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Citations sur Par les armes (66)

C'est le premier objet [épée] créé pour un usage dépourvu d'ambiguïté : blesser, tuer.
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… l'actuelle Hongrie a connu un Âge du bronze d'une extrême richesse, avec des productions métalliques d'une qualité exceptionnelle. Les dépôts métalliques y sont très nombreux et remarquables. Les épées y sont d'ailleurs là aussi très précoces et de très belle facture sur le plan technique. Il est donc légitime (si tant est qu'un chercheur ait besoin de valider chacune de ses explorations intellectuelles) de parcourir des milliers de kilomètres pour découvrir des centaines et des centaines d'objets conservés dans des musées de villes, parfois assez modestes. Sans compter que ces époques ne se comprennent que mises en perspective à l'échelle européenne, et certainement pas dans une dimension nationale plaquée sur les frontières actuelles qui n'ont aucun sens et aucune réalité.
p. 296
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« Par les armes ; “Le jour où l'homme inventa la guerre” » - Anne Lehoërff, éditions Belin © avril 2018
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La majorité des hommes aspirent à vivre en paix. C'est d'ailleurs ainsi que l'on a longtemps voulu voir le paysan néolithique, préoccupé essentiellement par la croissance de son blé et le bien-être de son troupeau. Si l'on veut aller plus loin dans la compréhension des conflits les plus anciens, il faudrait tenir compte de ces rythmes, essayer de voir ce que la guerre produit comme conséquence dans les sociétés de paix, ou comment ces dernières se préparent à une guerre qui pourrait advenir dans le futur.
p. 293
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À HAUTEUR D'HOMMES
L'épée dit l'arme. L'arme incarne le guerrier. Le guerrier signe la guerre. La guerre suppose la société de guerre. Et la société de l'Âge du bronze européen déclare donc qu'elle a inventé une guerre dans sa forme la plus aboutie...
La logique des enchaînements s'impose. Pourtant, cette évidence fut longtemps ignorée : d'abord parce que l'on ne connaissait ni les sources de cette possible guerre très ancienne, ni « l'Âge du bronze » ; ensuite parce que ces sociétés n'entraient pas dans les modèles que l'Occident avait conçus. Les “boîtes” dans lesquelles on range volontiers l'histoire, et qui rejoignent les “tranches” imaginées par Jacques Le Goff. Parfois, il faut donc percer des trous, ou même abattre des parois, réagencer ou grignoter les tranches.
p. 287
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Il faut sans doute aller plus loin. Si c'est le bronzier qui a été, littéralement, l'artisan de ce possible épanouissement, dans une société inégalitaire mais non urbanisée, c'est cette invention qui fait évoluer la société dans un mouvement que l'on pourrait qualifier « d'ascendant », de l'épée à l'État, qui serait en quelque sorte inverse de celui de la Mésopotamie. Les armes sortent de l'atelier du bronzier, mais cet artisanat a des contraintes telles qu'il n'est pas envisageable qu'il se développe sans que la société, les hommes au pouvoir, le gouvernement le portent et l'organisent. La technologie crée non seulement l'épée, le combat individualisé, mais les formes d'État qui encadrent et légitiment la guerre au sens plein. Vu sous cet angle, l'Occident n'est pas en avance ou en retard sur d'autres sociétés.
p. 284
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À partir de l'Âge du bronze, l'ampleur du fait guerrier ne cesse plus de croître. Pire, à partir du moment où l'écrit s'impose dans des sociétés étatiques, la guerre est le premier sujet des récits. Ils donnent ainsi l'impression que la guerre a accompagné l'histoire des sociétés. Pourtant, cette question a préoccupé les sociétés bien avant qu'on ne la raconte au travers des mots. Les typologies de guerre narrent les sociétés autant que les modes organisés de violence. Elles recouvrent d'ailleurs globalement les divisions par ailleurs mises au point par les archéologues, mais qui n'avaient pas toujours intégré le conflit comme une composante inhérente à l'espèce humaine, au moins depuis Sapiens. Hélas. Hélas, car Sapiens c'est nous, et qu'il (nous...) n'a cessé de mettre son intelligence et certaines de ses capacités cognitives au service de cet objectif, tuer l'autre.
p. 281
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À la question « Par quoi caractérise-t-on l'Âge du bronze ? », peut-être faudrait-il répondre : la naissance de la “guerre” comme fait social total. Cette réalité paraît de manière si forte au travers de ce qu'implique le développement de panoplies militaires, que je qualifierais ce temps « d'Âge de la guerre structurante ».
