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EAN : 9782220020181
451 pages
Desclée de Brouwer (01/01/1975)
2.71/5   7 notes
Résumé :
Face à la souffrance, les philosophes et les théologiens ont souvent fait preuve d'arrogance. Ils veulent tout expliquer. Et même s'ils le font pour glorifier Dieu et consoler les hommes, le moyen n'est pas bon, parce qu'il n'est pas vrai. C.S. Lewis évite ce piège. À une logique descendante, qui prétend tout connaître des desseins de Dieu et expliquer la finalité de tous nos maux, il préfère l'élan ascendant, qui part de notre expérience humaine, avec ses incertitu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Je remercie Babelio de m'avoir adressé ce livre, intitulé "Le problème de la souffrance" de Clive Staples LEWIS dans le cadre de son opération Masse Critique.

Lorsque j'ai choisi ce thème parmi les titres proposés, je savait qu'il s'agissait d'un essai chrétien, et c'est en toute connaissance de cause que j'ai coché l'ouvrage comme pouvant m'intéresser.

L'auteur est né à Belfast en 1898 et mort en 1963 à Oxford. Il était un universitaire connu pour ses travaux sur la littérature médiévale ainsi que pour ses écrits apologétiques chrétiens.

C'est sous l'influence de John Ronald Reuel Tolkien, auteur du "Seigneur des anneaux", qu'il s'est converti au christianisme, devenant un "laïc de l'Eglise d'Angleterre (Eglise anglicane, qui se présente comme catholique et réformée en ce sens qu'elle ne reconnaît pas l'autorité du pape).

Ses chroniques radiophoniques sur le christianisme diffusées au cours de la Seconde Guerre mondiale connurent un énorme succès.

Il est également l'auteur du très célèbre "Monde de Narnia", fantasy destinée aux enfants et célèbre dans le monde entier.

°°°°°°°°
Examinons maintenant l'ouvrage :

Je ne cache pas que la lecture de cet essai m'a profondément déçue. Certes, je m'attendais à une perspective chrétienne, et ce n'est pas ce critère qui a généré mon irritation croissante : la vision chrétienne du monde ne me rebute pas, pas plus que la vision athée, ou païenne, pourvu qu'elles guident vers une spiritualité humaniste.
Tous les chemins mènent à Rome, et depuis que les hommes sont hommes, il n'y a pas lieu d'écarter avec dédain et sans les examiner, les innombrables voies qu'ils ont tracées afin d'accéder à une éthique et à une vision réconciliée de l'humain avec sa destinée (vie, joies, souffrances, mort)

Lewis ayant été un universitaire, je m'attendais de sa part à une hauteur de vue, à un raisonnement philosophique et religieux, à une ouverture au-delà de la littéralité des textes. Je n'ai rien trouvé de tout cela dans sa réflexion pesante et lamentable.

Je remets tout d'abord l'écriture de ce livre dans son contexte afin de ne pas commettre d'anachronisme.

Il a été écrit en 1940, à un moment où certes la guerre faisait rage mais où il manquait encore quelques années pour faire le bilan effroyable de la période nazie. Par ailleurs, le succès des émissions de radio de Lewis est compréhensible comme étant porteur d'une espérance dans un contexte sombre. La consolation et l'apaisement valent mieux quand tout va mal que l'insécurité, et bien souvent l'esprit critique génère l'intranquillité.

En revanche, je ne m'explique pas pourquoi cet ouvrage médiocre fait l'objet de réimpressions successives.

Je n'ai trouvé aucune réponse à mes interrogations, le problème m'ayant paru tout simplement escamoté aux profits d'une interprétation littérale des textes et d'envolées lyriques stupéfiantes ; ce qui pourrait paraître contradictoire et ne l'est finalement pas tant que ça, tant il est vrai que fanatisme (j'ose ici le mot) et délire vont souvent main dans la main.

La souffrance trouve son origine dans la chute. Elle est nécessaire à la rédemption. Point. Tout est dit. Ite missa est.

