Starski & Chen
Je n'aime pas la chasse, je n'aime pas les chasseurs (oui, je sais, les généralités, c'est mal, mais j'assume !). Je vis près d'une grande forêt, je m'y promène fréquemment et j'y croise parfois des animaux sauvages, biches ou chevreuils par exemple. Je sais aussi qu'il y a des hardes de sangliers qui s'aventurent même en lisière où on peut les croiser le soir quand ils traversent les routes. Je ne suis pas naïve au point d'ignorer qu'une certaine régulation des espèces est nécessaire… Alors lire un bouquin intitulé
le Gibier et dont les différentes parties sont rythmées par des termes issus tout droit de la chasse à courre (vraiment le type de chasse que j'exècre au plus haut point), ce n'était pas gagné ! Il fallait bien la plume terriblement efficace de
Nicolas Lebel pour que j'y parvienne !
Le commissaire Paul Starski (avec un i, pas un y) et le lieutenant Yvonne Chen sont en binôme à la SRPJ parisienne. Ce matin là, ils sont appelés sur ce qui semble être une prise d'otages : des cris, une musique assourdissante (des cors de chasse) mais avant qu'ils n'aient pu intervenir, deux coups de feu retentissent et c'est deux morts qu'ils trouvent dans l'appartement. Deux hommes, un policier marseillais et le patron d'origine sud-africaine d'une firme pharmaceutique. Deux hommes que rien ne semble relier. Starski et Chen se lancent sur la piste d'une femme qui a été vue quittant l'immeuble peu de temps avant… Une femme, Chloé de Talense, que Starski connaissait très bien il y a près de vingt ans et que tout accuse. Starski entend bien l'innocenter car il en est persuadé, Chloé, sa Chloé, ne peut en aucun cas être une meurtrière. Yvonne Chen en est moins certaine mais les différentes pièces du puzzle qui s'étale sous leurs yeux semblent donner raison au commissaire : Chloé est la cible,
le gibier puisqu'il s'agit d'une sorte de partie de chasse très bien organisée. Par qui ? Pourquoi ? Les chiens sont lâchés !
J'ai beaucoup aimé ce polar au suspens implacable. Dans un polar, j'aime bien être manipulée par l'auteur, et là j'ai été servie :
Nicolas Lebel nous ballade du début à la fin avec cette chasse au gros gibier où tout le monde ment, ou presque. Autre atout de l'auteur, ses personnages : alors oui, le duo de flics aussi différents que possible, c'est du déjà vu (lu). le commissaire Starski plutôt gentil, empathique, est emberlificoté dans des problèmes familiaux (sa femme le quitte, son chien vient de mourir…) et sentimentaux : on a envie de le secouer parfois, et sa coéquipière Yvonne Chen ne s'en prive pas. C'est elle qui mène la danse dans ce binôme, elle est froide, glaciale même diraient certains, réaliste, efficace, tenace. Elle n'a pas d'ami (elle n'en veut pas), pas d'attache et sa vie privée se résume à des rencontres d'un soir (deux fois par semaine) dans des bars à cocktails (mojito pour Yvonne). Alors quand Starski est à la dérive, Chen ne lâche rien, jusqu'au bout.
Je vais me plonger directement dans le second volet de cette trilogie.
J'ai bien aimé aussi le petit clin d'oeil de l'auteur à ses confrères du « gang du Writers'Cthulhu » : un rôle pour chacun (l'infâme Pontaulion, Henri de son prénom !).