L'Âge du fer se distingue par quelques faits, dont une forme territoriale de centralisation. Il entérine par ailleurs l'accroissement des spécialisations dans tous les domaines de la société comme dans la conception de la guerre.
p. 280
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Pour ce qui est de la violence, les traces d'impacts sur certains restes osseux attestent sa réalité. Cette composante humaine fait partie des sociétés du Paléolithique. Elle ne résout pas cette fausse bonne question de l'idée de violence première chez l'homme, qui relève d'une opposition trop simpliste entre homme violent et homme pacifique pour permettre d'envisager l'idée même de la violence. Elle ne conforte pas pour autant le modèle de Hobbes, mais ne réfute pas violemment celui de Rousseau. Elle est présente. Elle ne bénéficie pas de moyens spécifiques. Elle n'est pas inscrite dans un système social abouti. Dans des sociétés de prédateurs, on peut la concevoir comme un moyen éventuel d'acquisition ou de protection. Dans la mesure où la mort est prise en charge et ritualisée, il faut aussi admettre que la mise à mort d'autrui entrait dans des logiques mentales qui la rendaient un minimum “acceptable”, si ce n'est légitime. Si je tentais d'être Christian Jürgensen Thomsen deux siècles après lui et que je me posais en typo-chronologiste de la guerre rapportée à une époque, je qualifierais cette première forme « d'Âge de la violence empirique ». Sans doute faudrait-il y introduire des nuances pour rendre compte des variations (y compris technologiques) des très longs millénaires du Paléolithique.
p . 277-78
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La naissance de l'épée signe l'affirmation de la guerre comme fait social total, dans la mesure où chacun dans ce système est assigné à un rôle, à une tâche. Avec l'épée, le combat rapproché et la guerre, naît également — et logiquement — le guerrier. Celui-ci est-il nécessairement un homme ? Dans l'absolu, une femme peut combattre autant qu'un homme. Sans doute la question de la force physique peut-elle entrer en ligne de compte, mais seulement pour certains modes de combat. De surcroît, il est des hommes malingres comme il est des femmes fortes. Il existe d'ailleurs un mythe où les femmes sont au combat, les Amazones. Il est vrai que la légende raconte qu'elles s'amputent d'un sein et mutilent ainsi leur féminité. Au-delà du mythe, une thèse récente cherche à démontrer leur réalité dans certaines régions d'Europe orientale et aux confins de l'Asie (en terre scythe pour l'essentiel) à partir du ville siècle avant notre ère. Des tombes de femmes cavalières contenaient en particulier des armes (essentiellement des flèches, plus rarement des lances, des casques et même des épées), ce qui tendrait à montrer qu'elles n'étaient pas exclues des combats. La présence des flèches une fois encore ne règle pas tout, car leur usage peut être double et la présence féminine à la chasse n'est pas propre aux Scythes. En revanche, la présence de lances ou d'épées dans des sépultures de femmes, associée à des stigmates caractéristiques d'une vie à cheval et de traumatismes osseux, invite à ne pas exclure une présence précoce de femmes au combat dans ce contexte particulier. Comme les hommes, elles partagent par ailleurs des tombes d'une très grande richesse.
p. 256
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Le guerrier de l'An Mil représente un tel coût, une telle logistique, qu'il n'est concevable que que dans une société hiérarchisée, spécialisée, où la guerre est une activité, structurante et légitimée pour ceux qui la contrôlent. Considérant que ces populations occupent des territoires identifiables et limités par des frontières, il n'y a qu'un pas à franchir pour oser proposer un type de société hiérarchisée et étatique (quelle qu'en soit la nature précise), des populations soumises à un mode de gouvernement placé entre les mains d'un petit nombre. Sur quel territoire ou royaume règnent les hommes de pouvoir ? Quelle place y accorde-t-on aux femmes, totalement absentes du registre guerrier ? Qui est notre jeune guerrier ? Les hommes en armes sont-ils, comme dans d'autres modèles sociétaux, ceux qui commandent, ceux qui contrôlent ? Les hommes de guerre sont-ils aussi les hommes de gouvernement ? C'est possible. Les données matérielles nous mènent vers une activité militaire qui semble cohérente avec un modèle social de ce type, qui porte littéralement la guerre, même s'il est difficile d'aller beaucoup plus loin dans le détail.
p. 246
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