J'ai un terrible défaut, je dois l'avouer, c'est de ne jamais lire les romans d'un même cycle dans l'ordre… J'ai déjà vécu cela avec
Jacques Saussey. On ne devrait même pas parler de défaut me concernant mais plutôt de toc, ce qui joue d'autant sur mon appréciation des romans concernés. Alors oui, j'ai trouvé ce roman de
Nicolas Lebel beaucoup moins ambitieux et original que le précédent que j'avais lu à savoir "
De cauchemar et de feu". Mais j'assume pleinement ma responsabilité. "
L'Heure des fous" est, en fait, le premier roman de cet auteur et le premier donc du cycle consacré au Capitaine Mehrlicht alors que "
De cauchemar et de feu" en est le quatrième. Vous voyez où je veux en venir ?
Nicolas Lebel est un auteur à suivre car il se bonifie comme le bon vin. Il faut simplement lire ses oeuvres dans l'ordre pour s'en rendre compte. Je fais donc ici officiellement mon mea culpa.
Si vous avez donc suivi mon mauvais exemple, au seuil de la lecture de ce roman, pensez à totalement oublier l'ambiance irlandaise et le personnage de Seamus car
Nicolas Lebel nous entraîne, ici, dans le microcosme du Paris des pauvres, des oubliés de la vie et des bas-fonds, donnant au passage un petit côté uchronique à son roman (vous le découvrirez dans l'avant-dernier chapitre). Ce thème est d'autant plus d'actualité aujourd'hui que l'auteur nous montre à quel point l'injustice et le ressentiment peuvent conduire aux extrêmes des gens désespérés. Cela pourrait parfois paraître exagéré tant les causes qui motivent certains personnages paraissent dérisoires mais l'actualité présente nous laisse hélas penser qu'un tel scénario serait tout à fait possible de nos jours. A certains moments, les hommes semblent condamner à l'impensable pour revendiquer simplement le droit d'exister et c'est ce que
Nicolas Lebel illustre ici en reprenant avec justesse le topos de la Cour des Miracles si cher à Hugo. Plus qu'un roman policier, l'auteur nous offre ainsi un roman social où justice et désespoir tentent difficilement de faire bon ménage.
Outre sa thématique, le roman se révèle particulièrement intéressant une nouvelle fois par les portraits des personnages de l'équipe du « batracien » Mehrlicht. Dossantos est touchant par sa rigueur extrême qui tourne parfois au ridicule et sa maladresse en matière de séduction amoureuse. Plus qu'un personnage empreint de féminisme, le lieutenant Latour brille avant tout par son humanité extrême et son désir d'aider son prochain quitte à mettre en péril sa propre carrière. Quant à Ménard, il semble n'être que le premier stagiaire souffre-douleur de Mehrlicht qui finira, toutefois, par tomber sous le charme des méthodes parfois contestables et contestées du capitaine au lexique fleuri particulièrement fourni. Une fois que vous rencontrerez cette équipe, vous ne pourrez plus vous en passer, d'autant qu'elle évolue dans un milieu policier qui ne ressort pas indemne de cette intrigue. L'attitude de certains personnages voire de certains services vous glaceraient presque le sang. On veut bien croire que la sécurité des français vaut tous les sacrifices mais certains sont plus difficiles à accepter que d'autres.
En résumé, si vous n'avez encore jamais lu du
Nicolas Lebel, foncez, vous ne le regretterez pas !
Lien :
https://mespetitsplaisirsamo..