Un petit mot sur la couverture, très colorée qui a attiré mon oeil au départ. Il s'agit d'une Warholisation du cliché radiographique de l'arthrodèse de
Nadalette La Fonta Six. C'est à la fois beau, coloré, original et authentique (parfait pour un témoignage).
Un petit paragraphe important avant de continuer. Ici, je vais chroniquer un témoignage et, comme je l'ai déjà dit dans un post précédent, je ne me vois pas dire que j'ai aimé ou non. C'est une histoire vraie, une tragédie qui est arrivée à quelqu'un fait de chair et de sang. de quel droit pourrais-je juger ce que cette femme a vécu ? C'est pour ça que, bien qu'en parlant de son histoire, je ne vous donnerai mon ressenti "critique" que sur son style.
Ceci étant dit, parlons donc maintenant de la plume de l'auteure,
Nadalette La Fonta Six. Elle est assez caustique et parfois acide mais jamais vraiment dénuée d'une touche d'humour assez agréable. Bien que je l'ai parfois trouvée un peu vulgaire sur le choix de certains mots (wow, j'ai l'impression d'être bien plus vieille que mon âge à parler ainsi lol). Mais ce qui m'a le plus dérangé, hors le fait que certaines phrases n'avaient pas de point final, c'est leur longueur. Attention, j'aime les phrases longues, mais de celles qui sont "construites". Ici, c'était bien plus souvent une surenchère de mots ou de termes ajoutés les uns à la suite des autres. Bien que j'imagine que ce rythme correspond certainement à son état d'esprit, j'ai donc trouvé une certaine lourdeur, surtout au départ. le fait que certaines tournures de phrases ne soient pas très naturelles (je n'ai jamais entendu personne parler ainsi, même si je sais que le langage écrit et oral sont différents) y a joué aussi, je pense. Néanmoins, je ne peux que reconnaître une certaine poésie dans ces pages.
Une autre chose qui m'a gênée, ce sont les presque trente pages (il me semble), où l'auteure parle de la vie de sa grand-mère, de sa mère et de son enfance (c'est la partie que j'ai trouvé la plus lourde à lire d'ailleurs). Honnêtement, même si on peut se dire que cette partie est faite pour mieux comprendre son caractère (supposition de ma part), j'ai trouvé qu'elle était de trop et pas du tout "utile" à ce témoignage parce que n'ayant pas de rapport "direct" avec sa scoliose.
Mais quid du contenu de ce livre et de mon ressenti, sans jugement ?
Ce livre, c'est le témoignage d'une femme à qui une scoliose est diagnostiquée alors qu'elle est enfant. Suivent des années de déni, de refus de l'opération, de douleurs de moins en moins supportables. Et puis l'électrochoc : l'une de ses filles souffre elle aussi de cette déformation osseuse. Comment lui conseiller une opération que l'on refuse depuis si longtemps ? Alors c'est une femme de 59 ans, avec une scoliose de 73° et le trouillomètre à zéro qui va enfin sauter le pas pour subir une arthrodèse afin de redresser sa colonne vertébrale.
Jamais elle n'aurait pu imaginer les souffrances que cela allait lui occasionner. Déjà la peur, la panique même, au moment d'entrer dans la salle d'opération. Puis le réveil, difficile, douloureux, cauchemardesque, incompréhensible : elle est paraplégique. Cette opération qui devait améliorer ses conditions de vie va drastiquement les diminuer.
Nadalette La Fonta Six nous raconte le déni, la peur, la colère, la honte, l'abattement, la résolution, l'amour et l'amitié. L'importance du soutien des proches, leur souffrance, leur colère. Mais aussi l'éclatement de la famille, cette place que l'on perd et qu'il n'est pas possible de retrouver à l'identique.
La dureté de sa situation ne peut qu'émouvoir. Passer de femme extrêmement active à femme complètement assistée est traumatisant et humiliant. Imaginer ne pas pouvoir vous laver ni aller aux toilettes seule... Ne plus être maître de votre corps... Sans compter les douleurs que personne n'arrive à soulager et les piqûres à répétition...
Une chose qui m'a particulièrement émue, c'est cette femme très active qui devient limite agoraphobe. Après des mois et des mois d'efforts, elle peut enfin sortir dans les rues avec un accompagnateur et une canne. Mais les parisiens sont tellement pressés et le nez dans leur téléphone qu'ils ne regardent pas autour d'eux et, plusieurs fois, dégomment sa canne sans même s'en apercevoir, la laissant tremblante et terrifiée au bras de son sauveur. du coup, ces sorties qui ne devraient être que bonheur (et efforts) deviennent des cauchemars.
C'est vraiment quelque chose qui m'a prise aux tripes, peut-être même plus que la paraplégie en elle-même.
Un autre point que je voulais aborder c'est que, malgré son état, l'auteure fait tout de même l'éloge du personnel hospitalier toujours disponible, souriant, pétillant... humain, tout simplement. Je trouve vraiment bien qu'elle ne fasse pas un amalgame et n'étende pas sa rancune au monde hospitalier dans son ensemble ; qu'elle dissocie l'opération en elle-même et son réveil de la période de sa rééducation.
En résumé, c'est un livre dont le style ne m'a pas totalement séduite. Cependant, c'est une histoire profondément touchante, celle du combat d'une femme pour arriver à reprendre le contrôle de son corps et ainsi arriver à remarcher un jour seule. Une femme qui cherche des réponses : comment est-ce arrivé et pourquoi ? C'est un livre qui donne à réfléchir, qui donne envie de se rapprocher de ceux que l'on aime parce qu'on ne sait pas ce qui pourrait arriver demain, qui laisse entrevoir qu'une catastrophe peut toujours arriver. D'ailleurs, comment réagirions-nous à sa place ? Force ou faiblesse, qui l'emporterait ?
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