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Citations sur Les poésies de A.O. Barnabooth (25)

SCHEVENINGUE, MORTE-SAISON

Dans le clair petit bar aux meubles bien cirés,
Nous avons longuement bu des boissons anglaises;
C'était intime et chaud sous les rideaux tirés.
Dehors le vent de mer faisait trembler les chaises.

On eût dit un fumoir de navire ou de train:
J'avais le cœur serré comme quand on voyage;
J'étais tout attendri, j'étais doux et lointain;
J'étais comme un enfant plein d'angoisse et très sage.

Cependant, tout était si calme autour de nous!
Des gens, près du comptoir, faisaient des confidences.
Oh, comme on est petit, comme on est à genoux,
Certains soirs, vous sentant si près, ô flots immenses!
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Ode

Prête-moi ton grand bruit, ta grande allure si douce,
Ton glissement nocturne à travers l'Europe illuminée,
Ô train de luxe ! et l'angoissante musique
Qui bruit le long de tes couloirs de cuir doré,
Tandis que derrière les portes laquées, aux loquets de cuivre lourd,
Dorment les millionnaires.
Je parcours en chantonnant tes couloirs
Et je suis ta course vers Vienne et Budapesth,
Mêlant ma voix à tes cent mille voix,
Ô Harmonika-Zug !
J'ai senti pour la première fois toute la douceur de vivre,
Dans une cabine du Nord-Express, entre Wirballen et Pskow .
On glissait à travers des prairies où des bergers,
Au pied de groupes de grands arbres pareils à des collines,
Etaient vêtus de peaux de moutons crues et sales…
(huit heures du matin en automne, et la belle cantatrice
Aux yeux violets chantait dans la cabine à côté.)
Et vous, grandes places à travers lesquelles j'ai vu passer la Sibérie et les monts du Samnium ,
La Castille âpre et sans fleurs, et la mer de Marmara sous une pluie tiède !
Prêtez-moi, ô Orient-Express, Sud-Brenner-Bahn , prêtez-moi
Vos miraculeux bruits sourds et
Vos vibrantes voix de chanterelle ;
Prêtez-moi la respiration légère et facile
Des locomotives hautes et minces, aux mouvements
Si aisés, les locomotives des rapides,
Précédant sans effort quatre wagons jaunes à lettres d'or
Dans les solitudes montagnardes de la Serbie,
Et, plus loin, à travers la Bulgarie pleine de roses…
Ah ! il faut que ces bruits et que ce mouvement
Entrent dans mes poèmes et disent
Pour moi ma vie indicible, ma vie
D’enfant qui ne veut rien savoir, sinon
Espérer éternellement des choses vagues.
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L'INNOMMABLE

Quand je serai mort, quand je serai de nos chers morts
(Au moins, me donnerez-vous votre souvenir, passants
Qui m'avez coudoyé si souvent dans vos rues ?)
Restera-t-il dans ces poèmes quelques images
De tant de pays, de tant de regards, et de tous ces
visages
Entrevus brusquement dans la foule mouvante ?
J'ai marché parmi vous, me garant des voitures
Comme vous, et m'arrêtant comme vous aux devantures.
J'ai fait avec mes yeux des compliments aux Dames ;
J'ai marché, joyeux, vers les plaisirs et vers la gloire,
Croyant dans mon cher cœur que c'était arrivé ;
J'ai marché dans le troupeau avec délices,
Car nous sommes du troupeau, moi et mes aspirations.
Et si je suis un peu différent, hélas, de vous tous,
C'est parce que je vois,
Ici, au milieu de vous, comme une apparition divine,
Au-devant de laquelle je m'élance pour en être frôlé,
Honnie, méconnue, exilée,
Dix fois mystérieuse,
La Beauté Invisible.


p.79
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Des villages couleur de la terre et de vieilles forteresses;
Ou bien l'approche d'un port russe, annoncé
Par des milliers de courges vertes flottant sur l'eau brillante
(Comme I'Ausonie parfois, plus discrètement,
S'annonce au navigateur par un fiaschetto vide que berce
Le flot tyrrhénien).

Ob, les levers du soleil d'été sur les mers retentissantes
Et le silence des rivages vus au loin!

