Quand on aime on est toujours sur le quai d'une gare.
Ce qui a été dit a été assassiné.Nos paroles qui ne grandiront pas et qui n'embelliront pas se faneront à l'intérieur de nos os.
Les petites lumières dans ma peau convoitèrent les petites lumières dans la peau d'Isabelle, l'air se raréfia. Nous ne pouvions rien sans les météores qui nous entraîneraient dans leur course, qui nous jetteraient l'une dans l'autre. Nous dépendions des forces irrésistibles. Nous avons perdu conscience mais nous avons opposé notre bloc à la nuit du dortoir. La mort nous rappelait à la vie : nous sommes entrées dans plusieurs ports.
Andréa était un joli quartier d'hiver. Ses yeux brillaient de froidure, la gelée fendait ses lèvres toujours gercées.
Je lui serrais la main, j'enfermais l'oxygène de la liberté.
J'ai trouvé en te rencontrant un sens à mon néant.
Nous nous aimions et nous nous retenions:nous nous tenions en équilibre sur le pétale d'une églantine
Attendre et faire attendre est une délicieuse perdition.
Nous avions créé la fête de l’oubli du temps. Nous serrions contre nous les Isabelle et les Thérèse qui s’aimeraient plus tard avec d’autres prénoms, nous finissions de nous étreindre dans le craquement et le tremblement. Nous avons roulé enlacées sur une pente de ténèbres. Nous avons cessé de respirer pour l’arrêt de vie et l’arrêt de mort.
Nous nous serrions encore, nous désirions nous faire engloutir. Nous nous étions dépouillées de notre famille, du monde, du temps, de la clarté. Je voulais que serrée sur mon cœur béant Isabelle y rentrât. L'amour est une invention épuisante. Isabelle, Thérèse, disais-je en pensée pour m'habituer à la simplicité magique des deux prénoms.
Renée contemplait la photographie, devinait, c’est probable, un couple à côté d’elle puisqu’elle n’osait pas lever les yeux. J’étais prise entre la fausse innocence de l’une et l’audace de l’autre. La main d’Isabelle dans les plis de mon tablier me caressa.