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EAN : 9782070238323
196 pages
Gallimard (01/11/1948)
3.84/5   40 notes
Résumé :
L'Affamée est la description de l'Amour. Le livre de Violette Leduc nous introduit au sein d'une connaissance : phrase après phrase, pas après pas, comme on marche dans le sable, il avance. Il ne s'arrêtera qu'au cœur de ce monde où le rêve jaillit du vrai, s'y unit, le complète, où tout est vrai.Les transpositions que fait Violette Leduc - ces brusques incursions, dans un domaine qu'il faut appeler mystique - sont frappantes. Ainsi se crée lentement, avec efficacit... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Thérèse et Isabelle (1954) et L'Affamée (1948) Violette Leduc

Je choisis de regrouper ces deux récits dans une même critique car, même s'ils sont séparés de plusieurs années et évoquent deux périodes différentes de la vie de l'auteur, ceux-ci sont une ode à l'amour, l'amour que Violette considère comme une « grâce ».
En cela, les deux récits rappellent le fameux poème de Louise Labbé : « je me brûle et me noie » dans toute sa puissance passionnelle incandescente et son idéal fabuleux et dévastateur.
La soif d'amour et de possession de l'auteur (comme en parle Simone de Beauvoir dans la préface de la Bâtarde paru en 1966) sont inextinguibles et ne peuvent s'épancher que dans l'écriture. Ainsi, Simone conseillera à Violette de se mettre sérieusement au travail, d'organiser ses obsessions, de leur donner une forme, de les sublimer.
Le court récit, Thérèse et Isabelle est construit comme une longue poésie en prose, à la fois lyrique et épique car constitué de cinq moments clés, telle une tragédie. La destinée et le tragique sont présents sous la forme de la rencontre amoureuse de deux jeunes filles dans un pensionnat et de l'ombre inquiétante de la mère qui peut à tout moment décider du destin de sa fille. Ainsi, le lieu unique et fermé correspond à la scène de l'amour tandis que le dehors est celui où rôde le danger. Au fil des pages, le lecteur voit se dessiner le jeu de séduction d'Isabelle vers Thérèse qui la rejette, dans un premier temps. Vient ensuite le temps de l'amour et le désir, l'acte amoureux, l'inquiétude de Thérèse en proie à ses démons : la peur de l'abandon et le désir de possession de l'être aimée et enfin, la perte de l'être cher, la séparation à jamais décidée par la mère, tel un couperet.
Le roman L'Affamée est le chant d'amour d'une femme pour une autre qui ne s'intéresse à elle qu'amicalement et intellectuellement et qui va devenir une sorte d'idole, une muse, en tout cas un exemple qui lui permettra de mener à bien ses projets d'écriture. La passion que « Madame » (nous savons qu'il s'agit de Simone de Beauvoir) a déclenchée est dénommée « l'événement » dans le récit. Si ce sentiment puissant va être couché sur le papier, il sera aussi dévastateur car il renvoie l'auteur, tout au long du roman, à sa laideur, ou du moins ce qu'elle croit être abominable chez elle, son visage : « J'ai vu des abats-jour invendables. On les avait alignés sur le rayon d'une arrière-boutique. On ne les avait pas serrés les uns contre les autres. Leur laideur ne se froissait pas. Mon visage est un abat-jour invendable, mais je n'ai pas d'arrière boutique pour le dissimuler... ».
Ce récit autobiographique est composé d'un enchaînement de paragraphes dépeignant une lutte incessante de pensées essentiellement en proie aux tourments passionnels. Au fil du récit, les marqueurs temporels font leur apparition, à la façon d'un journal de bord, celui de la conquête de l'objet du désir, guetté, suivi, attendu dans des lieux précis. le titre L'Affamée correspond tout à fait aux besoins d'amour de l'auteur qui se positionne presque comme un ogre, toujours aux aguets pour saisir un geste, un regard, la voix ou un objet saisie par l'être désirée. Ce récit oscille entre réalisme et onirisme, emportant le lecteur dans des fantasmes poétisés et lyriques. L'écriture est d'une grande beauté mais parfois, le lecteur peut se perdre dans les méandres d'une pensée très imagée qui finit par s'isoler et qui l'éloigne, le refoule même parfois, par une systématisation rythmique du récit des événements et de leur appréhension. Toutefois, la récurrence des allers et venues entre raison et passion montre toute la fureur (au sens classique du terme) de l'auteur qui lui fait perdre le bon sens ou encore le désir de vivre, de se laver, de se nourrir, ravivant des blessures d'enfance gravées à jamais qui ne pourront trouver l'apaisement ou du moins une forme d'acceptation que par l'écriture : « Quitté les cris de la rue de Reuilly, acheté du papier à cigarettes, une plume rouillée à cinquante centimes, un cahier. Couru follement jusqu'à mon réduit, tombée sur mon lit. Un assassin qui n'a plus rien à faire. »
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Dans l'Affamée, la narratrice crie son amour éperdu pour une personne qui reste inconnue jusqu'à la fin. Elle l'encense naturellement, la mettant sur un piédestal, et c'est tout juste si elle ne se considère pas comme inférieure à elle.