En effet, Adam était heureux au paradis parce qu'il souscrivait LIBREMENT à sa nature de créature, soumise à son créateur. Son orgueil démesuré lui a fait convoiter l'autonomie, la créature a voulu se libérer de son créateur ; Frankenstein a voulu voler de ses propres ailes et a occasionné sa chute en rompant le contrat qui le liait à Dieu.
Pourquoi Dieu a-t-il laissé l'homme rompre le pacte sacré ? C'est clair selon Lewis : Dieu a accepté la chute d'Adam pour "POUVOIR MANIFESTER SA BONTE".
Désormais l'humanité, livrée à elle-même sous le regard divin, connaîtra la souffrance, qui représente pour elle l'unique moyen de s'amender. Qui est en quelque sorte le "porte-voix de Dieu" (sic).
Son rôle est de dissiper dans le coeur de l'homme l'illusion qu'il est maître de son destin.
Désormais, seul l'acte plénier d'abandon à Dieu de sa personne permettra la réhabilitation du pécheur, et cet acte requerra la souffrance, autrement dit le martyre.
Son existence est donc incontournable, et co-substantielle à l'existence humaine depuis la désobéissance d'Adam.
Elle est même un bienfait et voie vers le pardon divin.
Immense est Dieu dans sa bonté, qui accueillera dans son sein cette créature doublement dégradée, par sa trahison première, et par le fait de n'avoir plus d'autre recours qu'en Lui.
A aucun moment n'est abordée la question de savoir pourquoi Dieu éprouve un tel désir d'exprimer sa bonté. Dieu étant parfait a-t-il besoin d'un acte pour réaliser cette perfection ? N'y a-t-il pas contradiction entre l'essence divine et cette nécessité d'exercer un des attributs de sa perfection, la bonté ?
Sur ce point pas d'information, sauf à considérer que notion de la "bonté" de Dieu ne serait en rien comparable à la "bonté" humaine mais se réfèrerait à une vertu infiniment supérieure incluant une mansuétude infinie, inaccessible à notre entendement.

Le manque d'empathie de l'auteur est flagrant : on se rend bien compte qu'il n'appartient pas à la partie la plus déshéritée de l'humanité, et que son expérience de la souffrance a dû être modérée (on a l'impression que ses références personnelles en la matière ne vont pas plus loin qu'un mal de dent ou qu'une déception sentimentale). En outre il a oublié dans l'affaire l'inséparable compagne de la souffrance : l'injustice.

Ainsi ne trouvera-t-on aucune allusion à la répartition inégale des maux dans la population humaine ; l'auteur ne manifeste aucune commisération envers les victimes innocentes de la maladie et de la guerre, notamment les enfants ; dès le début de son exposé il a opportunément évacué ce qui pose problème à un grand nombre d'entre nous : le scandale de la souffrance. Le simple fait de l'évoquer sous cet angle remettrait en cause la divine volonté. Nous n'oserions !

Pourtant, que dire du sort des enfants morts nés et qui n'ont pas eu le temps de souffrir suffisamment pour expier la faute originelle ? ou de celui des nourrissons finissant au bout d'une pique en temps de guerre ? ou encore de celui de ces bambins emplissant les services de pédiatrie des hôpitaux ? Le problème de la souffrance animale est quant à lui évacué d'un coup de baguette magique : n'étant pas pourvu d'une conscience, l'animal ne souffrirait pas vraiment. D'ailleurs cette souffrance animale existe-t-elle vraiment ? L'avons-nous personnellement expérimentée ?

Ma grand-mère, née la même année que Lewis et ayant perdu tous ses frères à la guerre 14-18, aurait pu lui poser aussi quelques questions, mais je doute que ses réponses l'auraient satisfaite.

Malgré les terribles destinées des enfants, des animaux que nous sacrifions chaque jour, des jeunes soldats morts prématurément après avoir piétiné des années dans la boue, les cadavres, les excréments et le sang , soyons convaincus que "Dieu reconnaîtra les siens" et clamons d'une voix mâle (celle de Lewis lui-même) : "Que la volonté de Dieu soit faite ! ".

Puis reprenons serein, indifférents, le cours de notre petite existence en priant le ciel de n'être pas trop éprouvés. Evitons de regarder à droite et à gauche les spectacles déprimants, arrêtons de lutter contre la pauvreté voulue par Dieu, plaignons les riches et n'abordons surtout pas le problème du mal dans son entier, notion pourtant contigüe à celles d'injustice et de souffrance.

Après tout, sommes-nous les gardiens de nos frères ?

