AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur L'Art du roman (86)

Le besoin du kitsch de l'homme-kitsch (Kitchmensch) : c'est le besoin de se regarder dans le miroir du mensonge embellissant et de s'y reconnaître avec une satisfaction émue.
Commenter  J’apprécie          70
Hélas, le roman est, lui aussi, travaillé par les termites de la réduction qui ne réduisent pas seulement le sens du monde mais aussi le sens des œuvres. Le roman (comme toute culture) se trouve de plus en plus dans les mains des médias ; ceux-ci, étant agents de l'unification de l'histoire planétaire, amplifient et canalisent le processus de réduction ; ils distribuent dans le monde entier les mêmes simplifications et clichés susceptibles d'être acceptés par le plus grand nombre, par tous, par l'humanité entière. Et il importe peu que dans les différents organes les différents intérêts politiques se manifestent. Derrière cette différence de surface règne un esprit commun. Il suffit de feuilleter les hebdomadaires politiques américains ou européens, ceux de la gauche comme ceux de la droite, du Time au Spiegel ; ils possèdent tous la même vision de la vie qui se reflète dans le même ordre selon lequel leur sommaire est composé, dans les mêmes rubriques, les mêmes formes journalistiques, dans le même vocabulaire et le même style, dans les mêmes goûts artistiques et dans la même hiérarchie de ce qu'ils trouvent important et de ce qu'ils trouvent insignifiant. Cet esprit commun des mass media dissimulé derrière leur diversité politique, c'est l'esprit de notre temps. Cet esprit me semble contraire à l'esprit du roman.
L'esprit du roman est l'esprit de complexité. Chaque roman dit au lecteur : « Les choses sont plus compliquées que tu ne le penses. » C'est la vérité éternelle du roman mais qui se fait de moins en moins entendre dans le vacarme des réponses simples et rapides qui précèdent la question et l'excluent. Pour l'esprit de notre temps, c'est ou bien Anna ou bien Karénine qui a raison, et la vieille sagesse de Cervantès qui nous parle de la difficulté de savoir et de l'insaisissable vérité paraît encombrante et inutile.
L'esprit du roman est l'esprit de continuité : chaque œuvre est la réponse aux œuvres précédentes, chaque œuvre contient toute expérience antérieure du roman. Mais l'esprit de notre temps est fixé sur l'actualité qui est si expansive, si ample qu'elle repousse le passé de notre horizon et réduit le temps à la seule seconde présente. Inclus dans ce système, le roman n'est plus œuvre (chose destinée à durer, à joindre le passé à l'avenir) mais événement d'actualité comme d'autres événements, un geste sans lendemain.

L'héritage décrié de Cervantès, 9.
Commenter  J’apprécie          60
Quand Tolstoï a esquissé la première variante d'Anna Karénine, Anna était une femme très antipathique et sa fin tragique n'était que justifiée et méritée. La version définitive du roman est bien différente, mais je ne crois pas que Tolstoï ait changé entre-temps ses idées morales, je dirais plutôt que, pendant l'écriture, il écoutait une autre voix que celle de sa conviction morale personnelle. Il écoutait ce que j'aimerais appeler la sagesse du roman.
Commenter  J’apprécie          60
Cet esprit commun des mass media dissimulé derrière leur diversité politique, c'est l'esprit de notre temps. Cet esprit me semble contraire à l'esprit du roman.
Commenter  J’apprécie          60
Je rencontre mon traducteur : il ne connaît pas un seul mot de tchèque. « Comment avez-vous traduit ? » Il répond : « Avec mon cœur », et me montre ma photo qu'il sort de son portefeuille. Il était si sympathique que j'ai failli croire qu'on pouvait vraiment traduire grâce à une télépathie du cœur.
Commenter  J’apprécie          60
ROMAN : La grande forme de la prose où l'auteur, à travers des ego expérimentaux (personnages), examine jusqu'au bout quelques thèmes de l'existence. (p.171).
Commenter  J’apprécie          60
Le roman qui ne découvre pas une portion jusqu'alors inconnue de l'existence est immoral. La connaissance est la seule morale du roman
Commenter  J’apprécie          60
La bêtise ne s'efface pas devant la science, la technique, le progrès, la modernité, au contraire, avec le progrès, elle progresse elle aussi !

Discours de Jérusalem : le roman et l'Europe.
Commenter  J’apprécie          50
Avec une passion méchante, Flaubert collectionnait les formules stéréotypées que les gens autour de lui prononçaient pour paraître intelligents et au courant. Il en a composé un célèbre 'Dictionnaire des idées reçues'. Servons-nous de ce titre pour dire : la bêtise moderne signifie non pas l'ignorance mais la non-pensée des idées reçues. La découverte flaubertienne est pour l'avenir du monde plus importante que les idées les plus bouleversantes de Marx ou de Freud. Car on peut imaginer l'avenir sans la lutte des classes ou sans la psychanalyse, mais pas sans la montée irrésistible des idées reçues qui, inscrites dans les ordinateurs, propagées par les mass-media, risquent de devenir bientôt une force qui écrasera toute pensée originale et individuelle et étouffera ainsi l'essence même de la culture européenne des temps modernes. (...) Jusqu'à une époque récente, le modernisme signifiait une révolte contre les idées reçues et le kitsch. Aujourd'hui, la modernité se confond avec l'immense vitalité mass-médiatique, et être moderne signifie un effort effréné pour être à jour, être conforme, être encore plus conforme que les plus conformes. La modernité a revêtu la robe du kitsch.
Commenter  J’apprécie          50
L'esprit du roman est l'esprit de complexité. Chaque roman dit au lecteur : "Les choses sont plus compliquées que tu ne le penses." C'est la vérité éternelle du roman mais qui se fait de moins en moins entendre dans le vacarme des réponses simples et rapides qui précèdent la question et l'excluent. Pour l'esprit des temps, c'est ou bien Anna ou bien Karénine qui a raison, et la vieille sagesse de Cervantes qui nous parle de la difficulté de savoir et de l'insaisissable vérité paraît encombrante et inutile.
Commenter  J’apprécie          40






    Lecteurs (1693) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Milan Kundera

    Presque tous les romans de Kundera comportent le même nombre de parties : quelle est la structure type de ses romans ?

    3 parties
    5 parties
    7 parties

    10 questions
    167 lecteurs ont répondu
    Thème : Milan KunderaCréer un quiz sur ce livre

    {* *}