C'est seulement quand on connaît toute l'oeuvre de violette Leduc que l'on comprend qu'elle s'adressait dans ce livre à sa bienfaitrice, Simone de Beauvoir (ne pas se fier à la dédicace).
Ce livre est injustement méconnu, alors qu'il est un beau roman d'amour, avec une sincérité et une force de récit incomparables.
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Sur la 4e de couverture, il est écrit que "l'Affamée est la description de l'Amour". On n'en saura pas plus à moins d'ouvrir le livre.
L'écriture est très simple, très rapide, les phrases sont courtes, et elle contient une fulgurance poétique. le manque, l'obsession, l'amour et la souffrance tendent le style de Violette Leduc.
Sans la nommer, elle aime, elle attend sans cesse une femme (on sait que cette femme est Simone de Beauvoir). Elle attend les moments où elle la rencontre au café, elle redoute ses départs. le manque d'elle est atroce, elle attend quelque chose qui n'arrivera jamais. C'est un amour fou, torturant, obsédant, irréalisé.


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Un très beau roman au style encore plus coupé que les autres. L'auteur nous raconte son quotidien imprégné de son obsession amoureuse pour celle qui n'est jamais nommée : Simone de Beauvoir.
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« J'entrais dans le Café de Flore avec deux minutes de retard. J'avais laissé échapper deux minutes ; j'étais heureuse et j'étais écrasée. Je me souviens de sa voix la première fois et la deuxième fois que je l'ai rencontrée : c'est une voix un peu voilée ; c'est un déchirement derrière un écran ; c'est une mélancolie au second plan. »
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Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
C'est le soleil couchant.
Le potager du vieillard profite de ce ciel tiraillé par l'orient, de cette lumière qui vaut un sonnet. Le morceau de terre avec les choux de pommes est tragique. Le vert a été stupéfié.
Les chenilles ont fait des orgies sur les feuilles.
Certaines ont été mitraillées par les rongeurs.
Les rames des pois mange-tout sont des lances de gladiateurs fichées en terre qui maudissent le ciel. Le feuillage des carottes est volage. Avec leurs replis, les laitues rondes sont indécentes.
On distingue leur cœur pâle. La chevelure en tubes des échalotes est une défaite étalée sur la terre. La lumière se rend. Le paysage se confie à la nuit.
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Aimer est difficile mais l’amour est une grâce
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L’orgueilleux est un homme couvert de plaies. Il est une grotte dans laquelle le sang suinte sans discontinuer. Je m'étais lancée sur cet homme avec la franchise et des épines dans les mains. Je croyais que l'amitié le permettait [...] Quand je le revois, il m'accorde un bonjour mais c'est moi qui fut la plus cruelle. Je suis coupable d'avoir réfléchi trop tard à la condition sanglante de l’orgueilleux [...] Il ne me sera pas accordé de découvrir et de respecter chez lui de nouvelles plaies. On dit que c'est un homme fort. C'est un homme qui se bat avec des mains à chair vive. Les expériences humaines les ont dépiautées. Elles frappent mais elles saignent. Cet homme est dur parce qu'il a vécu.
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Quand j'ai lu Colette, j'ai aimé sa langue très savante, sa puissance d'évocation, mais je la trouvais bien timide du point de vue érotique. Je me disais, bien avant de commencer à écrire, j'aimerais en dire plus qu'elle. Parce que les femmes n'arrivent pas à se libérer de l'érotisme, même celles qui écrivent.
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Mon visage est impardonnable. Ma laideur m'isolera jusqu'à ma mort. Je recommencerai seule les journées. Ne pas faiblir. Je me détourne vite de la laideur d'un autre parce que la fraternité est trop cuisante. Quand un être au visage ingrat s'assied à côté de moi dans le métro, je suis dans les noces de sang. Alors je change de place. J'ai adopté le comportement indifférent pour la laideur des autres. La preuve de mon respect le plus profond.
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Videos de Violette Leduc (11) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Violette Leduc
Lecture par Mathilde Forget & Laura Vazquez Festival Paris en toutes lettres
En 1955, les Éditions Gallimard publient une édition censurée de Ravages de Violette Leduc. Un drame personnel et littéraire pour l'autrice, qu'elle décrit encore vingt ans après comme un « assassinat ». Cette année, une nouvelle édition propose enfin une structure revue et augmentée des passages censurés, au plus près de l'entreprise romanesque et autobiographique de Violette Leduc. Mathilde Forget qui a écrit l'une des deux préfaces, propose une soirée mêlant archives, lectures et chansons, accompagnée par la poétesse et romancière Laura Vazquez, pour fêter ensemble cet événement littéraire.
« Mon baiser est intègre lorsque j'embrasse indirectement la peau. La bouche s'épuise, la faim persiste. » Violette Leduc, Ravages
À lire – Violette Leduc, Ravages (édition augmentée), coll. « L'imaginaire », Gallimard, 2023. Mathilde Forget, de mon plein gré, Grasset, 2021. Laura Vazquez, le livre du large et du long, éditions du sous-sol, 2023.
Son : Lenny Szpira Lumière : Hannah Droulin Direction technique : Guillaume Parra Captation : Claire Jarlan
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