'est pas raison. Marai est d'abord un romancier, talentueux et occidentalisé dans l'approche intellectuelle et dans la narration, on songe parfois à Zweig, et son intégration dans la littérature et la culture française s'est réalisée sans heurt, à travers l'évocation de récits et de drames qui s'inscrivent sans peine dans notre univers. Et puis Marai est décédé en 1989, lorsque Krudy s'est éteint en 1933. L'oeuvre de l'un se termine – à un moment clé de l'Histoire- lorsque commence celle de l'autre.

S'ils ont pu se côtoyer un moment, ils n'ont pas vécu tout à fait la même époque et surtout n'ont pas utilisé les mêmes voies littéraires ni choisi les mêmes objets. Krudy se veut ici romancier, mais à sa façon, déconcertante, picaresque, agrégeant plus des moments qu'il ne laisse dérouler la trame. Poète avant tout, il déroute un peu, dans sa façon de dépeindre le monde littéraire de son époque qu'il prend par tous les bouts mêlant fiction et réalité, personnages authentiques et inventés pour peupler cette galerie romanesque qui lui importe autant que les aventures de ses héros. le récit n'est pas linéaire, et l'incertitude de la suite même si elle n'est pas déflorée ne constitue pas l'intérêt principal. Jugé à cette aune, Krudy risque d'être toujours perdant.

Mais si l'on veut bien plonger dans le monde qu'il nous dépeint et le suivre dans ses parcours sinueux, il faut admettre qu'il sait faire partager ses émotions et ses menus plaisirs fussent-ils d'autrefois. Forcément nostalgique d'une période qu'il juge parfois sévèrement- il n'est pas dupe- il ne peut cacher combien elle reste profondément gravée dans son coeur. 7 hiboux témoigne de cette période de fin de siècle, où tout vacille et menace mais où rien ne s'est encore joué.




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