Mais laissez-moi m'attendrir un peu sur mon enfance,
Me revoir à quinze ans dans les rues d'Odessa;
Laissez-moi pleurer dans la nuit sans savoir pourquoi,
Et chanter dans le vent ces vers :
"Ya que para mi no vives ",
Sur un air de valse entendu je ne sais où, un air des tziganes,
Chanter en sanglotant sur un air de tziganes!
Le souvenir me fait revoir des pays éblouissants :
Des rades pleines de navires et des ports bleus
Bordés de quais plantés de palmiers géants et de
figuiers
Gigantesques, pareils à des tentes de peau pendues aux
cieux;
Et d'immenses forêts à demi submergées,
Et les paseos ombragés de Barcelone;
Des dômes d'argent et de cristal en plein azur;
Et la Petite-Cythère, creuse comme une coupe,
Ou, le long des ruisseaux les plus calmes du monde,
Se jouent toutes les pastorales du vieux temps;
Et ces iles grecques qui flottent sur la mer...
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Fi des pays coloniaux, qui n'ont pour eux
Que les merveilles de la nature, et n'ont pas su
Même se procurer un Théocrite.
Dégoût des jours passés sur le hamac,
En vêtements de toile, dans des villes sans boutiques
Dégoût des chasses aux bêtes fauves, des résidences
Royales des Indes et des cités d'Australasie,
Où l'on ne fait que penser à toi, par toi, Europe.
Car là, dans le brouillard, sont les bibliothèques!
Oh! tout apprendre, oh! tout savoir, toutes les langues!
Avoir lu tous les livres et tous les commentaires;
Oh, le sanscrit, l'hébreu, le grec et le latin!
Pouvoir se reconnaitre dans un texte quelconque
Qu'on voit pour la première fois ! et dominer le monde,
Par la science, de la coulisse, comme on tiendrait
Dans un seul poing les ficelles de ces pantins multicolores.
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Quelques mois ensoleillés de ma vie sont encore là
(Tels que le souvenir me les représentait, à Londres),
Ils sont là de nouveau, et réels, devant moi,
Comme une grande boite pleine de jouets sur le lit
d'un enfant malade..
Je reverrais aussi des gens que j'ai connus
Sans les aimer; et qui sont pour moi bien moins
Que les palmiers et les fontaines de la ville;
Ces gens qui ne voyagent pas, mais qui restent
Près de leurs excréments sans jamais s'ennuyer,
Je reverrais leurs têtes un temps oubliées, et eux
Continuant leur vie étroite, leurs idées et leurs affaires
Comme s'ils n'avaient pas vécu depuis mon départ...
Non, je n'irai pas à terre, et demain
Au lever du jour la « Jaba » lèvera l'ancre;
En attendant je passerai cette nuit avec mon passé,
Près de mon passé vu par un trou
Comme dans les dioramas des foires.
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L'Eterna Volutta

[...]
Vous voyez en moi un homme
Que le sentiment de l'injustice sociale
Et de la misère du monde
A rendu complètement fou !
Ah ! Je suis amoureux du mal !
Je voudrais l'étreindre et m'identifier à lui ;
Je voudrais le porter dans mes bras comme le berger porte
L'agneau nouveau-né encore gluant...
Donnez-moi la vue de toutes les souffrances,
Donnez-moi le spectacle de la beauté outragée,
De toutes les actions honteuses et de toutes les pensées viles
(Je veux moi-même créer plus de douleur encore :
Je veux souffler la haine comme un bûcher).
Je veux baiser le mépris à pleines lèvres ;
Allez dire à la Honte que je meurs d'amour pour elle ;
Je veux me plonger dans l'infamie
Comme dans un lit très doux ;
Je veux faire tout ce qui est justement défendu ;
Je veux être abreuvé de dérision et de ridicule ;
Je veux être le plus ignoble des hommes.
Que le vice m'appartienne,
Que la dépravation soit mon domaine !
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Mon Dieu, faut-il mourir!
II faudra suivre à travers la maladie et dans la mort
Ce corps que l'on n'avait connu que dans le péché et dans la joie;
O vitrines des magasins des grandes voies des capitales,
Un jour vous ne refléterez plus le visage de ce passant.
Tant de courses dans les paquebots, dans les trains de luxe,
Aboutiront donc un jour au trou du tombeau?
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E pure piously tapándolos in their sleep
Dal pallio glorios das virgens und infants.
With the mind's eye ti seguo sobre levropa estesa,
On the vast Northern pianure dormida, nítida nix,
Oder on lone Karpathian slopes donde, zapada,
Nigrorum brazilor albo di sposa velo bist du.
Doch in loco nullo more te colunt els meus pensaments
Quam in Esquilino Monte, ove della nostra Roma
Corona de plata eres,
Dum alta iaces on the fields so dass kein Weg se ve,
Y el alma, d'ici détachée, su camin finds no cêo.

Note: vous trouverez une traduction de ce langage multiculturel dans le recueil Poésie Gallimard.
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J'ai sur l'âme un cercle lumineux : le hublot,
Comme une vitrine de boutique où l'on vendrait la mer;
[Thalassa]
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