Lewis s'intéresse non à la souffrance réelle vécue dans la chair ou dans l'âme, mais au concept de souffrance mis en regard avec les écritures. Cela confère à sa démonstration un aspect froid, détaché, dogmatique, le regard de quelqu'un qui cherche à démontrer une thèse à tout prix, une thèse en prêt-à-penser. L'incroyable faiblesse de son argumentation, la pauvreté de ses sources documentaires sont indignes d'un intellectuel et désignent plutôt le nouveau converti animé d'un zèle prosélyte de mauvaise qualité.

Comment un universitaire distingué peut-il chercher à prouver le bien-fondé d'une calamité par une minuscule partie de l'ancien testament ?

Un Dieu qui poursuit ainsi ses créatures pour avoir désobéi est un Dieu vengeur et peu sympathique, mais nul doute que je sois la seule à le penser : Dieu n'est que bonté, c'est Lewis qui nous le dit.

J'avais l'espoir d'une rencontre avec une de ces évidences fulgurantes qui changent notre regard sur la réalité humaine ou aident à la considérer sans trop de colère, d'indignation, de peur.

C'est raté !

Il existe pourtant des êtres de lumière : Saint Jean de la Croix, Sainte Thérèse d'Avila, Lacordaire qui écrivit :"« il ne fallait partir ni de la métaphysique, ni de l'histoire, mais prendre pied sur le sol même de la réalité vivante et y chercher les traces de Dieu."

N'évoquons même pas la foi active de soeur Térésa, de soeur Emmanuelle, de l'abbé Pierre...

Ils ne nous délivrent pas un message, une solution, mais nous aident à réfléchir. Ils nous éclairent, nous montrent leur chemin et nous aident à tracer le nôtre, sans nier la tragédie humaine, qu'ils ne nient pas et ne tentent pas d'évacuer à l'aide de belles paroles. Ils n'ont pas à coeur de démontrer, mais de montrer. Et ils savent dire aussi "je ne sais pas".

Pour finir, l'appendice de l'ouvrage est consternant d'indifférence et de frivolité :

Le malade qui souffre, assène Lewis, "ne se plaint pas de façon bruyante en général. Il réclame qu'on le soulage, mais ne gaspille pas son souffle à décrire minutieusement ses maux. Il ne perd pas habituellement le contrôle de lui-même au point de se livrer à la violence ou de déraisonner. Il est rare que la souffrance physique devienne en ce sens intolérable. Quand une douleur physique aigüe et courte vient à cesser, elle ne laisse aucune trace visible dans le comportement de celui qui l'a subie. La souffrance plus prolongée a des effets plus remarquables. Elle est souvent acceptée sans plainte, ou presque, et une grande résignation et une grande force se manifestent. L'orgueil est vaincu, ou bien souvent il entraîne la décision, de la part du patient, de dissimuler sa souffrance. (...) Certaines personnes dans un état physique pareil, conservent la sérénité et l'oubli d'elles-mêmes jusqu'au bout. C'est un spectacle rare, mais émouvant à contempler."

Quel spectacle émouvant que celle d'un être à l'agonie mais qui sait conserver jusqu'au bout sérénité et dignité ! La honte soit sur celui qui se laisserait aller à gémir et se tordre !

Puissions-nous quand notre tour viendra, ne pas nous trouver entre les mains d'un médecin aussi peu compatissant que le médiéviste anglican Clive Staples Lewis.

😡


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J'avoue que le quatrième de couverture qui m'a décidé à choisir ce livre, dans le cadre de Masse Critique, ne reflète pas le texte de façon complète. Car je m'attendais à une vision un peu philosophique, finalement tout se base sur Dieu, la religion et l'existence des âmes qui seraient en quelque sorte les vraies protagonistes de ce qui crée et fait subir la souffrance, même s'il s'agit aussi de la souffrance animale vers la fin du livre. Cela dit, l'auteur expose bien ce qu'il en pense et j'ai bien aimé son style même je n'y adhère pas, le sujet étant abordé d'un seul angle religieux. Pour bien apprécier cet essai il faut absolument être croyant, croire l'existence de Dieu et a sa relation avec notre existence sur Terre.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Concilier la souffrance humaine avec l’existence de Dieu n’est un problème insoluble que si nous nous obstinons à attacher au mot amour un sens superficiel et à considérer l’ordre des choses comme si l’homme en était le centre.
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