La terre est pour moi un grand livre, un livre immense, dont les pages tournent chaque jour. Il n'y a pas deux jours qui se ressemblent.
Et cette terre crie misère. On la maltraite, on la bouleverse à coups de bulldozers. On jette à bas les talus ; les chemins creux disparaissent. La terre est devenue une prostituée. On le regrettera dans quelques années. Ce sera trop tard. On ne trouvera personne pour rebâtir ce qui aura été démoli. Il faut vingt ans pour reconstituer un talus avec sa faune et sa flore. Car un talus est vivant. Il joue aussi le rôle de frontière. Il délimite. Un talus, c'est un monde. Il abrite des bêtes, des rongeurs, qui interviennent dans l'équilibre de la nature. Et les plantes médicinales qui y poussent ? Autrefois, les vaches en les broutant trouvaient ainsi le traitement préventif et naturel qui leur convenait. Elles en sont privées aujourd'hui.
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La Bretagne deviendra très vite un désert si on laisse aller les choses. Il faut garder bois et talus le plus possible pour la santé des gens et des personnes. Le monde du machinisme s'apprête à devenir un monde sans âme.
Qu'il était beau de voir les jeunes gens de notre pays, fiers et gais, chantant, sifflant le long des sillons, dans la foulée de leurs chevaux puissants et intelligents. Il n'était pas nécessaire alors de parcourir trente kilomètres pour travailler chaque matin. Chaque père de famille était roi sur son bout de terre.
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Il est bon, il est indispensable même, d'être instruit à notre époque. Qu'on prenne garde cependant d'oublier à travailler avec les mains qui nous ont été données par le Maître de la Vie. Celui qui se voue totalement aux machines se rend esclave. Le jour ou elles font défaut, il est incapable de se débrouiller tout seul...
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J'ai des amis qui me tiennent compagnie : mes livres. Ils bouillonnent de vie avec leurs personnages. Ils contiennent plus d'idées que m'en ont souvent mes visiteurs.
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Oui, heureux, en vérité, l'enfant qui a pour l'abriter , sa vie durant, un petit bout de maison que ses parents ont bâti à force de peine. si modeste soit-elle, elle a pour lui la valeur d'un palais.
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